AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Édouard Riou (Illustrateur)
EAN : 9782253160885
925 pages
Le Livre de Poche (18/01/2005)
3.95/5   568 notes
Résumé :
LA COLLECTION DU CENTENAIRE JULES VERNE 1905-2005

Sur la foi d’un message trouvé dans une bouteille et à demi rongé par l’eau de mer, le Duncan, magnifique yacht anglais, part à la recherche du capitaine Grant naufragé. A son bord se trouvent les deux enfants du disparu, Mary et Robert. L’un des meilleurs géographes français, Jacques Paganel, personnage singulier et sympathique, fait aussi partie du voyage.
Les lacunes du message et, plus encor... >Voir plus
Que lire après Les enfants du capitaine GrantVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (38) Voir plus Ajouter une critique
3,95

sur 568 notes
5
11 avis
4
12 avis
3
13 avis
2
0 avis
1
0 avis
Les enfants du capitaine Grant est assez typique de l'univers et de l'écriture de Jules Verne. Cette histoire du voyage de deux enfants et de leurs compagnons adultes (tous Écossais, sauf un, car Verne adore les Écossais) partis à la recherche d'un marin disparu, débute avec la découverte de trois messages envoyés à la mer, en trois langues différentes, chacun comportant des lacunes et se complétant plus ou moins (le moins est important!) l'un l'autre - je suis d'ailleurs persuadée que le décryptage des parchemins par Tintin dans le Secret de la Licorne est un clin d'oeil au roman de Verne. le voyage pour retrouver le capitaine Grant sera long - le roman aussi - et se révélera surtout l'occasion pour l'écrivain de faire partager au lecteur sa grande passion : la géographie.

La grande qualité du livre, c'est son humour, à la hauteur de celui distillé dans le tour du monde en 80 jours. le personnage de Paganel, géographe françaisà la mémoire incommensurable mais d'une étourderie sans bornes, n'y est pas pour rien - et là aussi, je gage que le professeur Tournesol, qui apparaît pour la première fois sous la plume d'Hergé dans (encore!) le secret de la Licorne, a largement été influencé par le très savoureux savant de Jules Verne. le personnage du major Mac Nabbs, qui arbore à longueur de temps un flegme tout britannique, fait merveilleusement contrepoint à celui de Paganel pour notre plus grand plaisir.

Les autres personnages sont plus ennuyeux. Même si, il faut le noter car c'est peu courant chez Jules Verne, des femmes participent au voyage, elles ne servent pas à grand-chose et ne prennent que rarement part aux aventures les plus périlleuses, et donc les plus passionnantes. La plupart de ces aventures interviennent dans la première partie du roman, où les personnages (masculins, exclusivement) effectuent la traversée de la Patagonie. Traversée lors de laquelle ils rencontreront deux êtres peu ordinaires, deux Patagons : Thalcave et son cheval Thaouka. Avec eux, ils connaîtront bien des péripéties et leur périple sera agrémenté de moult catastrophes naturelles : tremblement de terre, orage monstrueux, inondation digne du Déluge de la Bible. Auxquelles s'ajoutent la sécheresse, la soif, la faim et l'attaque de bêtes sauvages. On ne s'ennuie donc pas une minute.

Malheureusement, une fois que nos héros auront découvert que le capitaine Grant ne peut se trouver en Patagonie, le voyage se poursuivra sur un rythme bien moins captivant en Australie, puis en Nouvelle-Zélande. Malgré quelques péripéties, le récit sera surtout agrémenté des leçons de géographie de Paganel, parfois intéressantes, parfois un peu longues et pénibles. Mais on reconnaît bien là la ligne éditoriale d'Hetzel, qui avait à coeur de pratiquer, à travers les livres, une pédagogie intelligente à l'intention des jeunes lecteurs, à l'inverse de ce qui se pratiquait alors. Il est d'ailleurs particulièrement intéressant de noter que le roman fait la fois écho aux clichés de l'époque (par exemple, la cruauté légendaire des Maoris) tout en se montrant parfois extrêmement critique sur la société contemporaine. Les pages sur le cannibalisme le démontrent assez, ainsi que les personnages de Thalcave et Thaouka, qui sont encore plus admirables que des Écossais- ce qui n'est pas peu dire. Quelques pages du roman se rapprochent même assez du pamphlet écologiste.

