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René Pomeau (Éditeur scientifique)
EAN : 9782080700285
379 pages
Flammarion (07/01/1993)
  Existe en édition audio
4/5   168 notes
Résumé :
Le 28 février 1766, le chevalier de La Barre, jeune homme de dix-huit ans accusé d’avoir gardé son chapeau et chanté des chansons impies sur le passage d’une procession, est condamné à avoir la langue arrachée, la main coupée, et à brûler à petit feu. Sur son bûcher, on brûle aussi, pour le symbole, un exemplaire du Dictionnaire philosophique.
C’est dire le rôle de Voltaire et de son « diabolique Dictionnaire » dans le combat des Lumières contre le déchaîneme... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Le dictionnaire philosophique de Voltaire, se présente à nous, comme une sorte de bréviaire des idées les plus essentielles que le turbulent Voltaire souhaitait soumettre au lecteur, un traité sur l'usage de la raison. L'ensemble est attractif, un peu comme la philo pour les nuls. Si Voltaire devait de nos jours publier un tel volume il pourrait en effet décliner ainsi ses idées, faites de bon sens, d'ironie, d'étonnements et d'investigations.
On pourrait même imaginer un sous-titre, entre croyance et raison, il faut choisir.


Par la lecture de ce dictionnaire portatif on entre de plain-pied dans les combats de Voltaire. le terme lutte philosophique très explicite, est juste, derrière chaque article c'est une cible qu'il désigne, une erreur qu'il débusque, le fanatisme qui le révolte, une croyance abusive qu'il dénonce.


Pour instruire il ne perd pas un vain mot, il choisit abbé, par lequel il commence son dictionnaire, et par cette question. "Êtes vous Père, traduction d'abbé ou tonsuré pour toucher un bénéfice ?" le ton est donné, il termine le premier article par cet avertissement ; "tremblez que le jour de la raison n'arrive" ; quelle audace !


Les phrases impertinentes fusent ensuite, la religion mais pas uniquement ; sur le mot fanatisme il écrit : "si notre sainte religion a été si souvent corrompue par cette fureur infernale, c'est à la folie des hommes qu'il faut s'en prendre,"
Et le philosophe de préciser que "le plus détestable exemple de fanatisme est celui des bourgeois de Paris qui coururent assassiner, égorger, jeter par les fenêtres, mettre en pièces, la nuit de la Saint-Barthélemy leurs concitoyens qui n'allaient pas à la messe". "Le fanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ce que la rage est à la colère".


Les mots les plus violents après ceux, qui semblent tourner en boucle sur le fanatisme, sont réservés aux erreurs judiciaires, à la superstition puis à l'injustice sociale. Il prend la plume pour balayer plusieurs mots qui le font frémir le premier, bien qu'il soit à la lettre T est la torture autrement appelée question.


Au lieu de développer longuement la question et (ou) la torture il en donne un exemple simple, celui du chevalier de la Barre convaincu d'avoir chanté des chansons impies et même, d'avoir passé devant une procession de capucins sans avoir ôté son chapeau.
"Les juges d'Abbeville, gens comparables aux sénateurs romains ordonnèrent non seulement qu'on lui arracha la langue, qu'on lui coupa la main, qu'on brûla son corps à petits feux, mais ils l'appliquèrent encore à la torture pour savoir précisément combien de chansons il avait chantées. page 502".


Pour le mot superstition, il se montre fataliste : "chaque secte prétend avoir la raison de son côté ce sera donc la force qui jugera en attendant que la raison pénètre dans un assez grand nombre de têtes pour désarmer la force". Voltaire propose par ailleurs, de discerner la perversité de toute superstition ; "le superstitieux est au fripon, ce que l'esclave est au tyran." Ses dernières piques seront pour l'église, car " elle condamna toujours la magie, mais elle y crut toujours, ou encore, la superstition consiste à prendre des pratiques inutiles pour des pratiques nécessaires".


