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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
On se dit que cette histoire a été maintes fois racontée : celle d'un innocent corrompu par l'expérience de la vie, d'un jeune homme au coeur de verre enfermé dans une guerre civile intérieure. Et pourtant, on se laisse embarquer dans celle racontée par Willy Vlautin . Devenir quelqu'un a la limpidité évidente des chansons de Neil Young ou de certains films de Clint Eastwood ( Millions dollars baby notamment ).

A première vue, l'écriture semble trop simple avec ses phrases nettes qui créent des images claires, parfois surdétaillées sur un quotidien ordinaire voire trivial. Très terre à terre, qui plus est porté par un récit traditionnel qui ne cherche pas à séduire par une extraversion avant-gardiste. Et puis le charme opère. En toute simplicité donc, avec une empathie incroyable pour les personnages, tous des sans éclat, des invisibles, des qui travaillent dur, des qui vivent dur. Impossible de ne pas s'attacher à Horace, jeune métis ( mi indien paiute, mi irlandais ) qui cherche désespérément à échapper à un sentiment étouffant d'échec, rongé par l'abandon de ses parents, plein de honte et de dégoût pour ce qu'il est. Il veut devenir boxeur et faire carrière au Mexique. Mais son rêve américain est exténuant car il doit renoncer au confort et à la sécurité de son emploi de rancher, à la liberté du plein air et à l'amour de ses quasi parents adoptifs.

Tout est tragédie des petites choses dans ce roman, tout est mélodramatique en sourdine, Willy Vlautin avance en douceur pour décrire avec subtilité les tourments d'Horace, ses combats de boxe n'étant que le reflet de sa vie : pas forcément doué mais il sait encaisser. Rapidement, le regard se porte au-delà d'Horace, vers M.Reesse, le vieux rancher père adoptif. C'est lui le personnage clef. Celui qui crée le passage à l'acte d'Horace : s'il n'est pas champion, il ne pourra accepter l'amour des Reese, ne sachant accepter l'amour qui est déjà là ne se sentant pas digne d'être aimé ainsi. M.Reese est aussi le catalyseur, celui qui montre comment les êtres humains en viennent à s'appuyer les uns sur les autres, incarnant l'espoir, l'entraide, la compassion, lorsqu'Horace sombre dans la solitude désespérante. M.Reese est un superbe personnage à l'humanisme magnifique.

On n'est pas très loin d'un conte philosophique très incarné et bourré de sensibilité, empreint d'un idéalisme optimiste, sur une ligne de crête qui pourrait faire aussi basculer le roman vers quelque chose de mièvre, de gentillet. Ce n'était peut-être pas loin, mais ce n'est pas le cas car Willy Vlautin a construit intelligemment son roman, l'air de rien, avec une fluidité invisible. Jusqu'aux dernières pages, superbes. Jusqu'à la dernière phrase, terrible. Je ne l'avais pas vu arriver, cette dernière phrase. Elle offre un tout autre éclairage au roman. Elle m'a bouleversée aux larmes et résonne aussi bien avec le titre originel ( Don't skip me out / Ne me laisse pas tomber ) qu'avec le titre français, en miroir.
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« Devenir quelqu'un », roman linéaire au style sec et sans fioritures, nous narre les pérégrinations de son héros Horace Hoover qui tente de devenir boxeur professionnel. L'emploi d'un schéma narratif classique est rafraîchissant. Willy Vlautin n'est pas un adepte des allers-retours temporels, des digressions pseudo-philosophiques, ni de la multiplication des points de vue. Il nous raconte une histoire « à l'ancienne », celle d'un jeune homme de vingt-et-un ans, moitié indien païute, moitié irlandais qui quitte le ranch où l'a accueilli quelques années plus tôt le couple Reese pour confronter son rêve à la réalité.

