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EAN : 9782220058931
Desclée de Brouwer (02/10/2007)
3.82/5   14 notes
Résumé :
Pourquoi notre histoire individuelle dépend-elle de l’histoire familiale et de l’histoire collective ? Et peut-on vivre normalement, en occultant le passé de ceux qui nous ont précédés, en particulier sans se retourner vers ce qu’il peut comporter d’obscur ? Ces deux questions majeures sont au centre de ce travail d’analyse.

À partir d’un groupe de recherche, et nourri des histoires très émouvantes de ses patients qui appartiennent à différentes clas... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Si _La Névrose de classe_, outre la thèse spécifique du possible surgissement d'une névrose lors d'un déplacement ascendant ou descendant entre classes sociales, posait les jalons théoriques de la sociologie clinique, entre psychanalyse et sociologie, cet essai se fonde sur une pratique de plus de trois décennies de l'animation des séminaires « Roman familial et trajectoire sociale ». Un tel recul permet à l'auteur d'affronter des thématiques bien plus générales concernant le poids de l'histoire familiale – et donc de déterminants exogènes et plutôt sociologiques – sur la destinée individuelle – qui relève pour certains plutôt de la psychologie. Plus précisément, on peut poser la question – et comprendre la thèse de cet essai – dans les termes suivants :
« Entre un individu et sa vie, qui produit l'autre ? […] Entre la position idéaliste et la position déterministe, on peut refuser de choisir en considérant l'individu comme le produit d'une histoire dont il cherche à devenir le sujet. » (p. 21)
Dans le verbe « chercher » réside tout l'enjeu du livre, car cette tentative est facilitée voire rendue possible par un « travail » sur le « roman familial » qui s'opère notamment au sein des séminaires en question. Certains exemples illustrent à la fois la dynamique de ce travail, et les fonctions respectives de la prise de parole du sujet, l'action du groupe et l'encadrement de l'animateur.
Il faut préciser d'abord le sens du « roman familial » :
« Le roman familial désigne [...] les histoires de famille que l'on transmet de génération en génération et qui évoquent les événements du passé, les destinées des différents personnages de la saga familiale. Mais entre l'histoire "objective" et le récit "subjectif", il y a un écart, ou plutôt un espace, qui permet de réfléchir sur la dynamique des processus de transmission, sur les ajustements entre l'identité prescrite, l'identité souhaitée et l'identité acquise, sur les scénarios familiaux qui indiquent aux enfants ce qui est souhaitable, ce qui est possible et ce qui est menaçant. C'est dire que le roman familial doit être contextualisé dans un repérage sociologique des positions sociales, économiques, culturelles, que ce soit dans la généalogie ou dans l'histoire personnelle du sujet. » (pp. 12-13)
Une seconde précision concerne les deux sens de la notion « d'inconscient », qui opèrent également et simultanément dans cet exposé : il y a l'Inconscient freudien que l'on connaît, mais aussi tout ce qui relève de l'intériorisation non-consciente de « l'habitus » bourdieusien.

En extrême synthèse, on peut résumer que la conscientisation de tout récit exogène dans l'identité familiale et sociale du sujet, à travers la narration qu'il est capable d'élaborer sur son passé, lui permet une émancipation grâce à laquelle il peut envisager d'autres identités nouvelles qui lui soient plus propres. le postulat méthodologique est que le rôle du groupe y compris avec les mécanismes transférentiels-contre-transférentiels est plus efficace qu'une psychanalyse ou une psychothérapie, à condition d'en rester au niveau (plus superficiel) des problématiques d'ordre socio-clinique. En effet, les séminaires durent quelques jours, et ils sont au nombre de quatre ou cinq, que certains participants ont suivi à quelques mois d'intervalle l'un de l'autre, souvent en en choisissant un nombre encore inférieur.