Cependant, j'avoue volontiers que les réguliers "Remettons-nous en à Dieu", " Dieu ne nous abandonnera pas", ainsi que les pleurnicheries de Mary Grant, m'ont quelque peu fatiguée et que, malgré ses qualités, j'ai trouvé le roman vraiment trop long. Mais je ne regrette pas de l'avoir lu, et je garderai un très bon souvenir de la traversée épique de la Patagonie et, bien entendu, de l'inénarrable Paganel !
Commenter  J’apprécie          306
C'est une lecture de ma jeunesse. Je devais avoir 12 ou 13 ans lors de cette lecture.
J'aimais beaucoup les descriptions longues de Jules Verne et le goût de l'aventure que me procuraient ses romans.
Il faudrait que je relise ce livre avec mes yeux d'adulte pour voir si je retrouve l'effet d'autrefois...
Commenter  J’apprécie          430
Lorsque lord Glenarvan découvre fortuitement une bouteille jetée à la mer, il ne se doute pas un seul instant que le message de détresse qu'elle contient va le conduire à effectuer un tour complet de l'hémisphère austral ! Afin de partir à la recherche du Capitaine Grant, lord et lady Glenarvan s'entourent d'une fameuse équipe à bord de leur yacht dernier cri, le Duncan, et prennent la direction des mers du sud. On trouve à bord les deux enfants du capitaine Grant qui fondent dans ce message l'espoir de retrouver leur père, Tom Austin le jeune et intrépide capitaine du Duncan, le major Mac Nabbs imperturbable aide de camp de lord Glenarvan, quantité de marins fort courageux et Paganel un extravagant géographe français étourdi et gaffeur.
Un formidable périple de plusieurs mois les conduira à traverser les océans du sud, franchir les Andes, chevaucher dans la Pampa, parcourir les plaines du sud australien et pénétrer les forêts étranges de Nouvelle-Zélande.

De tous les "voyages extraordinaires" écrits par Jules Verne, celui-ci est vraiment mon préféré. L'extrême richesse des aventures, la variété des paysages traversés, l'exotisme de ces terres reculées, tout y est ou presque. Bien entendu, l'auteur qui ne connaissait lui-même ces contrées qu'au-travers des ouvrages qu'il a lus et des témoignages qu'il a reçus prend parfois quelques menues libertés avec la réalité, bien vite oubliées cependant.
Mais le point le plus remarquable du livre — qui se trouve d'ailleurs être une caractéristique récurrente de l'oeuvre vernienne — est l'incroyable somme de connaissances embarquées dans le récit et distillées tout au long de celui-ci. On comprend toute la portée pédagogique qu'un tel roman a pu avoir à l'époque où il fut écrit — ainsi qu'à notre époque bien sûr même si elle est assurément moindre — tout y est ! histoire, zoologie, ethnologie et bien sûr géographie ; ou comment apprendre de tonnes de choses tout en suivant les addictives aventures du groupe d'Écossais.
Une note dissonante cependant : Jules Verne, en notable de son temps d'une puissance colonisatrice, se conformes aux visions conservatrices de son époque et dépeint comme à son habitude de braves et ingénieux occidentaux parés de toutes les vertus, régulièrement aux prises avec de "stupides" autochtones perclus de vices. Quant à la vision de la femme, si ce roman a déjà la chance d'en comporter au moins deux dont on suit quelques faits et gestes, je n'ai pas l'impression que l'auteur les fait particulièrement briller par leurs initiatives.
Enfin, malgré cette légère note d'amertume, que voilà une histoire savoureuse ! Un parfum d'exotisme indéniable entretenu tout au long du voyage et de la découverte de lieux vierges ou méconnus, le tout relevé par l'irruption du géographe Paganel dont les gaffes à répétition et la gentille arrogance pimentent le récit jusqu'à la dernière lampée. Un grand cru incontournable assurément.
Commenter  J’apprécie          301
Il y a des jours comme ça où on a envie de prendre le large, mais faute de moyens pour le faire, on reste là, comme des pauvres filles, des pauvres garçons, à égrener les minutes d'un quotidien identique à hier et demain. Puis, le soir, alors que rien ne nous y prédisposait, on fait violence à sa résignation et on se dit : « Partons ! »
Là devant nos mains fébriles, une promesse se dessine : Les Enfants du capitaine Grant. Oui, c'est ça, ramassons nous aussi, comme le couple Glenarvan, cette bouteille à la mer, embarquons les enfants du capitaine, ce « trésor » qu'il faut retrouver !
« Je partirai ! Steamer balançant ta mâture, / Lève l'ancre pour une exotique nature ! », nous invitait déjà Mallarmé.
L'aventure nous sera offerte sur un plateau d'argent, avec ses rebondissements, ses terres lointaines, ses tribus hostiles, ses trahisons et ses châtiments, son issue…qu'on ne révélera pas.
Jules Verne au mieux de sa forme, Jules Verne dont l'imaginaire voit loin, si loin que nous le suivrons de bon coeur dans l'hémisphère sud afin de résoudre une énigme à nous faire tourner en rond.
Important : lire Les enfants du capitaine Grant et 20 000 lieues sous les mers et ensuite, seulement ensuite, L'île mystérieuse.
C'est bien de partir là-bas lorsqu'ici les balles répondent aux crayons…
Commenter  J’apprécie          261
Un très grand Jules Verne que je découvre enfin. J'ai 31 ans et j'ai commencé à lire les Voyages Extraordinaires à l'âge de 12 ans. Après le Tour du monde en 80 jours et Voyage au centre de la Terre, j'avais voulu lire l'île mystérieuse, l'un de ses plus grands chefs-d'oeuvre.

