Citations sur Bois sauvage (48)
Allongés les yeux sous les étoiles,
On se demandait ce qu'on ferait quand on serait grands.
J'ai dit: "Qu'est-ce que tu veux être?"
Et elle a dit: "Vivante."
OutKast, Aquemini
J'attacherai mes petits cailloux avec des ficelles, je les suspendrai au-dessus de mon lit pour qu'ils brillent dans le noir et qu'ils racontent l'histoire de Katrina, la mère qui a envahi le golfe pour tout massacrer, dans un chariot si grand, si noir que les Grecs auraient dit que la tempête chevauchait les dragons. Une mère assassine qui nous prit tout sauf la vie, qui nous laissa nus et Groggy comme des nouveaux-nés, ridés comme des chiots aveugles, ruisselants comme des serpents dans leur œuf brisé. Le golfe est noir et la terre brûlée par le sel. Il nous faut apprendre à ramper, à fouiller les décombres, à sauver ce qui peut l'être. Katrina est celle qu'on se rappellera jusqu'à ce qu'une autre mère, assoiffée de sang, abatte sur nous ses mains sans pitié. (p. 303)
Mais j'entends que les qui se disent de se taire, les chênes qui se froissent, les grandes feuilles dures des magnolias qui grelottent comme des assiettes en papier agitées par le vent. Les rafales annoncent Katrina là-bas dans le golfe, comme une voix grave qui parle dans le couloir avant d'entrer dans la chambre. (p. 195)
Miss Dedeaux nous a dit qu'avant, cette école-là était seulement pour les Noirs, jusqu'à l'abolition de la ségrégation. C'était juste après le dernier gros ouragan*, en 1969, les gens étaient trop épuisés pour aller chercher les corps de leurs parents, parce qu'ensuite il faudrait les enterrer une deuxième fois. Ils dormaient n'importe où, les gens, dans les fondations puisqu'ils avaient plus de maison au-dessus, ou sous la tente, et ils faisaient des kilomètres à pied ou à vélo pour trouver de l'eau et à manger, alors par-dessus ça, ils allaient pas lutter contre la fin de la ségrégation. (p. 174)
*Ouragan Camille, mi-août 1969, 259 morts, 9000 blessés.
« Allongés les yeux sous les étoiles,
On se demandait ce qu’on ferait
Quand on serait grands.
J’ai dit : « Qu’est- ce que tu veux être ? »
Et elle a dit : « VIVANTE » .
C'est pas qu'il est gros, mais tout est plus grand chez lui. Ses mains comme des gants de base-ball, sa tête comme un melon, sa poitrine qui ressemble à un steel-drum qu'on pourrait faire des barbecues dedans, ses jambes qui partent comme les branches d'un tronc qu'on sciera jamais. (p. 152)
Mon ventre vit sa vie, comme un animal que je connais pas,...(p. 137)
« Terrible.
Le vent cogne dans tous les sens, il fait claquer mille fouets et mille ceintures.
La pluie brûle comme une pluie de cailloux qui s’enfonce dans les yeux si on les ferme pas.
L’eau tourbillonne et se ramasse et explose, noire avec des filets rouges, c’est l’argile de La Fosse, une blessure qui n’arrête pas de couler. Les épaves du jardin, les frigos, les tondeuses, le camping- car, les matelas flottent comme une armée de bateaux .
Les arbres et les branches se brisent , éclatent comme des séries de pétards , sans fin, sans fin...... »
Depuis qu'à douze ans il (Skeet) a rapporté un pitbull volé dans un jardin quelque part, je ne l'ai jamais vu qu'entouré de chiens. Tigrés, pelés, blancs, rosâtres, gros ou tellement maigres que leurs os ressemblaient à un banc de poissons qui nageaient sous leur peau. Il parle pas, il aboie. Quand il marche, on entend la queue d'un clebs qui frappe le sol en frétillant. On s'est un peu perdus de vue, tous les deux. Et maintenant je me demande où il est, à quoi il pense quand ils dorment ses chiens. (p. 48)
Terrible. Le vent cogne dans tous les sens, il fait claquer mille fouets et mille ceintures. La pluie brûle comme une pluie de cailloux qui s'enfonce dans les yeux si on les ferme pas. L'eau tourbillonne et se ramasse et explose noire avec des filets rouges, c'est l'argile de la Fosse, une blessure qui arrête pas de couler. (p. 276)