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Pepe Carvalho (nouvelles) tome 4 sur 5

Claude Bleton (Traducteur)
EAN : 9782264029669
206 pages
10-18 (20/10/1999)
3.33/5   27 notes
Résumé :
Assassinat à Prado del Rey et autres histoires sordides rassemble quatre nouvelles qui mettent chacune en scène le héros désormais célébrissime de Manuel Vazquez Montalban, on a nommé Pepe Carvalho, le privé gourmet et gourmand qui oeuvre derechef ici, comme le titre du volume l'indique, dans les basses eaux de Barcelone avec le mélange de cynisme et l'espèce de tendresse qui l'on fait, immanquablement, comparer au Philip Marlowe de Raymond Chandler.
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
J'achève à regret ma première lecture de manuel Vazquez Montalban.
Quel plaisir, de suivre le "privé" Pepe Carvalho, dans ces enquêtes (descentes...) dans les strates sociales espagnoles de l'après-franquisme.
L'occasion de faire connaissance de personnages douteux, orgueilleux, déchus, assassins de raison ou de circonstances, victimes fragiles et décalées voire déclassées...
Sordide est bien l'épithète qui convient... Et Pepe, qui bosse en marge de l'ordre et de la loi, s'attarde et suit des pistes qui offrent au lecteur cette plongée (descente) en certains endroits tristes ou/et interlopes.
Il ressort de ces quatre nouvelles, une humanité profonde et souffrante. Une vision sarcastique et tendre se dégage de ces récits sans brutalité inutile, où le détective n'oublie jamais de manger et de dormir lorsqu'il le faut.

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C'est à cause de son personnage de détective privé, Pepe Carvalho, qu'il a fait vivre dans de nombreux romans et nouvelles et qu'il décrit lui-même comme un “privé mélancolique et nihiliste actif” que Vasquez Montalbán est connu du grand public. Les oeuvres le mettant en scène ont été traduites dans différentes langues et même adaptées pour le cinéma et la télévision. On les trouve assez facilement sur le site de RTVE et sur You Tube…

Je suis personnellement très attirée par les romans policiers esthétisés par des références artistiques, musicales ou littéraires et je voue un culte à ce privé fin gourmet et à ses métaphores culinaires, même si sa curieuse manie de brûler les livres me fait frémir ; ce rapport particulier à la culture et à la mémoire, entre modestie, car Carvalho est extrêmement cultivé, et cynisme m'intrigue et j'en redemande.

Les quatre nouvelles de ce recueil présentent une déclinaison du mot « sordide » et mettent l'accent sur une saleté abstraite, sur l'infamie sous-jacente de la société. Pour autant, Vasquez Montalbán ne porte pas de jugement : « Assassinat à Prado del Rey » insiste sur l'impuissance à agir autrement que de la manière atavique de son milieu social ou culturel, « Rendez-vous avec la mort à Up and Down » ironise sur une forme de « sida esthétique », « Jordi Anfruns, sociologue sexuel » illustre une société issue du mai 68 français mais qui ne l'assume pas tandis que le final du « Signe de Zorro » est visualisable comme un tableau de Goya…