Au fil des articles de son dictionnaire, Voltaire s'expose il va au bout de ses réflexions, il met en difficulté bien des pratiques de la religion et de la religion chrétienne. Il s'expose beaucoup face aux autorités civiles et ecclésiastiques, c'est une oeuvre dense cohérente mais loin de la rendre rébarbative et ennuyeuse il développe une infinie variété de ton de présentations, d'indignations, en y ajoutant des anecdotes des saynètes pourrait-on dire même des sketches,

Il faut aussi souligner les quelques facéties auxquelles il se livre, tant pour illustrer son propos que pour rendre les textes plus ironiques, comme le pamphlet, l'Apparition de St Cucufin écrit à la même époque, un miracle de drôlerie.


Une lecture d'une modernité surprenante, où l'on peut trouver des réponses au vivre ensemble, ou à la laïcité.
Au plan littéraire d'une qualité formelle admirable à se délecter, on vit au charme de ses meilleurs pamphlets, tout y passe, drôlerie, ironie, invectives une palette digne d'un futur Villiers de l'Isle-Adam.
Excessif, odieux, farceur, vivant...
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Je me lance dans une redécouverte du grand Voltaire avec la lecture de ce "Dictionnaire Philosophique", riche ensemble consacré à la lutte d'un homme éclairé contre l'obscurantisme religieux de cette fin de XVIIIe siècle, ce qu'il appelle écraser l'infâme.
L'édition Classiques Garnier Poche accompagne l'oeuvre de nombreuses correspondances livrées en annexe et traitant de la réception publique de ce dictionnaire, des nombreuses attaques d'ecclésiastiques zélés, ainsi que des tentatives enjouées de Voltaire pour les contrer. C'est dans l'une de ces lettres que le philosophe expose clairement l'objet de son entreprise : « Je crois que la meilleure manière de tomber sur l'infâme, est de paraître n'avoir nulle envie de l'attaquer ; de débrouiller un peu le chaos de l'antiquité ; de tâcher de jeter quelque intérêt ; de répandre quelque agrément sur l'histoire ancienne ; de faire voir combien on nous a trompés en tout ; de montrer combien ce qu'on croit ancien est moderne ; combien ce qu'on nous a donné pour respectable est ridicule ; de laisser le lecteur tirer lui-même les conséquences. »
Composé de 118 articles, ce dictionnaire traite essentiellement de questions théologiques et religieuses, ce qui peut le rendre un peu rébarbatif. Tel un Saint Georges terrassant le dragon de la superstition et du fanatisme, Voltaire remet en cause les vérités supposées de l'Eglise en s'appuyant sur le contenu des textes canoniques et en les contextualisant. Bien qu'il se contredise souvent en stigmatisant le peuple juif alors qu'il prêche la tolérance et la bêtise des dogmes, Voltaire nous gratifie de réflexions lumineuses sur la justice, la vertu et l'éternité de la matière.
Le drame est de voir qu'en ce début de XXIe siècle le combat voltairien est loin de s'achever…
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Voltaire est l'un des plus grands philosophes français, du XVIII e Siècle,le siècledes Lumières. Voltaire est un poète, dramaturge et un polémiste de talent .
Approché par son ami , Denis Diderot, il collabore avec
D' Alembert et autres à la rédaction de l' Encyclopédie .Projet grandiose à l'époque ! Mais cette entreprise littéraire n' est pas une sinécure .A l' époque,il n'existait pas la liberté d'expression en France et le puissant frein est l ' Eglise catholique qui est omnipotente .Pour écrire "Le dictionnaire philosophique", il a publié son livre à Genève et de façon anonyme car Voltaire est rusé et a un précepte qu' il applique bien : "Frappez , et cachez-vous" .A la même époque surgit un grand problème au sein de l' Eglise catholique : la guerre entre jésuites et jansénistes qui affaiblira l' église et plus cette dernière est fragilisée , plus la tâche d' attaquer et de pourfendre cette institution est aisée .
le dictionnaire philosophique est la somme des pensées, des méditations et des idées du philosophe . On y trouve tous les thèmes chers à Voltaire : l' athéisme,le déisme,l' absurde, Dieu, la religion , le fanatisme , la bigoterie, la justice, la liberté, la tolérance, le progrès , la raison ...
le dictionnaire philosophique est un ouvrage fort intéressant qui doit être sur la table de chevet de quiconque aime se cultiver .
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Voltaire le grand philosophe du XVIII e Siècle ," le siècle des Lumières ", s'en
prend dans cet ouvrage , avec un ton sec et violent à l' Eglise qu'il considère tenir les gens dans l'ignorance , le fanatisme et la bigoterie .Il s' élève contre
l' absurde . IL pourfend violemment l' Eglise qui propage l'obscurantisme .
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Voltaire est à la fois terriblement daté et terriblement d'actualité. Il semble souvent enfoncer des portes ouvertes, lorsqu'il montre que la bible ne raconte pas que des réalités, que les débats théologiques compliqués ne valent pas le moindre petit acte vertueux ou que la vérité, à force d'être affirmée de manière contradictoire par toutes les sectes qui se la disputent, devient un objet impossible à saisir. En fait, s'il enfonce des portes, c'est parce qu'elle ne sont pas vraiment ouvertes. Quand Voltaire renvoie dos à dos tous les superstitieux et tous les fanatiques, quand il rappelle qu'il est absurde de tuer pour une vision du monde à propos de laquelle on n'a pas de preuve, quand il pousse son lecteur à penser par lui-même, quand il met la raison au-dessus des croyances et qu'il admet les limites de cette raison, quand il fait de la tolérance une valeur fondamentale, on ne peut que se dire qu'il est nécessaire de redire sans cesse les mots de Voltaire, car aujourd'hui encore, les Lumières sont souvent noyées sous l'ombre du fanatisme et de la bêtise.
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Citations et extraits (53) Voir plus Ajouter une citation
QUAKERS[1].

