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Critique de fuji


Lu dans le cadre de la Rentrée littéraire 2018 17ème Prix FNAC

1915 dans une ferme du Mississippi née Jane Watson, enfant non désirée, elle a deux grands frères adultes, une soeur Grace âgée de 10 ans et un frère mort à l'âge de deux ans.
Jane est l'enfant que l'on attendait pas et qui arrive comme une punition dans cette famille, dès la naissance le docteur constate que ses organes génitaux ne sont pas achevés... Handicap cruel dans un milieu modeste de gens taiseux et laborieux.
Qu'importe la petite Jane semble heureuse de toutes choses, la campagne la ravie, son anatomie lui impose divers accommodements pas simples à gérer, mais elle y arrive avec tout le naturel et l'optimisme d'une petite fille qui a envie de vivre.
Les parents sont des taiseux dans ce monde agricole où les mots ne sont pas des outils familiers. Comme dans tous les milieux modestes une partie de l'éducation du dernier-né est laissée à l'ainée.
« Sa fille aînée s'occupe pratiquement seule de sa soeur quand elle n'est pas à l'école. Une étrange enfant, qui ne parle pas beaucoup. Elle me fait l'effet d'un chat sauvage, prisonnière de cette famille et des tâches qui lui incombent, comme si on l'avait attachée à un arbre par une chaîne tendue à l'extrême. »
Grâce s'y prête bon gré mal gré, mais elle rêve vite d'une autre vie, ailleurs loin de la ferme, en ville, et elle y parviendra avec des moyens qui n'appartiennent qu'à elle.
Jane avance en toute conscience : « A la fin du printemps, l'année de ses six ans, une conscience plus complexe d'être différente des autres avait commencé à se former dans son esprit, telle la racine d'une plante étrange au plus profond des bois... Elle comprit avec davantage de clarté encore qu'elle était la seule à être faite comme elle. Elle était bizarre. Elle s'habitua à ce sentiment de honte brûlant qui pouvait lui monter au visage, lui picoter soudain le cuir chevelu et lui donner envie de pleurer. »
Jane a un ami et confident dès son premier cri, le docteur Thompson. C'est lui qui avec bienveillance et douceur, mais également une grande franchise l'accompagnera en répondant à toutes ses interrogations au fur et à mesure de sa construction de jeune fille et de femme. Il restera son indéfectible et éternel ami.
La maxime de Jane pourrait se résumer à : « Elle ne pensait pas. Elle se contentait d'être. Tout simplement Jane. »

C'est un beau roman sur la différence et la façon d'apprivoiser celle-ci pour se construire malgré tout mais surtout avec. Jane est exemplaire par son caractère heureux, curieux, elle trouve toujours de quoi être heureuse même si lui reste interdit une vie amoureuse et une maternité. Pourtant l'amour elle en rêve, elle le rêve, ce sentiment la berce et la fait avancer encore et encore.
Elle est intelligente, son amour des choses simples, ces petits bonheurs que beaucoup ne savent pas regarder et apprécier sont des pépites pour elle.
Brad Watson sait écrire à un double niveau la rudesse d'une vie à la campagne avec l'impact de la crise de 1929, et la délicatesse d'un homme érudit et profondément humain comme le docteur Thompson.
Les passages de partages entre Jane et le docteur Thompson sont des parenthèses d'état de grâce. Empreints de bienveillance, de compréhension et d'osmose entre deux êtres qui vont s'apporter l'un l'autre des richesses de coeur et d'intelligence qui font grandir.
Courage, espoir et la quête du bonheur celui qui est enveloppé de sagesse, c'est l'héritage de Jane.
Héritage que Brad Watson offre à notre réflexion avec beaucoup de poésie.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 25 juin 2018.
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