Je vous recommande de petit recueil et vous laisse avec la dernière phrase de la préface de l'auteur : « Je n'exagère pas. Des choses pareilles, j'en ai vu comme tout le monde ».
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Dans sa préface, l'auteur précise que ces histoires sont sordides c'est à dire contiennent des faits, des personnages "méprisables, ignobles ou mesquines". Il nous plonge dans une Espagne du début des années 80 que je connais mal. le souvenir du franquisme est vivace, la démocratie ne satisfait pas tout le monde, beaucoup se plaignent du manque de reconnaissance. La nouvelle qui donne son titre au recueil plonge Pepe Carvalho dans les milieux de la télévision et le force à consommer sans relâche les oeuvres du réalisateur assassiné. le temps presse : celui qui l'a engagé risque d'être limogé d'un jour à l'autre, et notre détective tient à être rétribué pour sa peine. le Madrid de la Movida ne lui convient pas vraiment, et il est plus suiveur que véritable enquêteur, dans ce Madrid nocturne composé de lieux à la mode presque aussitôt démodés. Pepe ne se pose pas en moralisateur - mais s'il fallait lui poser la question, je suis sûre qu'il ressent de la compassion pour le coupable, non pour la victime irréprochable aux yeux de la morale bourgeoise.
La fameuse morale bourgeoise en prend un sérieux coup dans Jordi Anfruns, sociologue sexuel, la troisième nouvelle. Une jeune fille de bonne famille, pourrie gâtée par maman et chassée de la maison à cause de ses frasques, est retrouvée assassinée. Je ne vous parle même pas du scandale, ni des disputes entre les parents, ni encore de la droiture de la soeur aînée, mariée et mère de famille respectable. L'enquête de Pepe Carvalho va donner un grand coup de pied dans toute cette respectabilité - et il en paiera les conséquences aussi.
Plus courtes sont les nouvelles pairs. Rendez-vous avec la mort à Up dans Down nous emmène, avec son titre qui n'est pas sans rappeler Agatha Christie, dans les méandres des boites de nuit à la mode (encore une fois) où un assassinat est in-con-ce-vable - et a pourtant lieu. le signe de Zorro est la rencontre de plusieurs misères, toutes plus sordides les unes que les autres. S'en sortir est impossible - si ce n'est par la mort. Quant à Pepe Carvalho, je lui laisse le mot de la fin :
"Non, je n'ai jamais eu la tentation morbide de savoir ce qu'il est advenu des coupables dans les affaires que j'ai résolues, encore moins quand la responsabilité incombait à la police et aux juges. Je découvre des assassins, à la police et aux juges d'en faire des victimes. Côté victime, d'ailleurs, je me suffis à moi-même".
Lien : http://le.blog.de.sharon.ove..
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J'avais envie depuis longtemps de renouer avec Montalban et Pepe Carvalho... c'est chose faite avec "Assassinat à Prado del Rey et autres histoires sordides". du sordide, il en est question dans ces différents nouvelles, dont une porte sur  l'assassinat d'un réalisateur de télévision, où on croise dans une autre un sociologue sexuel (un peu timbré...). Des nouvelles traversées par des personnages un peu louches, traitant de perversion et de folie aussi. Où j'ai eu plaisir à retrouver un Pepe Carvalho flegmatique, ironique et toujours fin gastronome...
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Il s'agit ici d'un recueil de quatre nouvelles cataloguées comme « policières » mais qui n'en sont pas. Oui, le personnage principal est un détective privé enquêtant sur des meurtres et des morts plus ou moins louches mais aucune des intrigues narrées n'offre ici de réelle solution. Entre critiques cyniques de la société catalane, un humour parfois un peu balourd et des digressions à chaque paragraphe, il est facile de perdre le fil et de se désintéresser de ces histoires pas si sordides que cela. le style et la narration ne m'ont pas convaincue de continuer la lecture des deux dernières nouvelles de ce recueil qui ne m'a, au final, pas séduite du tout.
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Assassinat à Prado del Rey :

Carvalho pensa au fantôme de l’Opéra pendant tout son voyage à Madrid, imaginant un fantôme audiovisuel adapté à Prado del Rey, vaguement punk mais avec des pellicules, rock dur en musique de fond, avec un peu d’orgue de barbarie, un empilement d’omelette aux pommes de terre et hamburger ou des tripes à la madrilène arrosée de ketchup.

[…]

Il y a toujours quelqu’un pour assassiner ce qu’on a écrit. Écrire, c’est comme de fabriquer des assiettes pour le ball-trap ou de couver des pigeons pour le tir aux pigeons.

[…]

Elle souffla par le nez : si elle avait été debout, elle aurait piétiné le sol comme un taureau avant l’attaque.
— tu ne me bottes pas, Galicien. Mon père était asturien, et il disait que tout le mal venait de l’ouest. Et vous, vous êtes à l’ouest.
— C’est faux. Araquistain était basque et jamais, jamais je ne lui ai entendu dire une telle connerie.
Elle s’était levée, les yeux brillants d’une colère mauvaise.
— Ce Galicien de merde a insulté les Asturiens.
— Mais non, Inma, mais non… C’est un ami et il veut nous aider, il veut t’aider. Comme ça, la police ne t’embêtera plus.
— Moi, la police, je me la fous…
— D’accord. Mais aide-nous, Inma.

[…]

— Drôle d’époque, mon cher Carvalho, la loyauté se paie par un refus, un néant et une absence ; ma loyauté était si grande, si démesurée, qu’on pouvait la prendre pour de la déloyauté. J’ai en partie sacrifié mes convictions et mes objectifs historiques pour consolider la démocratie. Et comment me paie-t-on en retour ? En me jetant en pâture aux lions de la droite, mais ainsi on détruit une des rares traces de républicanisme subsistant dans le socialisme espagnol. République vaut rationalité, et c’est pour cette raison qu’om me congédie, parce que j’ai voulu appliquer la morale rationnelle, parce que je suis fondamentalement républicain, même si j’ai loyalement cette monarchie, cette république couronnée, consacrée par le sceau de la Constitution de 1978.
D’un trait et sans consulter une note, observa Carvalho. Mais il ne dit rien, car Vilariño poursuivait cette épître morale à un ami intime.

