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Critique de Kirzy


Delphine de Vigan explore les dérives de notre époque en mettant en regard l'un de l'autre deux portraits de femmes. Mélanie et Clara étaient adolescentes au moment du Loft et de l'éclosion de Loana, mais elles viennent de milieux différents, ont reçu une éducation radicalement opposée. Mélanie recherche la célébrité et la lumière, elle adhère sans retenue ni réserve à l'exhibitionnisme ambiant en se réinventant comme influenceuse Youtube à succès. Chaque jour, elle met en scène des vidéos de ses enfants déballant des cadeaux sponsorisés, entre autres. Clara, elle, est en marge de tout cela, en retrait d'une époque qui lui fait peur, ce qui ne l'empêche pas d'être une policière procédurière hors pair. Les deux se rencontrent lorsque Kimmy, la fille de six ans de Mélanie, est enlevée.

On ne peut qu'être d'accord avec l'auteure qui dénonce les pratiques de ces influenceurs qui exploitent leurs enfants par vénalité ou narcissisme. Delphine de Vigan décrit parfaitement les violences invisibles engendrées par cette société du spectacle, dressant un tableau précis, glaçant, parfaitement disséqué. Elle interroge aussi sur la maternité avec pertinence.

Pour autant, je ressors très mitigée de cette lecture. Il me semble que le texte hésite beaucoup trop entre documentaire et fiction, sans vraiment trouver le bon équilibre. Soit cela ne va pas assez loin si l'on est familier des dessous de ces pratiques youtubesques, soit cela manque de romanesque. La partie polar est très plate, le personnage de Clara sans intérêt pour l'avancée du récit. Et au final, la deuxième partie, trop courte, qui aurait pu être très intéressante en nous projetant dans l'après, en 2030, pour voir ce que sont devenus ces enfants surexposés, ne décolle jamais vraiment.

Surtout, j'ai été dérangée par le regard de procureur qui plane au-dessus du texte, en permanence, et transforme le texte en réquisitoire un peu lourd et beaucoup trop moralisateur. Delphine de Vigan déroule sa thèse au bulldozer, sans réelle finesse, elle qui a été si fine dans de nombreux romans. En tant que lectrice, je n'aime pas qu'un roman impose un jugement binaire, j'aime trouver par moi-même, par ma réflexion une place dans le roman. Et là, je me suis sentie piégée, alors qu'encore une fois, je partage totalement le point de vue de l'auteure. Bref, ce roman manque terriblement de distance, de complexité, d'humour sans doute aussi pour lui enlever son aspect empesé.

Je précise que mon avis est à contre-courant des autres plutôt très positifs. Cela me déçoit d'autant plus de ne pas l'avoir apprécié alors que j'ai déjà eu de très beaux moments de lecture avec Delphine de Vigan ( No et moi, Les Heures souterraines, Rien ne s'oppose à la nuit ).



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