À l'époque, Internet n'était pas aussi répandu qu'aujourd'hui et je découvris in extremis que, pour lire l'île mystérieuse, il fallait lire au préalable 20.000 lieues sous les mers. Un peu contrarié au départ de devoir changer mon plan de lecture, je contins ma frustration et découvris finalement avec un plaisir immense les aventures du capitaine Némo. Une fois cet autre chef-d'oeuvre terminé, je dévorai enfin l'île mystérieuse.

Mais quelle surprise je n'eus pas en me rendant compte que cet incroyable ouvrage était le troisième tome d'une trilogie dont le second était, vous le devinez, Les Enfants du capitaine Grant ! Trop tard, je fus spoilié du destin d'Ayrton, antagoniste imperturbable des Enfants du capitaine Grant. Pas grave, je lirai cette deuxième aventure après l'île mystérieuse ... Grand naïf que j'étais!

Peut-être est-ce parce que l'île mystérieuse m'avait rassasié ou que je n'avais plus de réel leitmotiv que j'ai mis plus de 15 ans avant de lire enfin cette incroyable histoire. Pourtant, je n'ai jamais arrêté de lireJules Verne. Pour tout vous dire, Les Enfants du capitaine Grant est mon 30ème Jules Verne et je ne compte pas en rester là.

Je n'écris pas de critique systématiquement sur tous les Jules Verne que je lis, mais je tenais tout de même à raconter cette petite anecdote et aussi insister sur le fait que cette histoire est digne des plus grandes de son auteur. On pourrait croire que 20.000 lieues sous les mers et l'île mystérieuse surpassent le Capitaine Grant, et peut-être aurions-nous raison. Cela dit, cette histoire est injustement méconnue par rapport aux deux autres.

Le scénario en tant que tel intègre tout ce qui fait une bonne histoire vernienne. Une intrigue excellente, des péripéties, du suspens, des rebondissements, de la légèreté et de l'humour, du savoir, un rythme soutenu et une conclusion magistrale.

Mais j'ai quand même UN SEUL BÉMOL que je ne peux m'empêcher de souligner. Bien que je fais systématiquement le travail de contextualisation d'époque, notamment quand Jules Verne écrit et assume une certaine hiérarchie entre les hommes sur base de critères considérés aujourd'hui comme racistes, ce point-là, je l'accepte et parviens à garder sans problème la distanciation et le discernement nécessaire (lire l'oeuvre avec une paire de lunettes du 19ème siècle), je n'ai par contre pas réussi à trouver en moi suffisamment de recul au moment où, (attention je vais SPOILIER) vers la fin du livre, nos héros profanent en toute impunité le sacré, c'est-à-dire la tombe d'un guerrier d'une tribu néozélandaise qu'ils venaient de tuer quelques chapitres plus tôt.

