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EAN : 9782856684108
80 pages
Rougerie (02/05/2020)
3.67/5   6 notes
Résumé :
"Damages" est un un recueil de poèmes sur le deuil
que l'auteur a écrit en la mémoire de ses parents.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
De la poésie, Christian Viguié nous dit que « si elle passe par les mots, elle ne se réduit pas à la magnificence des mots. Elle est d'abord le produit d'une expérience sensible. Elle relève de l'ordinaire affirmant que le réel a encore besoin d'accoucher du réel. »
Ce réel poétique, on le retrouve dans chaque strophe de chaque page de Damages.
« J'ajoute un ciel
A chaque chose
Un ciel à chaque pas… »
La mort de la mère, celle du père, sont là, palpables à travers les paysages, les choses de la vie. « le monde se renverse/ à cause d'une mort » Les morts habitent toujours ce monde, d'une façon différente, Ainsi s'adresse-t-il au père en l'invitant à revenir, « à surgir pareil à un parfum/ ou s'accorder à la forme d'un nuage ». Et il y a la mère disparue qu'il cherche « au milieu des choses qui n'ont plus de nom »
Cette mort est toujours là, très proche jusque dans l'air qu'il respire et « dans toutes les choses qui s'inversent comme l'enfance ». La mort permet ce retournement, elle est tout le contraire d'un grand silence, d'un néant et en cela, les paroles de deuil du poète sont apaisement.

Christian Viguié parle «la langue de l'arbre », il réinvente le nom de la colline et c'est en marchant « lentement avec les mots » qu'il écrit le monde.
Dans l'évocation simple de la nature, on a l'envie soudaine de joindre notre chant à celui du poète, ce chant « qui annulerait la sentence lente de naître ou de mourir »
Cette poésie de l'ordinaire, on l'effleure du bout des doigts et du regard dans ce recueil pudique « chant de deuil, un presque murmure » qui nous pénètre et nous émeut

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C'est une belle invitation à la poésie que celle que nous offre Christian Viguié dans son recueil "Damages". Publié en 2021, cet ouvrage a reçu le Prix Mallarmé la même année. Décomposée en deux parties, le recueil est dédié à chacun de ses deux parents disparus.

« Damages* est ici avant tout un chant de deuil, un presque murmure, la ligne brisée d'un horizon. […] Un chant qui porte en lui une sévère et rêche contradiction : tenter de trouver un point d'équilibre entre ce qui a toujours été de l'ordre du prévisible et celui qui relève à tout jamais de l'inconcevable. »
Cette recherche du point d'équilibre que décrit Christian Viguié est sensible dans chacun de ses textes.
La mort venue, la disparition d'un être cher, c'est hériter du lien entre le prévisible et l'inconcevable part des choses, éprouver le silence démesuré qui va entre la vie et les mots, ressentir la pleine mesure de l'absence, du vide en nous dont la seule présence d'une mère, d'un père savait encore nous protéger.

Dans ses poèmes, Christian Viguié tente, avec une belle sensibilité, de retrouver les mots, les nuances pour décrire le sens de ce qui n'en a pas, ou si peu (la mort, la disparition d'un être cher) et tout ce qui demeure pourtant.
Emprunter au vol d'un oiseau, au mouvement des nuages, à l'ombre des arbres, à la couleur d'une pomme, à l'intervalle d'une fenêtre,… pour restituer au temps présent, (le seul qui nous échoit, celui qu'il nous reste à vivre), toute sa réalité, son rythme mais aussi sa précarité.

« Des moitiés de pommes
des moitiés de branches
des moitiés de phrases
restent invisibles
comme si le réel
avait besoin de détruire ses preuves

de maintenir un équilibre lent
entre une vie et une mort
entre la présence et l'absence

[…] »

La mort survient, la vie s'emplit de silence et de mémoire, les mots semblent se retirer des choses, être vidés de leur substance, de leur influence. C'est pourtant là que la parole peu à peu se retrouve, que la nécessité de dire, de mettre en mots se révèle. Une recherche de sens, d'un point d'équilibre qui fait naître le poème.
Dans Damages, Christian Viguié créé un rythme particulier, ou s'entrecroisent les mots et une sensibilité touchante, et au milieu desquelles vont des images pleines de justesse et de mesure.


(*) le damage est une technique utilisée pour aplanir la terre pour en effacer les aspérités, l'âpreté.
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Une belle plume, un recueil soigné, il me manque cependant cette violence, cette liberté, ce petit plus que je recherche en poésie (contemporaine) mais j'ai été touchée par cet hommage aux êtres aimés. Une belle découverte. Je me suis amusée à découper les pages, un éditeur comme on en trouve plus beaucoup et qui travaille encore de manière artisanale.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Il y a bien sûr des choses
que je ne confonds pas
le ciel avec le ciel
une mort avec une mort
la douleur qui traverse la douleur
avec ses flèches d'oiseaux
Cependant depuis ta mort
il existe un grand silence
comme un dieu qui aurait tout éteint
un silence dans les mots
dans les pierres et les fleuves
dans les bruits mêmes
dans le jour qui se coupe en deux
imitant le son sec d'une branche
Il y a un grand silence
dans les choses
qui ne savent plus apparaître
et restent ce qu'elles sont :
un chemin un soleil
parfois un mouvement
comme celui d'une prune
lorsqu'elle tombe à terre
ou le simple vol d'un papillon
quand il passe au cœur de l'ombre
et se dissocie soudainement de sa couleur
Tout cela offrant au monde
une impassibilité triste et parfaite.
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Lorsque j'écris
je ne sais pas
ce que cela deviendra :
oiseau ou caillou
arbre ou nuage
la plupart du temps rien
je prends simplement conscience
de la table
sur laquelle repose ma feuille blanche

J'essaie toujours ce dialogue
entre l'oiseau et le caillou
entre l'arbre et le nuage
avec la feuille blanche et la table
jusqu'à mêler leur profond silence
que je conjugue avec le mien

Ainsi commence le chant
qui serait les notes
ou les ratures
d'un plus profond silence.
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J'ai beau ouvrir les yeux
je ne parviens pas à voir
la réalité ou le mouvement des choses
sans doute parce que ta mort est un soleil
plus grand qu'un soleil
une métaphore qui se débarrasse
de toutes les métaphores du monde

Parce que ta mort est ta mort
elle me demande
d'entrer dans un soir plus complet
d'ouvrir une nuit dans la nuit
avec ses milliards d'étoiles
d'inventorier celles qui scintillent
et celles trop lointaines
sans que je puisse les dénombrer
pour m'apprendre de nouveau à chercher
et à me perdre
moi qui ne sais compter ni les fleurs
ni les cailloux sur le chemin
moi qui ne sais compter ni le fini
ni l'infini.
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Parfois je me retourne
à cause des bruits de pas
ou d'un merle qui coud
la route
Je me surprends à chercher ton ombre
au milieu de l'ombre d'un arbre
dans la voyelle d'un puits
dans le rectangle d'ombre d'une fenêtre
ou celui d'une porte
sachant que ton ombre
est toujours l'ombre d'une clé
qui casse.
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Pourquoi y aurait-il un mystère
dans la rumeur d'un arbre
dans les paupières de l'eau
ou un nuage?
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