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Critique de Kirzy


Alaska. Un enfant disparaît dans le blizzard, il a lâché la main de celle qui l'accompagnait. Des hommes partent à leur recherche. Au total cinq solitaires, mystérieux, aux intentions nébuleuses, mais dont on devine qu'ils ne sont pas là par hasard au bout du monde.

Marie Vingtras réveille tout un imaginaire nord-américain. On sent que l'auteure a lu Ron Rash, David Vann, Russell Banks and co lorsqu'elle convoque des figures masculines récurrentes dans la littérature américaine, de l'homme des bois bourru au vétéran noir du Vietnam. Elle retravaille ce terreau en une succession de chapitres courts d'une remarquable efficacité narrative tant le suspense file dans cette course contre la montre pour retrouver l'enfant. Chaque phrase est à sa juste place et distille très subtilement des éléments qui permettent de comprendre les enjeux et de lever les secrets des personnages. Comme si chaque chapitre était un des fragments de la mosaïque qui se complète sous nos yeux.

Pas d'échappatoire dans le blizzard. La tempête de neige ramène à un temps primitif, loin de la contemporanéité et de la civilisation. Bess, Benedict, Cole et Freeman se confessent à tour de rôle. C'est leur vérité nue qui s'exprime, parfois brutalement, sans filtre, parfois de façon désordonnée tant les traumatismes sont présents et la revisite de leur vie difficile.

Avec une langue claire et précise, Marie Vingtras parvient à faire sentir l'urgence en chacun des personnages. Au-delà de l'urgence à retrouver l'enfant, il y a l'urgence de vivre, tout simplement. Tous sont en suspens. Quelque chose doit se passer pour qu'ils arrêtent de regretter le temps passé, celle de l'équilibre de l'enfance perdue quand tout était facile, le temps d'avant la faute. Avec en sous-jacents les liens de la famille et notamment la difficile paternité, Blizzard est un roman très fort sur la culpabilité qui ronge et fait quitter le monde des vivants. A côté des quatre personnages qui s'expriment à tour de rôle, les absents, les morts sont tellement présents.

Les 190 pages de ce huis-clos à ciel ouvert sont rapidement addictives. Mon seul regret est que le potentiel alaskien n'ait pas été plus utilisé, au-delà du simple rappel de la tempête de neige qui isole les personnages. Sans doute, amoureuse de nature writing type Gallmeister, étais-je trop en attente d'une vastitude enveloppante, de paysages écrasants, non comme simple décor mais pour cadrer les émotions, les accentuer jusqu'à perdre haleine.

Lu dans le cadre du collectif des 68 Premières fois 2022 #2
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