Jules Verne n'hésite pas à ridiculiser les indigènes comme des superstitieux qui n'oseraient pas déloger les profanateurs (nos dits héros) sous peine d'une punition divine. Bon jusque-là pourquoi pas, mais l'écrivain enfonce encore plus le clou en décrivant nos protagonistes occidentaux en train de prendre un malin plaisir à railler cette ingénuité et en consommant impunément l'eau et la nourriture laissées par la tribu néozélandaise en guise d'offrandes pour leur guerrier mort sous le feu du pistolet occidental. Il y a là, je trouve, une cruauté qui n'était, selon moi, pas nécessaire de la part de Jules Verne. Son imagination débordante aurait pu tirer d'affaire plus noblement nos héros plutôt qu'en usant de la profanation et la raillerie des croyances d'une autre civilisation.

Que Jules Verne considère le peuple occidental comme supérieur, je lui concède bien volontiers, c'est encore une fois, un sentiment d'époque (contextualisation). Par contre, qu'il prenne tant à légère la divination de la mort et la façon dont elle est célébrée par une autre civilisation, je trouve là qu'une limite est franchie. Même en faisant un travail de recul, je ne parviens pas à trouver des circonstances atténuantes à l'auteur. Mais peut-être que je sacralise beaucoup trop le respect des morts, qu'importe les peuples auxquels ils ont appartenu.

Malgré ce petit bémol (qui représente, je précise, un chapitre sur tout le livre), je garde une expérience de lecture extraordinaire dont seul Jules Verne à le secret. Il est difficile d'écrire plus de 900 pages sans qu'on y trouve rien à redire. Mais malgré cette exhaustivité et cette générosité, le sans-faute est presque accompli et c'est pour cette raison que je n'en tiens pas rigueur à l'un de mes auteurs préférés. Par conséquent, je conserve la note de 5 étoiles bien méritées pour cette incroyable histoire : Les Enfants du Capitaine Grant !
Commenter  J’apprécie          112

Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
Cet homme grand, sec et maigre, pouvait avoir quarante ans ; il ressemblait à un long clou à grosse tête ; sa tête, en effet, était large et forte, son front haut, son nez allongé, sa bouche grande, son menton fortement busqué. Quant à ses yeux, ils se dissimulaient derrière d'énormes lunettes rondes, et son regard semblait avoir cette indécision particulière aux nyctalopes. Sa physionomie annonçait un homme intelligent et gai ; il n'avait pas l'air rébarbatif de ces graves personnages qui ne rient jamais, par principe, et dont la nullité se couvre d'un masque sérieux. Loin de là. Le laisser-aller, le sans-façon aimable de cet inconnu démontraient clairement qu'il savait prendre les hommes et les choses par leur bon côté. Mais sans qu'il eût encore parlé, on le sentait parleur, et distrait surtout, à la façon des gens qui ne voient pas ce qu'ils regardent, et qui n'entendent pas ce qu'ils écoutent. Il était coiffé d'une casquette de voyage, chaussé de fortes bottines jaunes et de guêtres de cuir, vêtu d'un pantalon de velours marron et d'une jaquette de même étoffe, dont les poches semblaient bourrées de calepins, d'agendas, de carnets, de portefeuilles, et de mille objets aussi embarrassants qu'inutiles, sans parler d'une longue-vue qu'il portait en bandoulière.
Commenter  J’apprécie          160
« Español ? » dit-il.

Le Patagon remua la tête de haut en bas, mouvement alternatif qui a la même signification affirmative chez tous les peuples.

« Bon, fit le major, voilà l’affaire de notre ami Paganel. Il est heureux qu’il ait eu l’idée d’apprendre l’espagnol ! »

On appela Paganel. Il accourut aussitôt, et salua le Patagon avec une grâce toute française, à laquelle celui-ci n’entendit probablement rien. Le savant géographe fut mis au courant de la situation.

« Parfait, » dit-il.

Et, ouvrant largement la bouche afin de mieux articuler, il dit :

« Vos sois un homem de bem ! »

L’indigène tendit l’oreille, et ne répondit rien.

« Il ne comprend pas, dit le géographe.