Fasciné par les boxeurs mexicains et fan de heavy-metal, Horace a été abandonné très jeune par sa famille et mène une existence austère de rancher au coeur du Nevada, auprès du couple vieillissant qui l'a accueilli jeune adolescent. le jeune homme au physique léger et fin trahissant ses origines païutes est devenu au fil des années l'enfant adoptif d'Eldon et Louise. Si ces derniers lui ont offert un foyer ainsi que la possibilité de finir ses études, il s'est rendu avec le temps indispensable au fonctionnement du ranch.

Mal à l'aise avec ses origines indiennes, Horace tente sans succès d'apprendre l'espagnol, s'invente un double mexicain « Hector Hidalgo », court ses six kilomètres quotidiens, fait des centaines de pompes et d'abdos, et réalise que pour « devenir quelqu'un », il lui faut quitter le Nevada et prendre la route du sud qui mène à une obscure salle de boxe de Tucson.

Willy Vlautin revisite avec une simplicité presque déconcertante le roman d'initiation, et nous emmène sur les traces du jeune homme qui quitte l'harmonie de la vie rustique de rancher pour plonger dans les méandres d'un monde de managers véreux, d'entraîneurs alcooliques, de salles hostiles et d'adversaires plus expérimentés qui frappent à la vitesse de l'éclair. Les scènes de combat sont stupéfiantes : en dépit d'une technique que l'on devine un peu frustre, Horace se révèle un redoutable encaisseur doté d'un punch dévastateur, et va toucher du doigt son rêve de boxer en professionnel.

Malgré un sentiment de déjà-vu, le livre se dévore tant le lecteur s'attache progressivement à son héros en quête d'identité qui fait face avec un courage étonnant à l'adversité, et incarne à la perfection une forme d'innocence prise au piège d'un monde pourri jusqu'à la moelle. L'autre personnage clé du roman est un vieil homme attachant qui souffre de terribles spasmes dorsaux : Eldon Reese aime Horace comme un fils, réalise qu'il n'est plus en état de tenir le ranch sans son aide, et comprend surtout que ce dernier risque de se perdre dans sa quête de gloire pugilistique.

« Devenir quelqu'un » est un roman comme on n'en fait plus, le récit d'un jeune homme au coeur pur dont le véritable combat est celui qu'il mène contre ses démons intérieurs. Horace ne comprend pas pourquoi ses parents l'ont abandonné si jeune, a honte de ses origines indiennes, ne se juge pas digne de l'amour que lui portent les Reese, et cherche à travers la boxe une manière de sortir la tête haute du tourbillon de haine de soi qui menace de l'emporter.

La fin de ce très beau roman éclaire le récit d'une lumière glacée et lui donne rétrospectivement une forme de supplément d'âme. Tout en pudeur et en retenue, Willy Vlautin utilise l'immersion de son héros dans les eaux troubles du monde de la boxe pour nous conter avec maestria la plongée d'une âme intègre au coeur des ténèbres.
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Touchant, ce roman est le portrait d'un jeune Amérindien aux yeux pleins d'étoiles malgré son manque de confiance et le mépris qu'il a pour lui-même. Il rêve de devenir boxeur, mais au-delà, son fantasme est aussi celui de l'American Dream, l'envie d'enfin s'élever au-dessus de ses origines le faisant oublier l'essentiel et ceux qui l'aiment. le style de Willy Vlautin est sec et repose sur des dialogues nombreux et enlevés, ce qui n'empêche pas l'ensemble de rester assez visuel (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/06/07/devenir-quelquun-willy-vlautin/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Tout le monde, un jour, à voulu être quelqu'un… Quelqu'un qui compte, quelqu'un dont on se souvienne, quelqu'un d'autre…

Tout le monde a voulu, un jour, prouver qu'il/elle était quelqu'un, capable de se débrouiller seul, de faire ses preuves et d'aller au bout de ses rêves.

♫ J'irai au bout de mes rêves ♫ Où la raison s'achève ♪ comme le chantait JJG.

Le rêve d'Horace Hopper est de devenir champion de boxe. Il est persuadé que s'il le veut, qu'à force d'entrainement, il y arrivera et il n'écoute pas la voix de la raison d'Eldon Reese, son employeur et père de substitution. le voici parti pour la grande ville, lui qui a vécu dans les montagnes du Nevada.

