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Critique de EmileChodrucDuclos


Le minority politics, qui connaît une certain succès électoral depuis quelques années, consiste à rechercher le suffrage des minorités (femmes, « racisés », minorités sexuelles…) en leur faisant valoir (à tort ou à raison) qu'ils sont opprimés ou exploités. Évidemment, puisqu'à ce jeu le gagnant est celui qui se dit le plus opprimé, ça se transforme assez rapidement en concours de pleurniche entre minorités. L'exemple le plus flagrant en est dans les pays anglo-saxons la lutte idéologique extrêmement violente entre les féministes « TERF » et les transsexuels, illustrée récemment par les mésaventures de J.K. Rowling ou Martina Navratilova sur les réseaux sociaux. Décidée à ne pas être en reste, Françoise Vergès s'attaque ici au « féminisme blanc » ou "féminisme civilisationnel", qu'elle oppose à un « féminisme décolonial » qui serait représenté et porté exclusivement par les femmes noires. Au combat raciste et dévoyé des féministes civilisationnelles contre le voile islamique ou l'excision, s'opposerait le combat vertueux des féministes décoloniales contre le racisme et le Capitalisme. le féminisme blanc, allié objectif ou idiot utile du mondialisme libéral, est en définitive un véritable "fémo-fascisme" (page 80), qui exploite les femmes noires comme femmes de ménage ou nounous pour que les femmes blanches puissent occuper des emplois bien payés.

Formellement ce livre est un crédo, ou une incantation : il livre, sans vraiment la justifier ou l'argumenter, une doctrine dont les principaux dogmes sont, en vrac, que l'État est structurellement raciste (page 28), que la banane est "négrophobe" (page 36) et que les féministes blanches sont narcissistes (page 63). Pour preuve, elles pleurent quand on les traite de Blanches. Néanmoins ce livre a trois intérêts à mon avis : il énonce les principes d'un féminisme « décolonial » (comprendre, « noir ») sans démonstration mais avec une certaine cohérence, et affirme que les féministes blanches doivent en être exclues ; il étudie, pour le discréditer, le féminisme européen historique et montre que, trop occupé à réclamer le bikini ou la minijupe, il ne se souciait pas des Noirs ou de l'esclavage et s'accommodait très bien de la colonisation ; et enfin il illustre avec une violence ahurissante les rivalités suscitées entre les minorités par le minority politics.

Le style est un peu alambiqué. J'ai dû par exemple m'y reprendre à trois fois pour comprendre page 24 la phrase "Le système contre lequel nous luttons a renvoyé à l'inexistence des savoirs scientifiques, des esthétiques et des catégories entières d'êtres humains." Gné?
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