— Peut-être n’accentuez-vous pas bien ? répliqua le major.

— C’est juste. Diable d’accent ! »

Et de nouveau Paganel recommença son compliment. Il obtint le même succès.

« Changeons de phrase, » dit-il, et, prononçant avec une lenteur magistrale, il fit entendre ces mots :

« Sem duvida, um patagâo. »

L’autre resta muet comme devant.

« Dizeime ! » ajouta Paganel.

Le Patagon ne répondit pas davantage.

« Vos compriendeis ? » cria Paganel si violemment qu’il faillit s’en rompre les cordes vocales.

Il était évident que l’Indien ne comprenait pas, car il répondit, mais en espagnol :

« No comprendo. »

Ce fut au tour de Paganel d’être ébahi, et il fit vivement aller ses lunettes de son front à ses yeux, comme un homme agacé.

« Que je sois pendu, dit-il, si j’entends un mot de ce patois infernal ! C’est de l’araucanien, bien sûr !

— Mais non, répondit Glenarvan, cet homme a certainement répondu en espagnol. »

Et se tournant vers le Patagon :

« Español ? répéta-t-il.

— Si, si ! » répondit l’indigène.

La surprise de Paganel devint de la stupéfaction. Le major et Glenarvan se regardaient du coin de l’œil.

« Ah ça ! mon savant ami, dit le major, pendant qu’un demi-sourire se dessinait sur ses lèvres, est-ce que vous auriez commis une de ces distractions dont vous me paraissez avoir le monopole ?

— Hein ! fit le géographe en dressant l’oreille.

— Oui ! Il est évident que ce Patagon parle l’espagnol...

— Lui ?

— Lui ! Est-ce que, par hasard, vous auriez appris une autre langue, en croyant étudier... »

Mac Nabbs n’acheva pas. Un « oh ! » vigoureux du savant, accompagné de haussements d’épaules, le coupa net.

« Major, vous allez un peu loin, dit Paganel d’un ton assez sec.

— Enfin, puisque vous ne comprenez pas ! répondit Mac Nabbs.

— Je ne comprends pas, parce que cet indigène parle mal ! répliqua le géographe, qui commençait à s’impatienter.

— C’est-à-dire qu’il parle mal parce que vous ne comprenez pas, riposta tranquillement le major.

— Mac Nabbs, dit alors Glenarvan, c’est là une supposition inadmissible. Quelque distrait que soit notre ami Paganel, on ne peut supposer que ses distractions aient été jusqu’à apprendre une langue pour une autre !

— Alors, mon cher Edward, ou plutôt vous, mon brave Paganel, expliquez-moi ce qui se passe ici.

— Je n’explique pas, répondit Paganel, je constate. Voici le livre dans lequel je m’exerce journellement aux difficultés de la langue espagnole ! Examinez-le, major, et vous verrez si je vous en impose ! »

Ceci dit, Paganel fouilla dans ses nombreuses poches ; après quelques minutes de recherches, il en tira un volume en fort mauvais état, et le présenta d’un air assuré. Le major prit le livre et le regarda :

« Eh bien, quel est cet ouvrage ? demanda-t-il.

— Ce sont les Lusiades, répondit Paganel, une admirable épopée, qui...

— les Lusiades ! s’écria Glenarvan.

— Oui, mon ami, les Lusiades du grand Camoëns, ni plus ni moins !

— Camoëns, répéta Glenarvan, mais, malheureux ami, Camoëns est un portugais ! C’est le portugais que vous apprenez depuis six semaines !

— Camoëns ! Lusiades ! portugais ! ... »

