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EAN : 9782315010363
Max Milo (14/02/2023)
4.5/5   8 notes
Résumé :
Soyez leur protecteur, pas leur agresseur


Il est des existences dont on peine à imaginer la réalité. La vie de Marie-Claire est de celles-là. Enfant non désirée, née en France, battue, enrôlée de force dans un trafic de drogue, elle est abandonnée, placée temporairement à la ddass avant d’être rendue à ses parents et… kidnappée par sa famille paternelle, des islamistes radicalisés qui lui feront vivre un enfer, dix ans durant, avant qu’enfin e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Je voudrais tout d'abord commencer par remercier la Masse Critique Babelio ainsi que les Éditions Max Milo pour l'envoi de ce livre.

Concernant la couverture, elle est minimaliste, mais elle représente bien le thème de ce livre, avec l'enfant objet, qui souffre, au milieu de ses parents.

Concernant la plume, je l'ai trouvée à la fois fluide et agréable, mais aussi brute et sans fard. Elle ne cherche pas à en rajouter pour attirer la compassion, sans non plus enjoliver la vérité. Elle raconte les faits, simplement. Des faits horribles, surtout pour une enfant, mais des faits tout de même.

J'ai apprécié la façon dont sont agencés les chapitres. On commence toujours par une citation tout à fait appropriée, puis un petit moment du présent de Marie-Claire, que ce soit ses réveils difficiles, ses problèmes de santé dus à son enfance, ses questions, l'association d'aide aux familles victimes de rapts parentaux qu'elle a fondé (ThéraVie ARP-APA anti-RPicide), des chiffres sur les rapts parentaux... Puis, elle nous plonge inexorablement dans son passé, cette plaie qui n'arrive toujours pas à cicatriser complètement malgré les années écoulées...

Le début de la vie de Marie-Claire la prédestinait déjà à la difficulté. Lorsqu'elle tombe enceinte sa mère, Annie, a seize ans et son père, Hacène, en a vingt-huit. Elle est française, mise à la porte par ses parents et ne veut pas garder cet enfant ; lui est algérien, rêveur, sans travail et incarcéré pour détournement de mineure. Pourtant, lorsqu'il sort, il est heureux d'avoir sa petite famille et fait ce qu'il peut pour améliorer leur vie.

Là où cela commence à déraper, c'est quand il repart en Algérie pour annoncer la nouvelle à sa famille. Lorsqu'il revient, son meilleur ami, Mouloud, a pris sa place dans le lit de sa copine. Il repart au bled, détruit et ne n'en relèvera jamais.

À partir de là, la vie ne sera pas de tout repos pour la petite fille. Dès le départ, on sent que sa mère ne l'aime pas, qu'elle la juge responsable du fait qu'elle n'ait pas pu faire d'études (on tiendra pas compte du fait que c'est elle qui a eu un rapport sexuel non protégé...). Sans domicile, ils vivent à bord d'une fourgonnette. L'alcool et la drogue s'invitent dans leur quotidien, la violence aussi, ainsi que deux autres petites filles (Fleur et Rose, qui ne seront jamais battues). Marie-Claire passera un an chez sa tante maternelle. Il y aura quelques allers retours en Algérie également.

Ils finissent par s'installer à Mauguio et la violence faite à Marie-Claire augmente encore d'un cran. C'est même insoutenable à lire. Aucun enfant ne devrait connaître ça. D'autant plus que c'est une petite fille gentille et sage qui ne fait pas de vagues. le pire, c'est que les voisins et les enseignants sont au courant, mais qu'ils ne font rien. La police et la DDASS s'en mêlent bien à un moment, mais elles sont finalement rendues à leur famille... Vive la justice !

C'est là, en 1985, qu'Annie laisse Mouloud emmener la petite fille de dix ans en Algérie, alors qu'il n'a aucun droit sur elle, alors que cette dernière supplie le douanier de ne pas le laisser l'emmener... Elle finit par arriver dans la famille de son père. Elle n'en repartira pas avant ses vingt ans...

Dans cette grande maison, avec cette famille riche, tout empire encore. Si sa grand-mère Yemma éprouve de l'affection pour elle, c'est malheureusement son oncle Noury qui devient son tuteur légal : un homme méchant, violent et radicalisé. En tant que membre de cette famille, il la dit musulmane lui impose l'islam. Marie-Claire va donc devoir se voiler, faire le ramadan, aller à la mosquée, ne plus écouter de musique, ne plus parler aux garçons... En bref, elle n'a plus le droit de rien faire. Elle n'a plus de droits tout court. Et c'est sans compter les humiliations, la violence omniprésente, la séquestration ainsi que les attouchements auxquels elle devra faire face dix ans durant... N'oublions pas non plus le contexte tendu en Algérie et les exactions ainsi que les meurtres que commettent les extrémistes...