Ce roman met en scène le parcours initiatique d'un jeune homme dont toute sa vie ne fut qu'une vie de merde : abandonné à sa grand-mère par sa mère, son père était déjà foutu le camp bien avant, cible des autres à l'école, métissé Indien, il se rêve Mexicain et refuse ses origines. Vu sa fiche, on aurait pou croire que quelqu'un lui en voulait, pour lui avoir déjà fait subir toutes ces emmerdes.

L'histoire a un goût de déjà-lu ou de déjà-vu : un gamin maltraité par la vie et les Hommes, venant de la rase campagne, qui part à la ville pour réaliser son rêve de devenir champion de boxe alors qu'il part d'une feuille à peine écrite dans ce sport.

Il est innocent, le gamin, on le sent bien et les autres aussi le perçoive. Lâché dans la jungle, il essaiera de s'en sortir du mieux qu'il peut… le rêve Américain, ce vieux mythe, lui semble à sa portée et notre jeune homme fera comme bien d'autres avant lui : lâcher la proie pour l'ombre.

Horace est hanté par ses échecs passés, pensant qu'il n'a rien fait de bien dans sa vie, même si Eldon Reese, le vieux rancher qui l'a recueilli avec son épouse, lui dit le contraire.

Le récit ne s'encombre pas du superflu, Horace boxe dans les poids plumes et le récit est expurgé de ce qui pourrait lui donner du gras. On se doutera qu'il y a des combats de boxe truqués, des magouilles, des choses louches, des sommes d'argent gardées par ceux qui n'y avaient pas droit et qu'on a manipulé Horace, mais sans que jamais les choses soient dites noir sur blanc.

On croisera de la misère humaine, aussi, mais sans jamais approfondir le sujet, ces rencontres n'étant que de celles que l'on fait parfois sur la route de notre vie. À peine rencontrée, aussitôt oubliée.

Mêlant adroitement les passages où Horace tente de devenir boxeur et se prend des coups dans la tronche avec ceux de la vie du couple Reese sur son ranch, on se rend compte que la vie est ironique : Horace va chercher loin une carrière alors qu'il aurait pu être un rancher et les Reese, sans Horace, ne savent plus s'en sortir avec leurs moutons. Il était utile à quelqu'un et ce crétin est parti.

Plusieurs fois j'ai eu envie de colles des baffes à Horace, que j'ai trouvé mou du genou à certains moments, quand il doutait et parfois, je l'ai trouvé trop timoré lorsqu'il voulait prouver à tout le monde et avant tout à lui, qu'il allait devenir quelqu'un. Or, il était déjà devenu quelqu'un…

Il m'aura manqué de l'empathie pour Horace, mais il me pardonnera sans doute, lui qui sait encaisser les coups mieux que personne, au sens propre comme au sens figuré et qui, quand il les rend, le fait avec une force énorme. Toute sa vie fut ainsi.

En fait, le personnage le plus important, le plus empathique, ce sera Eldon Reese, le vieux rancher qui a pris Horace sous son aile, qui sera ce qui se rapprochera le plus du père pour Horace et qui n'a pas réussi à le retenir parce que le gamin se sent indigne de son amour. Horace, t'es con, tu sais !

Un roman sombre que la quête d'identité, sur la non acceptance de ce que l'on est, le refus de ses origines ancestrales et la volonté de prouver que l'on peut devenir quelqu'un, quelque soit le prix à payer.

C'est le combat de Horace contre ses démons intérieurs, contre ses origines, contre le monde entier, ce sont les coups qu'il a encaissés durant toute sa courte vie (il n'a que 21 ans) et la possibilité qu'il a de les rendre, même si ce n'est pas aux bonnes personnes puisqu'il est sur un ring et que ce n'est pas la vraie vie, ce qu'il se passe dessus.

C'est l'histoire éternelle d'une personne qui ne se sentait pas digne de recevoir l'amour des gens qui l'avaient recueilli, d'un jeune homme qui n'avait pas compris tout ce qu'il avait déjà accompli, qu'il pouvait être fier de son parcours, qu'il était devenu quelqu'un, même s'il ne le savait pas, même s'il ne voulait pas l'entendre.