Quaker ou qouacre, ou primitif, ou membre de la primitive église chrétienne, ou pensylvanien, ou philadelphien.

De tous ces titres, celui que j’aime le mieux est celui de Philadelphien, ami des frères. Il y a bien des sortes de vanités ; mais la plus belle est celle qui, ne s’arrogeant aucun titre, rend presque tous les autres ridicules.
Je m’accoutume bientôt à voir un bon Philadelphien me traiter d’ami et de frère ; ces mots raniment dans mon cœur la charité, qui se refroidit trop aisément. Mais que deux moines s’appellent, s’écrivent Votre Révérence ; qu’ils se fassent baiser la main en Italie et en Espagne : c’est le dernier degré d’un orgueil en démence ; c’est le dernier degré de sottise dans ceux qui la baisent ; c’est le dernier degré de la surprise et du rire dans ceux qui sont témoins de ces inepties. La simplicité du Philadelphien est la satire continuelle des évêques qui se monseigneurisent.
« N’avez-vous point de honte, disait un laïque au fils d’un manœuvre, devenu évêque[2], de vous intituler monseigneur et prince ? Est-ce ainsi qu’en usaient Barnabé, Philippe et Jude ? — Va, va, dit le prélat, si Barnabé, Philippe et Jude l’avaient pu, ils l’auraient fait ; et la preuve en est, que leurs successeurs l’ont fait dès qu’ils l’ont pu. »
Un autre, qui avait un jour à sa table plusieurs Gascons, disait : « Il faut bien que je sois monseigneur, puisque tous ces messieurs sont marquis. » Vanitas vanitatum.
J’ai déjà parlé des quakers à l’article Église primitive[3], et c’est pour cela que j’en veux parler encore. Je vous prie, mon cher lecteur, de ne point dire que je me répète : car s’il y a deux ou trois pages répétées dans ce Dictionnaire, ce n’est pas ma faute, c’est celle des éditeurs. Je suis malade au mont Krapack, je ne puis pas avoir l’œil à tout. J’ai des associés qui travaillent comme moi à la vigne du Seigneur, qui cherchent à inspirer la paix et la tolérance, l’horreur pour le fanatisme, la persécution, la calomnie, la dureté de mœurs, et l’ignorance insolente.
Je vous dirai, sans me répéter, que j’aime les quakers. Oui, si la mer ne me faisait pas un mal insupportable, ce serait dans ton sein, ô Pensylvanie, que j’irais finir le reste de ma carrière, s’il y a du reste. Tu es située au quarantième degré, dans le climat le plus doux et le plus favorable ; tes campagnes sont fertiles, tes maisons commodément bâties, les habitants industrieux, les manufactures en honneur. Une paix éternelle règne parmi tes citoyens ; les crimes y sont presque inconnus, et il n’y a qu’un seul exemple d’un homme banni du pays. Il le méritait bien : c’était un prêtre anglican qui, s’étant fait quaker, fut indigne de l’être. Ce malheureux fut sans doute possédé du diable, car il osa prêcher l’intolérance : il s’appelait George Keith ; on le chassa ; je ne sais pas où il est allé, mais puissent tous les intolérants aller avec lui !
Aussi de trois cent mille habitants qui vivent heureux chez toi, il y a deux cent mille étrangers. On peut, pour douze guinées, acquérir cent arpents de très-bonne terre ; et dans ces cent arpents on est véritablement roi, car on est libre, on est citoyen ; vous ne pouvez faire de mal à personne, et personne ne peut vous en faire ; vous pensez ce qu’il vous plaît, et vous le dites sans que personne vous persécute ; vous ne connaissez point le fardeau des impôts, continuellement redoublé ; vous n’avez point de cour à faire ; vous ne redoutez point l’insolence d’un subalterne important. Il est vrai qu’au mont Krapack nous vivons à peu près comme vous ; mais nous ne devons la tranquillité dont nous jouissons qu’aux montagnes couvertes de neiges éternelles, et aux précipices affreux qui entourent notre paradis terrestre. Encore le diable quelquefois franchit-il, comme dans Milton, ces précipices et ces monts épouvantables pour venir infecter de son haleine empoisonnée les fleurs de notre paradis. Satan s’était déguisé en crapaud pour venir tromper deux créatures qui s’aimaient. Il est venu une fois chez nous dans sa propre figure pour apporter l’intolérance. Notre innocence a triomphé de toute la fureur du diable[4].
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extrait de l'article "Fanatisme", section II :

