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Critique de Seraphita


Christophe et Joshua sont jumeaux. Ils viennent tout juste, à 18 ans, d'obtenir leur diplôme et se mettent en quête d'un travail. Mais la tâche est ardue, surtout quand on est pauvre, noir et qu'on vit dans un trou paumé en Louisiane. Quand Joshua décroche un emploi dans les docks, Christophe développe une jalousie maladive vis-à-vis de son jumeau, et avec elle, il se replie dans le silence. Alors quand son cousin lui propose de l'argent facile en vendant de la drogue, il n'hésite qu'un temps et se lance à corps perdu dans les pas de son père, dealer, qui a abandonné ses enfants et s'est marginalisé. Les jumeaux, jusque-là si soudés, vont mener une existence parallèle, jusqu'au point de rupture…

« Ligne de fracture » est le premier roman de Jesmyn Ward. « Bois Sauvage », le deuxième, a obtenu le National Book Award, récompense littéraire suprême aux Etats-Unis. « Ligne de fracture » est un roman puissant, à la fois très sombre, qui explore la violence contenue des jumeaux, la rancoeur engrangée au fil des jours et qui délie insidieusement les trajectoires, jusqu'alors si fusionnelle, des deux frères, et en même temps plein d'humanité et d'espoir, celle qui peut amener les êtres blessés à rebondir. C'est ce contraste qui rend ce roman si puissant, la capacité de l'auteur de sortir des clivages dans lesquels l'intrigue pouvait la mener.
Jesmyn Ward sait rendre à chaque ligne le climat pesant, la chaleur torride des bayous qui emprisonne chacun des protagonistes dans une torpeur mortifère : la sueur coule à flot, tout comme l'alcool ou la drogue qui aident à éponger les rancoeurs et humiliations du quotidien, le délitement d'une famille que seule la grand-mère a su incarner. A l'image du climat, l'intrigue s'écoule lentement au rythme des états d'âme des jumeaux, de la vacuité ressentie par Christophe au fil de ses journées vides. Malgré quelques longueurs, le final offre de belles lignes emplies d'un lyrisme qui ouvre, soudain, l'horizon du bayou.

« Dunny les conduisit dans le bayou. Ils avaient décidé d'aller pêcher sur une des petites passerelles, pas plus longue que deux voitures bout à bout. Ils n'en avaient croisé aucune en chemin. le couchant rasait au loin les hautes herbes des marais, entre les pins immobiles où volaient quelques aigrettes. » (p. 342.)
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