La dernière phrase est terrible et elle m'a cassée en deux…

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Âgé de vingt et un ans, Horace a du sang irlandais et du sang indien, mais il veut se faire passer pour un Mexicain, afin de devenir un autre. Les personnes qui ne le connaissent pas pensent qu'il est mexicain. Lui est persuadé que les Mexicains sont les boxeurs les plus coriaces. Il rêve d'être champion de ce sport de combat pour prouver qu'il est quelqu'un. Pour cela, il quitte le ranch des Reese ; il est pourtant heureux auprès de ce couple âgé. Eldon et Louise s'inquiètent, mais le laissent réaliser ses rêves. Ils espèrent que ce parcours initiatique ne lui fera pas trop de mal. Horace a été abandonné par son père, puis par sa mère, qui l'a confié à une grand-mère qui, elle, le rejetait en raison de ses origines païutes. Il a ensuite été recueilli par les Reese, qui ont été les premiers à lui donner de l'affection et qui l'aiment comme un fils. Comme des parents, ces derniers ne veulent pas lui briser les ailes, même si sa présence leur est indispensable : autant d'un point de vue affectif que pratique, pour faire tourner le ranch. Ils ne lui disent pas pour le laisser vivre ses rêves. Ils seront là pour lui quand il reviendra.


Arrivé à Tucson, il change son nom : désormais, il est Hector Hidalgo. Il trouve un emploi et un entraîneur. Ce dernier est peu motivé, mais il lui permet de s'inscrire à des combats. Idéaliste, cependant lucide, Horace perçoit qu'il se fait arnaquer par son coach. Il voit les billets échangés, il sait qu'ils devraient lui revenir, mais il n'est pas prêt à s'affirmer. Il doit d'abord prouver qu'il peut résister à la pression. Il sait encaisser les coups, il faut aussi qu'il les rende. le ring semble être une allégorie de la vie d'Horace.


Eldon Reese sait ce que c'est d'abandonner ses rêves. Il espère, cependant, qu'Horace comprendra que sa place est auprès de lui et de son épouse. Il ne l'entrave pas, il souhaite que son protégé se trouve lui-même, sans vivre trop de souffrances. Son abnégation et sa vigilance à distance sont touchantes. Horace est doué avec les animaux. Comprendra-t-il qu'il est quelqu'un ? Trouvera-t-il qui il est ? Moitié blanc, moitié indien païute, il est riche de ses origines qu'il réfute.


Cette quête d'identité est troublante, j'avais envie de dire à Horace qu'il n'avait rien à prouver et que des personnes adorables l'aimaient. Cependant, il me manquait l'élément qui me marquerait, qui ferait que ce roman ne serait pas qu'une lecture agréable, le moment où l'émotion me cueillerait et me ferait penser que lire ce livre était important pour moi. Ce que j'attendais s'est produit à la fin, avec cette conclusion qui est surprenante et emplie d'émotion et qui a fait basculer mon ressenti. Alors, que pendant ma lecture, j'avais eu la sensation, d'être maintenue à distance, les pages précédentes ont défilé dans mon esprit et se sont teintées de messages et de sentiments, qui n'étaient pas parvenus jusqu'à moi, au départ.


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Le lecteur va ici faire la connaissance du jeune Horace Hopper, un jeune homme en quête d'un destin et d'une identité, un jeune homme perdu entre ses origines indiennes et blanches, entre sa famille "adoptive" et son rêve de grandeur.

Ce titre met en exergue le thème universel de la réussite et surtout la recherche d'une destinée : devenir quelqu'un. À notre époque, tout le monde se questionne sur ce qu'est cette réussite, cet accomplissement personnel : est-ce la célébrité, le succès, la richesse ? Ou est-ce tout simplement la capacité de se satisfaire de sa vie ?