[…]

— Voulez-vous être mon marmiton ?
— Pas le temps, et la nouvelle cuisine [en français dans le texte] n’est pas mon truc. Je suis de la banlieue, toujours fidèle à la cuisine maison. Mais avec un entrainement à base de menus de ce genre, vous n’arriverez jamais à écrire L’Ulysse de Joyce.
— Finalement, j’aimerais autant réussir un bon Kundera. Les saumons à la moelle seront un excellent entrainement pour écrire un Kundera.
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Jordi Anfruns, sociologue sexuel

Il est introduit par un soi-disant majordome vu ses manières, mais habillé en chauffeur, qui se demande quel accueil son maître peut réserver à cet intrus pas très reluisant. Les yeux de M. Gispert prononcent la même sentence. Cet homme a des mâchoires puissantes, une poitrine puissante, une tête puissante émergeant d’une veste d’intérieur blanche, il est vautré dans une puissante chaise longue [en français dans le texte] d’un jardin puissant, doté de l’inévitable et puissante piscine. À côté de lui et par contraste se tient la petitesse d’une figurine de femme éplorée. La petitesse de la femme accroit l’immensité de l’homme, et les larmes excitent le ton rude et dominateur.
- Pour moi, elle était déjà morte.
- Ma petite !
- Tais-toi, maquerelle. C’est en grande partie de ta faute. Tu me reprochais d’être trop dur avec elle, et tu n’arrêtais pas de la protéger quand elle avait de mauvaises notes et rentrait tard le soir.
- Elle voulait être actrice.
- Actrice ! Actrice. Je savais très bien ce qu’elle voulait être.
Carvalho assiste dans son coin à l’inutile scène de ménage, à ce duel d’opinions qui va les accompagner jusqu’à la fin de leurs jours.

[…]

Un ex-cinéma de vieilles putes et de branleuses sur le retour de l’après-guerre, transformé en local de répétitions pour des compagnies théâtrales indépendantes, à en croire les plans de la commission culturelle d’une mairie démocratique décidée à faire oublier au public, grâce au théâtre, la médiocrité de la vie quotidienne. […]. Plus rien n’est comme avant, grommelle Carvalho. Il faudrait rétablir le théâtre en vers. Restaurer l’archéologie culturelle au lieu de la parer de modernité.

[…]

Une femme d’une cinquantaine d’années, très nerveuse, se lève, se racle la gorge, s’exprime avec difficulté.
— j’aimerais vous demander… enfin… Vous avez beaucoup parlé des fascistes… et des libéraux, mais les communistes ? Sont-ils des violeurs ? Je veux dire ont-ils cette agression sexuelle à l’esprit ?
– Vous êtes communiste, madame ?
La dame poussa un petit cri.
— oh non ! Dieu m’en préserve !
— Je vous pose cette question car, si vous l’étiez, vous comprendriez beaucoup mieux ma réponse. Les communistes sont capables de doser leurs pulsions sexuelles en fonction des besoins du parti.
Quelques oh admiratifs et effarouchés dans la salle, des approbations de parterre d’opéra. Une autre dame se décide, après les mêmes hésitations que la précédente.
— Excusez-moi… J’aimerais savoir si on peut établir une classification par profession… Quelle est la profession sexuellement la plus agressive ? C’est qu’il m’est arrivé une fois… enfin… un plombier… a dépassé les bornes.
Une étincelle de malice apparaît sur le visage d’Anfruns tourné maintenant vers Carvalho, qui est assis dans le public.
— Par profession, les plus agressifs sont sans aucun doute les détectives privés. La séance est terminée.

[…]

— Vous êtes d’une bonne famille, Anfruns ?
— Oui. À quoi l’avez-vous deviné ?
À votre façon de mépriser. Ça se tête au berceau.

[…]

Elle est infidèle à son mari et nous ne lui en voudrons pas, car vous savez aussi bien que moi qu’un mari est le plus ennuyeux des animaux domestiques. Je me trompe ?
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Rien n'est plus triste qu'une chambre pour deux, quand on ne s'aime plus trop ... Ce sont deux beaux vers de déboire amoureux d'un des meilleurs poètes d'amour contemporains. Mais ils brûlent bien. Il faut reconnaître qu'ils brûlent bien. Si vous êtes un pyromane, vous avez dû remarquer que les livres en vers brûlent mieux que les livres en prose. Les espaces blancs facilitent la combustion.
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Le Signe de Zorro

Il reste des pèches au moscatel de Javéa dans les verres, des reliefs de steak tartare aux huitres et au saumon mariné dans les assiettes, un quart de bouteille de sancerre qu’ils finiront à la dernière minute, avant la séparation définitive de leurs silences fatigués, avant que Fuster rejoigne son lit de célibataire gréco-latin et Carvalho sa maison desséchée où s’épuisent les braises du dernier feu allumé au dépens des Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar. Pour pouvoir le brûler, Carvalho a enfreint sa règle de ne plus acheter un seul livre depuis l’année où le club de Rome a décrété le degré zéro du développement, entérinant l’échec sans rémission de deux cents ans d’optimisme culturel et criminel de la bourgeoisie et de ses antagonistes. À en juger par ce qu’il a lu dans les journaux, Marguerite Yourcenar semble être une vieille radoteuse maniaque, auteur de livres d’éthique à l’usage des chefs de gouvernement qui se moquent éperdument des éthiques littéraires.
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Que ce soit sous le franquisme ou en démocratie, il y avait toujours des types prêts à manger quelque chose ou n'importe quoi, au mépris de milliers d'années d'évolution culinaire, depuis l'instant capital où un primate avait laissé tomber un morceau de viande crue dans le feu. La première scission, entre les partisans de la viande saignante et ceux de la viande très cuite, remonte sans doute à cette époque-là.
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