Table :

Première partie : Danièle ou l'héritage impossible

Chap. Ier : « Je vivais un personnage de clown »
Chap. II : « J'ai du mal à mettre une idée derrière l'autre »
Chap. III : « J'avoue que je suis la fille de rien »
Chap. IV : « J'aimerais mieux être la fille de rien »

Deuxième partie : le sujet face à son histoire

Chap. V : le sujet entre le coeur et la raison
Chap. VI : le sujet entre fantasmes et projections
Chap. VII : le sujet entre déterminisme et autonomie

Troisième partie : La question généalogique

Chap. VIII : L'impératif généalogique
Chap. IX : La famille et l'ordre généalogique
Chap. X : L'impasse généalogique

Quatrième partie : Les défauts de transmission

Chap. XI : Un secret peut en cacher un autre
Chap. XII : Fantômes et secrets de famille
Chap. XIII : Les loyautés invisibles
Chap. XIV : La mémoire familiale

Cinquième partie : « Origines familiales et rapports de classe »

Chap. XV : « On n'est pas assez bien pour toi ? »
Chap. XVI : L'envie et la haine de classe
Chap. XVII : « Décidément, je ne suis pas de ce monde-là ! »
Chap. XVIII : « Comment voulez-vous que je lui parle de ÇA ? »

Conclusion : La sociologie face au sujet
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Révision de ma bibliothèque, troisième.

Ah, les histoires de famille... Celles qu'on connaît, celles qu'on subodore, celles qui nous conditionnent à notre insu. Vincent de Gaulejac explore le roman familial à travers des histoires de vie racontées et analysées en séminaires. Les récits mettent au jour des mémoires familiales, des loyautés invisibles et des secrets soigneusement gardés. La dynamique de groupe permet de déterminer la part d'implication individuelle et l'influence de facteurs sociaux.
Au sein de cette communauté éphémère, le participant effectue un va-et-vient permanent entre deux scènes, côtés psychique et côté social. Il s'appuie sur son arbre généalogique pour comprendre le poids de l'histoire sur sa destinée.
L'auteur pratique la psychogénéalogie depuis des décennies. L'écoute de récits de vie brasse large, pointe les contraintes conscientes et inconscientes, extériorisées et intériorisées, transmises de génération en génération, nous assignant une place dans la famille et dans la société (appartenance à une classe sociale).
L'apport principal du travail en groupe réside dans la prise de conscience que plusieurs versions de l'histoire familiale sont possibles.
Facile à lire et pratique, avec un brin de théorie ajustée, cet essai figure parmi les ouvrages de référence du vaste champ des sciences humaines. Vincent de Gaulejac incite à "travailler" notre histoire, pour produire notre version originale, sortir de la répétition (honte, culpabilité) et s'ouvrir à d'autres possibles.

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Comme tous les livres de Vincent de Gaulejac, j'ai beaucoup aimé. J'adhère complétement à la sociologie clinique. J'ai participé à ses séminaires et cela vaut vraiment le coup ! ce fut pour moi une révélation
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Dans cet ouvrage, Vincent de Cauléjac montre l'importance et l'impact de l'éducation et de la culture familiale (l'héritage) sur les comportements sociaux.

Contruits à partir de compte-rendus de séminaires qu'il animait, cet ouvrage reprend les cas (assez significatifs, à la limite de la caricature) de certains participants.

J'ai été déçue par cet essai qui multiplie, à de trop nombreuses reprises, les références bibliographiques au détriment de la présentation de cas concrets.

Ainsi seulement trois cas ont été détaillés, dont un, le plus caricatural, assez longuement, ce qui empêche toute généralisation.

J'ai ainsi le sentiment que les ouvrages moins érudits et plus vulgarisateurs de Jean claude Kauffman permettent de mieux cerner les tendances comportementales, dans la mesure où elles s'appuient sur un plus grand nombre de témoignages :)