Le jeune Horace va ainsi remettre en question ses certitudes, au travers des coups qu'il prendra, des échecs qu'il subira, des victoires et de l'espoir suscité par celles-ci. Les combats se suivent et aucun ne se ressemblera. Horace fera de multiples rencontres : certaines lui permettront de mûrir, d'autres l'amèneront à plier le genou.

Ce que j'ai particulièrement aimé dans ce livre est le fait de suivre à la fois Horace et en même temps sa famille "de coeur" et plus particulièrement Eldon Reese. Je trouve que ce genre de roman permet de souligner ce qui est réellement important dans l'existence, de remettre en perspective notre propre perception de la vie. Après ce n'est pas mon livre préféré de l'auteur car je pense qu'il aurait pu être un peu plus émouvant et un peu moins répétitif sur certains points narratifs.

En définitive, Willy Vlautin nous propose ici une histoire touchante et inspirante.
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Willy Vlautin revient avec une histoire émouvante sur la recherche d'identité d'un jeune homme, mi-irlandais mi-Paiute.
A 21 ans, Horace Hopper est fermier dans le Nevada dans le ranch de Mr et Mme Reese, un couple d'éleveurs vieillissants. Ils sont en quelque sorte sa famille depuis que ses parents l'ont abandonné. Il a passé la majorité de sa vie ici, au milieu des moutons sous le regard bienveillant et affectueux des Reese. Pourtant Horace ne peut échapper au sentiment qu'il n'appartient pas vraiment à cette famille, qu'il ne mérite pas ce qu'on lui donne, qu'il doit prouver sa valeur. Au grand désespoir du couple, laissant derrière lui la ferme et sa fragile stabilité, le jeune homme part vers le Sud pour se réinventer en tant que boxeur mexicain sous le nom d'Hector Hidalgo.

Vlautin explore la relation entre père et fils de substitution tout en dessinant le portrait touchant d'un garçon blessé qui court dans le vide, pris dans le monde miteux de la boxe et incapable de lâcher son rêve irréaliste.  Avec ses mains, ses poings et son grand coeur, Horace tente de se construire, de se montrer à la hauteur. Mais à quel prix ?  et qu'en est-il de ceux qu'il a laissés derrière?

Un roman très cinématographique et qui montre deux Amériques. Calme et presque immobile quand on est au ranch, citadine et agitée quand il s'agit de boxe. Lors des scènes où Mr Reese rencontre divers membres de sa petite communauté, on n'est pas loin de la beauté tranquille représentée par Kent Haruf dans sa ville fictive de Holt, ce qui bien évidemment n'a pu que me charmer.

Le style de l'auteur est tout en simplicité. Une simplicité typique de la littérature américaine que j'aime. Pourtant dans cette prose franche et sans chichi j'ai à un moment craint l'overdose de bons sentiments. Les personnages principaux sont tous incroyablement bons et moraux alors que la vie est si horrible avec eux. J'ai parfois eu envie de secouer Horace pour qu'il cesse de prendre les mauvaises décisions, que la spirale cesse. Je ne voyais d'ailleurs pas comment l'auteur allait s'en sortir. C'était sans compter sur le talent de Vlautin qui délivre un final tellement inattendu que j'en ai été sonnée. Cette conclusion décevra de nombreux lecteurs mais pour moi elle est un parfait contrepoids au reste du roman.

Avec le récit des désirs de célébrité pugiliste d'Horace, qui ne sont que les illusions d'une âme perdue, j'ai vécu un moment à la fois tendre et dur, une très belle lecture traversée par une insondable tristesse.

Traduit par Hélène Fournier
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Mi blanc, mi indien païute, Horace Hopper ne supporte pas ses origines. Abandonné par son père, puis délaissé par sa mère qui a confié sa garde à la grand-mère, l'enfant a été pris en charge par les Reese, un couple de rancher . A vingt-et-un ans, il vit dans un camping-car et travaille pour Eldon Reese qui, à soixante-douze ans, a bien besoin de son aide. Alors que leurs deux filles ont quitté la région, Eldon et sa femme considèrent Horace comme leur propre fils. Ils espèrent bien qu'il reprendra le ranch. Tant d'exploitations périclitent suite au vieillissement des propriétaires et au départ des jeunes

Mais Horace veut devenir quelqu'un. Lorsqu'il monte dans les montagnes pour ravitailler Pedro, gardien du troupeau de moutons, il écoute du rock ou des cours d'espagnol. Car il veut devenir mexicain pour faire carrière comme boxeur professionnel.