"On entend aujourd’hui par fanatisme une folie religieuse, sombre et cruelle. C’est une maladie de l’esprit qui se gagne comme la petite vérole. Les livres la communiquent beaucoup moins que les assemblées et les discours. On s’échauffe rarement en lisant : car alors on peut avoir le sens rassis. Mais quand un homme ardent et d’une imagination forte parle à des imaginations faibles, ses yeux sont en feu, et ce feu se communique; ses tons, ses gestes, ébranlent tous les nerfs des auditeurs. Il crie : « Dieu vous regarde, sacrifiez ce qui n’est qu’humain ; combattez les combats du Seigneur ! » et on va combattre.

Celui qui a des extases, des visions, qui prend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour des prophéties, est un fanatique novice qui donne de grandes espérances ; il pourra bientôt tuer pour l’amour de Dieu. [...]

Il n’est d’autre remède à cette maladie épidémique que l’esprit philosophique, qui, répandu de proche en proche, adoucit enfin les mœurs des hommes, et qui prévient les accès du mal; car dès que ce mal fait des progrès, il faut fuir et attendre que l’air soit purifié. Les lois et la religion ne suffisent, pas contre la peste des âmes ; la religion, loin d’être pour elles un aliment salutaire, se tourne en poison dans les cerveaux infectés. [...]

