Je voudrais que cet instant ne finisse jamais…
Tout est si parfait.
J'ai l'impression que le temps n'existe plus. Je me sens tellement bien. Vous avez déjà vécu un moment comme celuilà? On voudrait qu'il recommence encore et encore. On aimerait pouvoir le garder avec soi pour toujours.
Je goûte à toute cette beauté qui m'entoure.
Le bleu du ciel s’étend à l'infini. De jolis petits nuages blancs qui flottent ici et là se font dorer par les rayons du soleil. On dirait un troupeau de moutons. Et celui qui est plus gros que tous les autres, avec sur la tête ce qui ressemble à un chapeau de paille, c'est le berger qui veille sur eux. Il les aide à ne pas se disperser. Il les aide à ne pas se perdre dans toute cette immensité…
Cette puce était la dernière chose qu'il voulait en lui ! Ce qu'elle représentait allait totalement à l'encontre de ses valeurs. Il pensait que seuls l'ambition et l'opportunisme avaient permis à l’être humain d'améliorer sa condition. Ce n’était que grâce à ces qualités fondamentales qu'il s’était hissé au sommet de la chaîne alimentaire et qu'il ne craignait désormais plus aucun prédateur. C’était également celles-ci qui lui avaient permis de braver l'espace et le temps. Depuis la révolution industrielle, il pouvait se déplacer — par voie terrestre, maritime et même aérienne — où bon lui semblait, et grâce à la recherche, il avait même réussi à tripler son espérance de vie… N’était-ce pas là la preuve qu'il avait raison ? La nature elle-même était de son avis ! Charles Darwin, père de la théorie évolutionniste, l'avait découvert à la suite de ses voyages aux îles Galápagos : les espèces vivantes ne réussissaient à subsister qu'en imposant leur domination ou qu'en s'adaptant à leur milieu. En d'autres termes, c’était toujours les plus forts qui l'emportaient. Et dans le monde créé par les humains, les plus forts étaient les ambitieux et les opportunistes, point final. C’était ainsi.
Hier soir, les gens agissaient comme de vraies bêtes. Ils étaient partout, ils saccageaient tout… Je n'ai pas osé sortir. Je suis resté cloîtré dans la maison avec les autres à regarder la foule au travers les lattes de la fenêtre qui donne sur la rue. Avec le peu que l'on possède, on ne voulait pas attirer l'attention sur nous…
Aux États-Unis, en dehors des grandes villes où les résistants avaient été refoulés, c’était le chaos. En fait, dans cette partie du monde, on ne se battait pas seulement pour un idéal politique : il y avait aussi le problème de l'eau douce. Selon plusieurs scientifiques, celle-ci était de plus en plus rare. Mais Adam avait de sérieux doutes à ce sujet. N'importe quel esprit aiguisé y aurait vu un stratagème savamment élaboré par les révolutionnaires afin de rallier le plus grand nombre à leur cause. Une ruse vieille comme le monde. Cependant, le doute ayant été installé, les quelques nations qui n'avaient pas encore rendu les armes avaient déployé le gros de leurs forces navale et aérienne près des côtes nord-américaines afin de s'emparer des terres bordant les Grands Lacs.
Le rêve plus vrai que la réalité aurait été accessible à tous. N’était-ce pas là une noble mission que de faire en sorte que les gens puissent vivre un peu de bonheur dans un monde aussi troublé? D'une simple commande de la main, il aurait été possible de basculer dans un univers sur mesure, adapté aux désirs et fantasmes propres à chaque utilisateur. Les déceptions, les limites et même les peurs, envolées. Disparues. N’était-ce pas là le monde idéal ? Pourtant, Edgar Malik avait brisé tout cela…