Mr Reese, aucun boxeur digne de ce nom n'est un Indien Païute. Les Païutes sont des bons à rien.

Horace part à Tucson où il trouve un petit boulot et un entraîneur, Alberto Ruiz. Il devient Hector Hidalgo et prépare ses premiers combats en amateur. Horace frappe fort, gagne quelques matchs, prend des coups. Ruiz, alcoolique et radin, l'exploite. Mais Diego, un entraîneur plus sérieux, rechigne à s'occuper de lui.

Je vais être honnête avec toi : tu n'es pas un bon boxeur, tu es un bagarreur, et tu en paieras le prix.

Horace est toujours prêt à prendre des risques pour atteindre son but. Il ne vit ou plutôt ne survit que pour cela, s'enfermant de plus en plus dans la solitude. Souvent, il ne répond même pas à Eldon, toujours inquiet de savoir comment il va. le vieil homme, et surtout sa femme, rêvent de le voir revenir, enfin apaisé de la honte de ses origines qui l'empêche d'être lui-même.

Willy Vlautin conte une histoire prenante et sensible. Les blessures de l'enfance , les origines non acceptées surtout à cause des moqueries, des préjugés des bien-pensants laissent des traces. Malgré toute l'humanité, l'écoute des Reese, Horace n'est pas prêt à se satisfaire d'un cocon bien tranquille. Il ne veut pas être vu comme un indien incapable mais être reconnu comme un champion, un homme courageux. Même si pour cela il doit souffrir des coups et de la solitude.