A vous de voir, donc ...
Lien : http://les.lectures.de.bill...
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
5. « Dans la vie courante, l'expression manifeste et consciente de ces effets de l'Histoire est plutôt rare. On parle de sympathie ou d'antipathie, on se sent attiré ou agressif, on ressent du mépris ou de la honte, de l'attrait ou de l'envie, sans toujours bien comprendre la source de ces sentiments "spontanés". Certains peuvent avoir confusément l'impression qu'il existe un lien entre ces sentiments éprouvés et la situation sociale de l'autre, mais le lien direct est rarement établi, sauf par ceux dont la conscience de classe est particulièrement vivace.
Le travail sur le rapport aux origines sociales met les participants en tension entre l'appartenance au groupe, qui conduit à renforcer des liens positifs, et le travail sur l'histoire familiale, qui met en évidence les différences sociales entre eux, réanimant les sentiments de haine, de honte ou d'envie liés à ces différences et violences humiliantes subies dans l'enfance.
Cette tension est la manifestation dans le groupe des rapports de domination qui traversent l'ensemble de la société. » (p. 259)
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1. « Dans l'exploration du projet parental ou de la généalogie, dans l'analyse du roman amoureux et des scénarios affectifs, ou encore dans l'analyse des processus d'idéalisation, le sujet est conduit à s'interroger sur ce qui a été agissant en lui. Les enjeux œdipiens et narcissiques se révèlent, non dans une activité fantasmatique favorisée par la technique de l'association libre, mais dans une situation de recentrage sur soi en référence à la réalité extérieure.
Le récit n'est donc pas entendu pour lui-même, il est contextualisé. Les conflits évoqués conduisent le sujet à s'intéresser simultanément à son histoire, à la façon dont le désir et l'angoisse sont à l’œuvre en lui et à ce qu'il ressent dans l'ici et maintenant. Le dispositif le conduit à explorer en quoi les choix et les ruptures de son existence ont pu être déterminés par quelque chose qui lui échappe et comment il a mis en place des comportements réactifs et défensifs face à des enjeux inconscients. L'exploration de ces enjeux reste limitée si on la compare au travail effectué sur le divan du psychanalyste ou sur le fauteuil du psychothérapeute. Il s'agit simplement d'ouvrir la perception des manifestations inconscientes en montrant que les conflits qui traversent l'histoire personnelle et familiale sont articulés sur des enjeux psychiques plus ou moins refoulés. » (p. 87)
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2. « [Selon Lacan] Le signifiant devient alors le déterminant moteur des destinées individuelles et le fondement de la constitution du sujet. Loin de maîtriser le langage et la parole, le sujet en est le dépositaire. C'est le signifiant qui est la clé des songes, des lapsus et des actes manqués, donc la clé de l'inconscient. […]
Il y a une correspondance entre ce que dit Lacan quant au rapport du sujet au langage et ce que l'on peut constater du rapport du sujet à son histoire. Le sujet est dépositaire d'une histoire familiale. Dans les récits, on entend fréquemment le discours d'un autre, c'est-à-dire la reprise par le sujet de ce qui lui a été transmis de l'histoire familiale par tel ou tel ascendant. Ces récits, il les reprend à son compte, persuadé qu'ils sont vrais, comme s'ils évoquaient des situations vécues par lui-même. Mais en même temps, ces récits sont autant de clés pour comprendre l'histoire. À condition de les décrypter pour ce qu'ils sont : non pas la réalité mais un reflet de celle-ci qui rend compte des aspirations, des réussites, des échecs, des projections, des craintes, des angoisses, des désirs des générations précédentes, des difficultés qu'elles ont rencontrées, des différentes manières de faire face à la mort, à la maladie, à la folie, à l'amour et à la vie. » (pp. 90-91)
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La loyauté familiale se fonderait donc sur la consanguinité mais également sur une transmission des dettes et des injustices qui se sont accumulées dans les générations précédentes parce qu'elles n'ont pas été "réglées".
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4. « Travailler son histoire, c'est d'abord la reconnaître pour ce qu'elle est, comprendre comment les différents membres de la saga familiale ont vécu, comment ils ont réagi aux situations auxquelles ils ont été confrontés. Il convient de déconstruire le roman familial là où il entretient l'illusion, pour le récrire à sa façon, s'adapter aux exigences du présent, se "décoller" du passé, échapper aux "malédictions" dont il est porteur et accroître la capacité de se projeter dans un avenir différent de ce qui est advenu. Sortir de la répétition, c'est s'ouvrir sur d'autres possibles.
L'historicité rend compte de la capacité d'un sujet de s'appuyer sur son héritage, d'en assumer le poids, l'actif comme le passif, pour créer à son tour une histoire, la sienne, dans un double mouvement de singularisation et de transmission. » (p. 191)
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