Après ce nombre prodigieux de fables qui semblent toutes plus absurdes que les Métamorphoses d’Ovide, on n’est pas moins surpris que Dieu délivre de la servitude en Égypte six cent mille combattants de son peuple, sans compter les vieillards, les enfants et les femmes ; que ces six cent mille combattants, après les plus éclatants miracles, égalés pourtant par les magiciens d’Égypte, s’enfuient au lieu de combattre leurs ennemis ; qu’en fuyant ils ne prennent pas le chemin du pays où Dieu les conduit ; qu’ils se trouvent entre Memphis et la mer Rouge ; que Dieu leur ouvre cette mer, et la leur fasse passer à pied sec pour les faire périr dans des déserts affreux, au lieu de les mener dans la terre qu’il leur a promise ; que ce peuple, sous la main et sous les yeux de Dieu même, demande au frère de Moïse un veau d’or pour l’adorer
Oui, il faut une religion ; mais il la faut pure, raisonnable, universelle : elle doit être comme le soleil, qui est pour tous les hommes et non pas pour quelque petite province privilégiée. Il est absurde, odieux, abominable, d'imaginer que Dieu éclaire tous les yeux, et qu'il plonge presque toutes les âmes dans les ténèbres. (p.26)
J'ai osé penser que si Dieu faisait des miracles, ce serait pour guérir les hommes, et non pour les tuer ; ce serait pour les corriger, et non pour les perdre ; qu'il est un Dieu de miséricorde, et non un tyran homicide. (p.18)
J'ai été affligé en lisant "je suis venu apporter le glaive, et non la paix ; je suis venu diviser le fils et le père, la fille, la mère et les parents". (p.17)
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