Même si l'auteur évoque les conditions de vie des ranchers, l'impossible survie des exploitations avec le vieillissement des propriétaires et le désintérêt des nouvelles générations, le récit est centré sur le parcours d'Horace. C'est donc avant tout une histoire humaine, attachante narrée avec rythme et émotion.
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Livre lu grâce au Picabo river book Club et à Terres d'Amérique des éditions Albin Michel qui m'ont envoyé ce roman.
Je connaissais cet auteur car j'avais, après vu un film, lu "cheyenne en automne" ou "la route sauvage", selon les éditions. Ce texte était déjà le portrait d'un jeune adolescent, qui venant de s'installer à Portland et découvrait le monde du cheval et des champs de course.
Dans "devenir quelqu'un", " don't skip out on me" littéralement "ne me laisse pas tomber", c'est de nouveau le portrait d'un jeune homme qui va chercher son chemin et essayer de devenir quelqu'un.
C'est un garçon abandonné très jeune par sa mére, chez une grand mère revêche mais qui a été recueilli dans un ranch par un couple de fermiers, qui le considère comme leur fils adoptif. Il y travaille, va dans les plaines pour ravitailler le berger qui s'occupe des troupeaux. Il part alors à cheval et retrouve un berger, mexicain, qui vit plus ou moins bien cette solitude. Horace, mi indien paiute, mi irlandais, n'a qu'un rêve : devenir un boxeur professionnel. Il décide alors de prendre la route, de se trouver un entraîneur et faire des matches pour enfin devenir professionnel. Mais le monde de la boxe n'est pas simple, Ce monde où bien sûr il faut se battre pour gagner sa place, mais aussi où il faut faire quelques concessions pour s'élever dans la hiérarchie des boxeurs. Horace va tenter de se faire une place. Tout en restant en contact avec le couple Reese, qui ont la bienveillance d'attendre qu'il rentre et reprenne le travail de la ferme. Monsieur et Madame Reesse, est un vieux couple qui veulent tenter de garder le ranch et essaient de le maintenir à flot. Un portrait très touchant d'un Mr Resse, qui n'a pas vraiment réalisé ses rêves de jeunesse, mais préfère encore finir sa vie dans sa ferme que de vendre ses terres, aller vivre avec ses filles et jouer au golf avec d'anciens ranchers.
Des portrait touchants d'américains qui tentent de trouver leur place dans une société qui se transforme, plus beaucoup de ranchers, propriétaires de leurs terres et qui vont faire paître leur troupeau dans des canyons, loin du monde. D'autres qui croient dans l'ascension sociale grâce à la boxe. Horace va faire des rencontres d'hommes qui eux aussi ont tenté de devenir quelqu'un, que ce soit un entraîneur, qui lui propose de participer à des matches, que ce soit de l'autre côté de la frontière, au Mexique ou à Las Vegas. Horace est volontaire, il fait son chemin, seul, il trouve un petit boulot, un logement, chez une éloignée tante et s'entraîne sérieusement mais il n'a pas ce qui peut en faire un champion. Va t il réussir dans ce monde, pas sûr, il va en prendre des coups, réels mais aussi au moral.
Mais le titre anglais le disait bien, "ne me laisse pas tomber" que ce soit le discours d'Horace pour les entraîneurs de boxe ou que ce soit pour le couple Reesse qui souhaite qu'il revienne sur le ranche et reprenne la vie de fermier.
Un texte touchant avec de sacrés portraits d'êtres qui essaient en effet de devenir quelqu'un ou du moins essayer de réaliser leurs rêves. Des descriptions de canyons, de petites villes qui vivotent, de Las Vegas et ses lumières mais aussi ses coins sombres.
Un roman qui sonne comme une bonne chanson de country, avec l'image persistante de cow boys, mais qui ont de moins en moins le contact avec la nature mais nous sommes aussi en Amérique et du rêve américain, que l'on peut réussir en partant de rien avec sa volonté. Mais Horace va t il arriver à son rêve de devenir boxeur professionnel et pouvoir prouver qu'il est quelqu'un ?
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Vouloir devenir quelqu'un, cela suppose que l'on n'est personne. C'est un constat aussi dur qu'erroné. le plus dur et erroné que l'on peut porter sur soi. Mais qu'est-ce qui fait que l'on devient quelqu'un ? La notoriété ? L'argent ? L'accomplissement de ses rêves ? Et pour devenir quelqu'un, faut-il obligatoirement devenir quelqu'un d'autre ?
Le jeune Horace sait précisément quand il deviendra quelqu'un. Quand il ne s'appellera plus Horace Hopper mais Hector Hidalgo. Quand il ne sera plus indien mais mexicain. Quand il ne travaillera plus dans le ranch des Reese mais affrontera les plus grands noms de la boxe professionnelle sur le ring. le quotidien d'Horace se résume à des projections de sa vie future : quand il sera pro, quand son nouveau nom s'étalera en gros caractères sur les affiches, quand il vivra de sa passion. En attendant il survit, aveugle à ce qui l'entoure, sourd aux marques d'affection que lui témoignent les Reese qui le considèrent comme leur fils. Horace Hopper est mal dans sa peau, mal à l'aise en société, lui qui a l'impression de ne pas être à sa place, de déranger, de ne pas être désiré parce qu'il a été abandonné par ses parents. Horace cherche à combler un vide par la boxe et utilise ce rêve comme une planche de salut. Mais un rêve est avant tout un idéal et l'idéal cadre souvent mal avec la réalité. Horace va prendre des coups, mais pas seulement sur le ring et pas toujours à la loyale. La vie va se charger de lui apprendre qu'il ne suffit pas de vouloir devenir quelqu'un pour qu'au fond de soi on se sente quelqu'un.
En dehors de la fin que j'ai trouvée trop artificielle, comme si l'auteur ne savait pas vraiment comment terminer son livre, le reste du roman est tout en finesse et subtilités, touchant au-delà de ce que je pouvais imaginer. J'ai retrouvé dans les mots de Willy Vlautin toute l'humanité et la sensibilité d'un Nickolas Butler. de la littérature américaine simple, authentique et proche de ses racines : très exactement comme je l'aime.

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