Court roman de 90 pages,
Un homme jetable est une violente charge contre l'industrie du nucléaire, mais pas seulement.
Nous suivons le parcours de Jules, jeune de 18 ans qui vient de rater son bac pour la seconde fois, et qui est prêt à faire n'importe quel travail pour échapper au domicile familiale, devenu invivable par la présence d'une mère qui pratique la "prostitution déguisée" (elle vit aux crochets de ses divers amants qui ont tous en commun d'être aisés). On sent que la cohabitation entre ces deux là n'a jamais été évidente et l'absence de modèle paternel est criante. D'ailleurs l'homme jetable ne serait-il pas également celui qui n'a jamais vraiment compté pour sa mère ? Ainsi, lorsque la conseillère du Pôle Emploi de Nice propose à Jules une mission d'intérim dans le nucléaire il saute sur l'occasion, sans se poser de questions. Son travail va l'amener à faire un tour de France des centrales nucléaires, pour réaliser des travaux de maintenance lors des "arrêts de tranches". Cette expérience va lui permettre de faire la connaissance de Fernand, vieux briscard de l'atome, qui va le former et l'accompagner dans ses premiers pas dans le monde du travail, jusqu'à ce que leur relation tourne à l'aigre, au fur et à mesure qu'il prend de plus en plus de risques.
Globalement,
Un homme jetable est un roman agréable à lire, la prose est rythmé, parfois hachée. Aude Walker use et (par moments) abuse de l'usage de la virgule, alternant phrases courtes et longues dans une scansion efficace. le vocabulaire employer par Jules se veut "djeuns" mais conviendrait mieux à un jeune de 25 ans ce qui fait qu'on oublie parfois qu'il n'a que 18 ans. Néanmoins il est relativement crédible, en tant que personnage, et offre une évocation réaliste de ce passage délicat de l'adolescence à l'âge "adulte" (comportement ordalique, histoire de coeur sans lendemains, engagement militant). Mais
Un homme jetable est également un réquisitoire à charge contre l'industrie du nucléaire dont nous découvrons les injustices et le cynisme (différence de traitement entre les sous-traitants et les agents EDF, maladies professionnelles non reconnues etc...). le point faible de ce récit est, à mon sens, la naïveté de Jules qui ne voit pas le drame finale se nouer, pourtant si évident. Mais c'est sans doute une volonté de l'auteure que de sacrifier une partie de la crédibilité de son héros, afin de préserver le déroulement logique de sa relation avec Fernand, véritable figure paternelle, et fils conducteur de l'histoire.
En résumé, ce roman est agréable à lire, et s'avère fort instructif sur les pratiques iniques et cyniques de l'industrie du nucléaire.
Note 3,5/5