Que répondre à un homme qui vous dit qu’il aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, et qui en conséquence est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ? "
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Guerre -- Philosophes moralistes, brûlez tous vos livres. Tant que le caprice de quelques hommes fera loyalement égorger des milliers de nos frères, la partie du genre humain consacrée à l’héroïsme sera ce qu'il y a de plus affreux dans la nature entière. Que deviennent et que m'importent l'humanité, la bienfaisance, la modestie, la tempérance, la douceur, la sagesse, la piété, tandis qu'une demi-livre de plomb tirée de six cents pas me fracasse le corps, et que je meurs à vingt ans dans des tourments inexprimables, au milieu de de cinq ou six mille mourants, tandis que mes yeux, qui s'ouvrent pour la dernière fois, voient la ville où je suis né détruite par le fer et par la flamme, et que les derniers sons qu'entendent mes oreilles sont les cris des femmes et des enfants expirants sous des ruines, le tout pour les prétendus intérêts d'un homme que nous ne connaissons pas ?
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Les livres les plus utiles sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié; ils étendent les pensées dont on leur présente le germe; ils corrigent ce qui leur semble défectueux, et fortifient par leurs réflexions ce qui leur paraît faible.
Ce n'est même que par des personnes éclairées que ce livre peut-être lu; le vulgaire n'est pas fait pour de telles connaissances; la philosophie ne sera jamais son partage. Ceux qui disent qu'il y a des vérités qui doivent être cachées au peuple ne peuvent prendre aucune alarme; le peuple ne lit point; il travaille six jours de la semaine et va le septième au cabaret.
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PAPISME[1].

LE PAPISTE ET LE TRÉSORIER.

le papiste.
Monseigneur a dans sa principauté des luthériens, des calvinistes, des quakers, des anabaptistes, et même des juifs ; et vous voudriez encore qu’il admît des unitaires !
le trésorier.
Si ces unitaires nous apportent de l’industrie et de l’argent, quel mal nous feront-ils ? Vous n’en serez que mieux payé de vos gages.
le papiste.
J’avoue que la soustraction de mes gages me serait plus douloureuse que l’admission de ces messieurs ; mais enfin ils ne croient pas que Jésus-Christ soit fils de Dieu.
le trésorier.
Que vous importe, pourvu qu’il vous soit permis de le croire, et que vous soyez bien nourri, bien vêtu, bien logé ? Les juifs sont bien loin de croire qu’il soit fils de Dieu, et cependant vous êtes fort aise de trouver ici des juifs sur qui vous placez votre argent à six pour cent. Saint Paul lui-même n’a jamais parlé de la divinité de Jésus-Christ ; il l’appelle franchement un homme : la mort, dit-il, est entrée dans le monde par le péché d’un seul homme..... le don de Dieu s’est répandu par la grâce d’un seul homme, qui est Jésus[2]. Et ailleurs : Vous êtes à Jésus, et Jésus est à Dieu.... Tous vos premiers Pères de l’Église ont pensé comme saint Paul : il est évident que pendant trois cents ans Jésus s’est contenté de son humanité ; figurez-vous que vous êtes un chrétien des trois premiers siècles.
le papiste.
Mais, monsieur, ils ne croient point à l’éternité des peines.
le trésorier.
Ni moi non plus ; soyez damné à jamais si vous voulez ; pour moi, je ne compte point du tout l’être.
le papiste.
Ah ! monsieur, il est bien dur de ne pouvoir damner à son plaisir tous les hérétiques de ce monde ! Mais la rage qu’ont les unitaires de rendre un jour les âmes heureuses n’est pas ma seule peine. Vous savez que ces monstres-là ne croient pas plus à la résurrection des corps que les saducéens ; ils disent que nous sommes tous anthropophages, que les particules qui composaient votre grand-père et votre bisaïeul, ayant été nécessairement dispersées dans l’atmosphère, sont devenues carottes et asperges, et qu’il est impossible que vous n’ayez mangé quelques petits morceaux de vos ancêtres.
le trésorier.
Soit ; mes petits-enfants en feront autant de moi, ce ne sera qu’un rendu ; il en arrivera autant aux papistes. Ce n’est pas une raison pour qu’on vous chasse des États de monseigneur, ce n’est pas une raison non plus pour qu’il en chasse les unitaires. Ressuscitez comme vous pourrez ; il m’importe fort peu que les unitaires ressuscitent ou non, pourvu qu’ils nous soient utiles pendant leur vie.
le papiste.
Et que direz-vous, monsieur, du péché originel qu’ils nient effrontément ? N’êtes-vous pas tout scandalisé quand ils assurent que le Pentateuque n’en dit pas un mot ; que l’évêque d’Hippone, saint Augustin, est le premier qui ait enseigné positivement ce dogme, quoiqu’il soit évidemment indiqué par saint Paul ?
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