S'il n'y avait en Angleterre qu'une religion, le despotisme serait à craindre ; s'il y en avait deux, elles se couperaient la gorge ; mais il y en a trente, et elles vivent en paix et heureuses.
« La mort est plus aisée à supporter sans y penser, que la pensée de la mort sans péril. »
On ne peut pas dire qu’un homme supporte la mort aisé-ment ou malaisément, quand il n’y pense point du tout. Qui ne sent rien, ne supporte rien.
« À mesure qu’on a plus d’esprit, on trouve qu’il y a plus d’hommes originaux. Les gens du commun ne trouvent pas de différence entre les hommes. »
Il y a très peu d’hommes vraiment originaux : presque tous se gouvernent, pensent et sentent par l’influence de la coutume et de l’éducation : rien n’est si rare qu’un esprit qui marche dans une route nouvelle ; mais parmi cette foule d’hommes qui vont de compagnie, chacun a de petites différences dans la dé-marche, que les vues fines aperçoivent.
Il est aisé de voir par quelle fatalité presque tous ces discours académiques ont fait si peu d’honneur à ce corps [...]. L’usage s’est insensiblement établi que tout académicien répéterait ces éloges à sa réception. On s’est imposé une espèce de loi d’ennuyer le public. Si on cherche ensuite pourquoi les plus grands génies qui sont entrés dans ce corps on fait quelquefois les plus mauvaises harangues, la raison en est encore bien aisée : c’est qu’ils ont voulu briller, c’est qu’ils ont voulu traiter nouvellement une matière tout usée. La nécessité de parler, l’embarras de n’avoir rien à dire, et l’envie d’avoir de l’esprit, sont trois choses capables de rendre ridicule même le plus grand homme. Ne pouvant trouver des pensées nouvelles, ils ont cherché des tours nouveaux, et ont parlé sans penser, comme des gens qui mâcheraient à vide, et feraient semblant de manger en périssant d’inanition. Au lieu que c’est une loi dans l’Académie française de faire imprimer tous ces discours, par lesquels seuls elle est connue, ce devrait être une loi de ne les imprimer pas.
Ce n’est ni Montaigne, ni Locke, ni Bayle, ni Spinosa, ni Hobbes, ni milord Shaftesbury, ni M. Collins, ni M. Toland, etc. qui ont porté le flambeau de la discorde dans leur patrie ; ce sont pour la plupart des théologiens, qui ayant eu d’abord l’ambition d’être chefs de secte ont eu bientôt celle d’être chefs de parti. Que dis-je,
tous les livres des philosophes modernes mis ensemble ne feront jamais dans le monde autant de bruit seulement qu’en a fait autrefois la dispute des cordeliers sur la forme de leur manche et de leur capuchon.
La nécessité de parler, l’embarras de n’avoir rien à dire et l’envie d’avoir de l’esprit sont trois grandes choses capables de rendre ridicule même le plus grand homme.
L'intérêt que j'ai à croire à une chose n'est pas une preuve de l'existence de cette chose.
« Il y a donc deux sortes d’esprit, l’un de pénétrer vive-ment et profondément les conséquences des principes, et c’est là l’esprit de justesse ; l’autre de comprendre un grand nombre de principes sans les confondre, et c’est là l’esprit de géométrie. »
L’usage veut, je crois, aujourd’hui qu’on appelle esprit géométrique, l’esprit méthodique et conséquent.
La poésie est une espèce de musique : il faut l'entendre pour en juger.
J'ai cru que la doctrine et l'histoire d'un peuple si extraordinaire méritaient la curiosité d'un homme raisonnable.