Paganel ne put pas en dire davantage. Ses yeux se troublèrent sous ses lunettes, tandis qu’un éclat de rire homérique éclatait à ses oreilles, car tous ses compagnons étaient là qui l’entouraient.
Commenter  J’apprécie          40
- Je n'exagère rien, reprit Paganel. Robert a montré qu'il était un homme, et je le traite en homme, en ne lui cachant pas la vérité. Les Néo-Zélandais sont les plus cruels, pour ne pas dire les plus gourmands des anthropophages. Ils dévorent tout ce qui leur tombe sous la dent. La guerre pour eux n'est qu'une chasse à ce gibier qui s'appelle l'homme, et il faut l'avouer, c'est la seule guerre logique. Les Européens tuent leurs ennemis et les enterrent. Les sauvages tuent leurs ennemis et les mangent, et, comme l'a fort bien dit mon compatriote Toussenel, le mal n'est pas tant de faire rôtir son ennemi quand il est mort, que de le tuer quand il ne veut pas mourir.
- Paganel, répondit le major, il y a matière à discussion, mais ce n'est pas le moment. Qu'il soit logique ou non d'être mangé, nous ne voulons pas qu'on nous mange.
Commenter  J’apprécie          200
On monta pendant toute la nuit ; on se hissait à force de poignets sur des plateaux presque inaccessibles ; on sautait des crevasses larges et profondes ; les bras ajoutés aux bras remplaçaient les cordes, et les épaules servaient d’échelons ; ces hommes intrépides ressemblaient à une troupe de clowns livrés à toute les folie des jeux icariens. Ce fut alors que la vigueur de Mulrady et l'adresse de Wilson eurent mille occasions de s'exercer. Ces deux braves Écossais se multiplièrent ; maintes fois, sans leur dévouement et leur courage, la petite troupe n'aurait pu passer. Glenarvan ne perdait de vue le jeune Robert, que son âge et sa vivacité portaient imprudences. Paganel, lui, s'avançait avec une furie toute française. Quant au major, il ne se remuait qu'autant qu'il le fallait, pas plus, pas moins, et il s'élevait par un mouvement insensible. S'apercevait-il qu'il montait depuis plusieurs heures ? Cela n'est pas certain. Peut-être s'imaginait-il descendre.
Commenter  J’apprécie          150
L'ensemble de ces terrains porte un nom significatif sur les cartes anglaises : "Reserve for the blacks", la réserve pour les Noirs. C'est là que les indigènes ont été brutalement repoussés par les colons. On leur a laissé, dans les plaines éloignées, sous les bois inaccessibles, quelques places déterminées, où la race aborigène achèvera peu à peu de s'éteindre. Tout homme blanc, colon, émigrant, squatter, bushman, peut franchir les limites de ces réserves. Le Noir seul n'en doit jamais sortir.
Commenter  J’apprécie          120

Videos de Jules Verne (127) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jules Verne
In the same year that Jules Verne published Around the World in 80 Days, Henri Cernuschi set foot in Asia – the ultimate goal of a journey that would give rise to one of the most impressive collections of Asian art in Europe. Starting in Japan before moving on to China, Indonesia, Ceylon and India, our traveller was struck by the artistic wealth of the countries he visited. In a matter of months, he collected several thousand objects, particularly bronzes, whose value he was the first to understand.
Upon returning to Paris, Cernuschi immediately exhibited his collection. Artists and craftsmen of the time were quick to view his Chinese and Japanese pieces as extraordinary sources of inspiration. The range of shapes and patterns and the technical innovation showcased in Cernuschi's collection became models for an entire generation of creators. True to his visionary intuitions, Cernuschi had an hôtel particulier built, which he designed as a museum space from the get-go. This property would go on to become the City of Paris' museum of Asian arts by the end of the 19th century.
This exhibition celebrates the 150th anniversary of Cernuschi's return from Asia and invites the public to rediscover the traveller's journey and the collector's contributions to the revolution in taste that would become known as “Japonisme”. From the start of the tour and throughout the exhibition, a projection and five audio stations punctuate the display, with each step painting a portrait of this outstanding collector.
New for this anniversary, this summer the museum's permanent collections will unveil restored Japanese sculpted dragons, which have not been exhibited in their entirety since 1930.
En savoir plus sur l'exposition : www.parismusees.paris.fr/en/exposition/return-from-asia
+ Lire la suite
autres livres classés : classiqueVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus



Lecteurs (2567) Voir plus



Quiz Voir plus

LES ENFANTS DU CAPITAINE GRANT

Quel est le titre de ce livre?

LES ENFANTS DU CAPITAINE MECHANT
LES ENFANTS DU CAPITAINE GLENARVANT
LES ENFANTS DU CAPITAINE GRANT

10 questions
23 lecteurs ont répondu
Thème : Les enfants du capitaine Grant de Jules VerneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..