Comment pouvoir mettre des mots justes sur cette lecture ? Comment la classer dans la catégorie "J'ai adoré" alors qu'elle a vécu l'Enfer (la majuscule est amplement à sa place) ? Cela fait vraiment la grosse perverse qui s'est délectée du malheur d'autrui... Alors qu'en fait, c'est plus une question de ressenti et d'émotions. Et des émotions j'en ai eu ! Plus que je n'aurais pu imaginer. J'ai ressenti des frissons d'horreur pour elle, et en tant que mère en imaginant mes gremlins dans sa situation. J'admire aussi sa force et son courage, que ce soit passé aussi bien que présent. Parce qu'elle s'est relevée malgré les difficultés et qu'elle n'a jamais abandonné l'idée de s'échapper et de retrouver sa liberté. Parce qu'aujourd'hui, elle se bat encore pour sortir la tête de l'eau. Parce qu'aujourd'hui, elle aide les familles qui sont dans la situation dans laquelle elle-même s'est trouvée.

J'ai ressenti certains moments de soulagement, profitant avec Marie-Claire des quelques moments de répit vécus avec les alliés qu'elle a pu se faire, que ce soit sa tante maternelle lorsqu'elle était petite, Yemma (même si tout n'était pas rose non plus), Khalid et Khalida, son père, une partie de sa famille en Tunisie, le père de Mouloud, Françoise...

Concernant la fin, j'ai énormément apprécié le fait que l'auteure termine par une lettre à ses parents. C'est vrai que lorsqu'il n'y a pas ou plus de dialogue, une lettre est le meilleur moyen d'exprimer ce que l'on a à dire, que la lettre soit lue ou non.

En résumé, c'est une lecture qui a été très dure, parce que le traitement infligé à Marie-Claire est inhumain, que ce soit par sa mère Annie ou par sa famille paternelle en Algérie. Mais c'est aussi un témoignage poignant, d'une jeune fille qui n'a jamais voulu se soumettre, d'une femme qui continue de se battre contre les fantômes de son passé, contre ses séquelles, mais aussi pour l'avenir des parents et des enfants victimes de la même situation que la sienne. Une belle preuve de courage et de vaillance. Je ne peux que lui souhaiter le meilleur pour les années à venir, elle le mérite.
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Le récit est dense, intense, haletant même.
Les événements sont tels qu'on pourrait se penser dans un roman particulièrement noir mais non, il s'agit bien de l'histoire de vie de l'auteure. Une vie monstrueuse de violences physiques et verbales, d'attouchements, de torture, de contrôle, d'enlèvement...perpétrés par sa propre famille. Mais une vie libéré aussi au terme d'une évasion risquée mais salvatrice. Et ensuite le lent et long chemin pour tenter de se (re)construire.
Je reste révoltée par les comportements de ces adultes qui se sont acharnés sur une enfant par simple cruauté ou désir de domination. En espérant que depuis 30 ans ce genre de situations est plus facilement repéré et stoppé...
Reste la question du rapt d'enfants qui est malheureusement toujours d'actualité et je salue l'engagement de l'auteur pour les aider.
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C'est une histoire extrêmement touchante, qui place le lecteur dans la vie d'une enfant si fragile, sensible, mais tellement courageuse face à sa vie semée d'abus en tous genres. Malheureusement, la violence à laquelle M-C a dû survivre ne fait que croître et augmenter en intensité avec les années. Les agresseurs vont de plus en plus loin. M-C reste pudique sur certains détails tout en immergeant le lecteur dans cette vie de traumatismes. le rapt parental est plus courant que ce que l'on peut croire, et il est important de se battre contre ce phénomène qui peut, dans une grande partie des cas, être évité en réagissant au bon moment. L'inaction des voisins, de l'école, de la DDAS qui la confie de nouveau à ses parents, le manque de contrôles aux frontières... L'action d'une seule personne à un de ces moments clés aurait suffi à éviter une vie de souffrance. A lire absolument.
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Un ami peintre m'a dit un jour, lors d'une discussion philosophique. Là, il n'y a plus de mots, c'est la peinture qui « m'exprime ». A la lecture de Marie Claire, il n'y a plus de mots, c'est mon corps qui « m'exprime ».
Au fil des pages il devient lourd, pesant, écrasé, affecté, survolté, impuissant. Mon esprit se sentant assiégé par un corps oppressant tente une sortie. Chevalier d'un château mol, il se lance vaillamment à l'assaut d'un pourquoi ? Mais il déchante très vite, ramené à la réalité d'un parce que, d'où la souffrance parle avec ses maux, dans une écriture viscérale, vomissant l'immonde de notre humanité et éclaires nos consciences de la monstruosité de nos âmes.
Mon corps s'isole alors et mon esprit retient mes larmes.
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C'est un avis très mitigé que j'ai pour ce livre.
Je m'explique, Marie-Claire nous raconte son passé très compliqué, une mère qui ne ressent rien pour elle, un père biologique absent, un beau père tyrannique, un tuteur horrible .. puis un "enlèvement" dans le pays de son tuteur avec un mari commis d'office qui n'est évidemment pas celui qu'elle a choisit. Elle va tout faire pour revenir en France auprès de ses soeurs adorées et de sa mère.
Mais celle-ci ne va pas réagir comme elle le pensait puisqu'elle ne veut pas d'elle.
Ses soeurs oui mais pas sa mère.

Donc je revient sur mon avis du coup mitigé,
J'ai trouvé le livre long, certains passages confus, elle dit être coincée en Algérie mais parfois elle revient en France pour des visites.. pourquoi ne s'est-elle pas cachée en France pour ne pas revenir en Algérie ?
De plus elle était pas vraiment bloquée dans ce pays puisqu'elle pouvait parfois revenir en France.. enfin ça j'ai pas compris.

Ça n'enlève en rien bien sur à ce qu'elle a vécu d'horrible ! Il faut un sacré courage pour s'en sortir avec tous ces rejets.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Comme pour n'importe qui, le lieu des fouilles, c'est l'enfance. Sauf que je n'ai pas eu l'enfance de n'importe qui. C'est le moins qu'on puisse dire. Hier, j'ai fait le test de Holmes et Rahe. Tout le monde peut le faire, on le trouve en ligne, et il suffit d'avoir un peu de mémoire et de savoir compter. Afin de déterminer une sorte d'échelle de stress, ces deux chercheurs de Harvard ont établi une liste de nombreux événements dramatiques d'une vie susceptibles d'affecter le sujet en une année : mort d'un proche, violences sexuelles, internement, drogue, maladie grave, etc. À chaque événement est attribué un nombre de points qu'on additionne à la fin. Un total de 200 est un signal d'alarme, à 300 ils conseillent un traitement lourd, possiblement une hospitalisation. J'ai choisi quelques années de ma vie, 1985, 1995, 2003, 2007, 2019... Mon total annuel oscille entre 800, les bonnes années, et 2000, les mauvaises... En conséquence, j'ai arrêté mes additions. Beaucoup trop stressant.
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Cette époque est celle où Noury perd tout contrôle de sa violence. Un jour où je dois repasser ses chemises avant d'aller au lycée, il me reproche un tout petit pli mal fait sous un bouton. Il me saute dessus et me bat. Je hurle. C'est d'une telle violence que ma tante Naadi, qui habite au-dessus avec mon oncle Moufid, descend et s'interpose. C'est rare.
Une autre fois, quatre de mes oncles, je ne sais plus lesquels mais il y avait Noury et Azz, c'est sûr, me frappent en même temps pendant que je me roule par terre. Je ne sais même plus pourquoi ils me battent, cette fois-ci. Mais je me souviens que j'ai été sauvée par mon père qui, bénéficiant d'une permission de l'hôpital, est arrivé à ce moment-là pour nous rendre une visite. Il m'a arrachée à eux et m'a emmenée. Nous avons passés quelques heures ensemble. Nous sommes allés nous balader sur la plage, mais il a bien fallu qu'il me ramène.
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Chaque jour m'arrivent les messages des enfants de l'ombre. Ce sont des enfants sans présence, des fantômes que la société ignore. Les enfants victimes de rapts parentaux n'existent pas. En tout cas, pas juridiquement. Ils entrent dans les catégories des enfants victimes de violences, kidnappés, en danger... mais le rapt par un parent, s'il est évidemment contemplé par la loi française, en tant que "déplacement illicite d'enfant à l'étranger", ne fixe aucun statut spécifique de l'enfant, or le rapt par un parent représente une catégorie en soi du kidnapping d'enfant, avec un contexte, une histoire, des processus, des constantes criminelles, qu'une meilleure définition du phénomène ne pourra qu'aider à comprendre. Parce que "mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde", mal nommer ces petites victimes, c'est ajouter chaque instant à leur malheur.
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Des milliers d'enfants sont enlevés, raptés, chaque année dans le monde. Plus de cinq cents enfants disparaissent chaque année de France dans ces conditions, et des centaines de dossiers, notamment, sont en litige entre l'Algérie et la France, depuis les années quatre-vingt. En octobre 2020, la chancellerie a admis connaître trois cent dix-huit dossiers "dont la gestion est très difficile", en clair, des dossiers bloqués dont personne, au-delà des familles, ne se préoccupe plus. Compte tenu de la durée moyenne d'un rapt, estimée en fonction des dossiers à sept à huit ans, combien de dossiers accumulés sont réellement dans l'impasse ? Combien d'enfants raptés, par ailleurs, ne figurent pas dans cette comptabilité, du seul fait que les parents n'ont pas déclaré les rapts ? J'en ai des dizaines à l'association, combien sont-ils en réalité ? Qui s'en préoccupe ?
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Parfois, il arrive qu'elle me morde jusqu'au sang. Pendant qu'elle le fait, elle souffle, j'entends sa rage, comme un chien. Il arrive que j'aie sa tête très près de moi et j'ai envie de la frapper mais je me retiens parce que je sais que ça serait pire après. D'autres fois, elle me traîne dans le jardin en me tirant par les cheveux. Elle peut aussi me battre par surprise. Un jour, alors que je regarde la télévision, assise sur le canapé, sans qu'il y ait eu aucune alerte, elle me tire la tête en arrière et la bloque contre le chambranle de la porte du salon, puis elle claque la porte plusieurs fois. Quand je reprends conscience, elle me dit que c'est parce que j'avais mal mis le plaid sur le canapé.
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