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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'Eriophora, l'espèce transmarina plus particulièrement, est une petite araignée de moins de trois centimètres de long qui tisse, la nuit, près des sources lumineuses, de grandes toiles de soixante-dix à cent vingt centimètres. Un nom approprié pour ce vaisseau-astéroïde géant en forme d'arachide de quatre-vingt dix kilomètres sur son grand axe et soixante-neuf sur le plus petit (l'échelle est donnée dans un dessin qui figure dans les premières pages), dont la mission est de mailler toute la galaxie en tissant un réseau de trous de ver accrochés à des portails déposés à proximité d'étoiles, ou même de trous noir.

Petit problème, sa vitesse quoique relativiste, est limitée à vingt pour cent de celle de la lumière. Ce qui met l'étoile la plus proche à, au moins, vingt années de navigation, et le premier tour ne pourra se boucler en moins de un virgule sept millions d'années (ce n'est pas vraiment dans le bouquin mais si on compte que la voie lactée fait cent six mille années-lumière de diamètre, en multipliant par trois quatorze puis par cinq, c'est un chiffre qui paraît raisonnable - ou totalement déraisonnable). Autant dire que ce voyage au long court s'éternise vraiment. L'action de ce bref récit se développe (si j'ose dire) pendant le soixante-sixième million d'années.

La boucle a été bouclée une bonne trentaine de fois (précisément trente-deux) et l'équipage humain, ou presque humain, transhumain certainement, estime que l'Intelligence Artificielle, le Chimp, qui est chargée de toutes les taches de bord et de la construction des portes des étoiles a une tendance à les sacrifier un peu trop facilement. Sans être aussi expéditif qu'HAL 9000 qui prend la décision de se débarrasser de tout l'équipage alors que le Chimp, à ce moment du voyage, n'en a encore exterminé que dix pour cent, on retrouve un peu la problématique de 2001, l'Odyssée de l'espace mais diluée sur des éons.

Le temps est fondamental dans l'histoire. L'équipage est préservé dans un état de quasi mort et n'est ressuscité que lorsque se présentent des problèmes demandant de l'intuition et un peu plus de jugeote que celle dont dispose l'IA de bord. Voilà où réside tout le sel de l'intrigue : comment organiser une révolte quand on ne peut être actif que quelques jours par millénaire, ou par centaine de milliers d'années. le titre anglais "the freeze-frame revolution" est plus explicite quoique difficilement traduisible. Sans compter que l'IA a des yeux et des oreilles partout, y compris dans la tête des comploteurs (transhumanisme oblige). Autre détail gênant, peut-être n'est-elle pas aussi limitée que prévu.

Il y avait bien longtemps que je n'avais été autant accroché par un texte, depuis les nouvelles de Greg Egan, mais pas pour les mêmes raisons, ceci dit. Celui-ci est plus facile d'accès parce qu'il est beaucoup plus subjectif. Les six chapitres sont comme le journal intime de Sunday Ahzmundin, la narratrice et principale héroïne. Il ne faut pas s'attendre à un flot de détails sur la psychologie de ses compagnons de voyages qu'elle ne côtoie que quelques heures ou au mieux quelques jours, par ci, par là, au long des millénaires ; et moins de détails encore sur le fonctionnement du vaisseau qui, pour elle, est tout aussi évident qu'au personnage auquel est destiné le texte (autrement dit, pas nous, lecteurs et lectrices qui tournons les pages du livre, ni même les autres membres de l'équipage humain quoique ces derniers sont censés pouvoir le lire puisqu'un message codé qui leur est destiné est caché dedans - certaines lettres sont en rouges dans l'édition papier et en gras dans l'édition numérique). On est plus dans l'exposé succinct d'un ressenti avec quelques touches bien choisies qui permettent d'imaginer le décor. Un gain appréciable dans la dynamique du récit, qui est peut-être de la hard science, mais qui, surtout, est de la science fiction, de la vraie ! de la bonne ! (personnellement, je ne crois pas qu'au-delà de la nouvelle - au pire de la "novella" - on puisse écrire quelque chose qui porte ce nom sans honte).

Un moment, je me suis demandé s'il fallait écrire cette chronique avant de lire les trois autres textes qui appartiennent au cycle de l'Eriophora et se trouvent dans le recueil Au-delà du gouffre acheté d'enthousiasme après la lecture d'un autre livre paru aux éditions le Bélial' : Comment parle un robot ? Finalement pas nécessaire mais la nouvelle Éclat, par exemple, donne quelques renseignements supplémentaires sur les mobiles de ceux qui ont lancé l'opération (et laisse espérer un space opera militaire des plus bizarres dont quelques bribes sont laissées en filigranes dans la nouvelle Géantes). La nouvelle L'île, permet de se rendre compte qu'un milliard d'années après son lancement, l'Eriophora continue à essaimer dans la galaxie...
Lien : https://rifters.com/real/sho..
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Le chimpanzé tisse sa toile...

Tragédie en 6 actes avec prologue et épilogue.
Parfois, on ne trouve pas de travail près de chez soi. Et les chantiers d'autoroutes demandent toujours plus de main d'oeuvre... Alors on prend la route et on laisse sa vie par derrière. C'est ce qui arrive Sunday, dans un très lointain futur sur son engin de travaux publics un peu spécial : un gros caillou comme vaisseau, pondant des trous de vers.

L'espace temps et une notion bien complexe. Ici en deux pages, l'auteur nous fait vivre ce qu'est cette dimension temporelle immense, inimaginable, incommensurable.
Huis clos classique de l'espace, des humains en hibernation, l'IA ne les réveillant qu'en cas de problème. Une vie en pointillé, quelques jours de vécu entre deux millénaires. Mais lorsque les millions d'années s'écoulent, difficile de ne pas éprouver de solitude, de nostalgie pour cette bonne vieille Terre. Alors on rumine... Et les emmerdes commencent.

Peter Watts est un auteur de hard-SF et bien que ce texte soit intelligible pour l'amateur éclairé, je ne pense pas qu'il puisse l'être pour des lecteurs non aguerris en science-fiction. Il suffira donc de lire encore un peu pour faire la connaissance de ce Chimp, l'Intelligence Artificielle du vaisseau, qui est loin des standards froids que l'on connait habituellement. Mais connait on réellement la psychologie des IA ? L'Homme peut-il se fier totalement à une machine, fût elle intelligente ?

Une révolution est-elle possible dans ces conditions ? Peter Watts nous donne sa réponse qui m'a bien plu. Ça se lit tout seul, on a envie de savoir comment tout cela va se terminer, où nos révolutionnaires vont se la faire mettre à l'envers. Des questions, de l'intelligence, une atmosphère étouffante et un combat IA/Femme, qu'est ce que tu attends pour le lire ?
Un texte non dénué de poésie scientifique, parsemé de touches d'humour noir propre à l'auteur, comme ce "Pour servir au mieux les intérêts de la mission"

Cerise sur le gâteau, un petit jeu se cache dans les lignes du roman, permettant de prolonger le final.
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L'Eri (son petit nom) est un astéroïde de plusieurs kilomètres dont une partie fut évidée pour contenir une singularité propulsant ce vaisseau de pierre à une vitesse proche de celle de la lumière. Il contient également 30 000 résidents, ainsi que des forêts et un écosystème adaptés à ces conditions extra-ordinaires. Leur mission s'avère simple : établir un réseau de portails au sein et au pourtour de notre Galaxie. La mise en oeuvre est compliquée, aussi les scientifiques et techniciens du XXII° siècle ont-ils intégré au voyage une IA (limitée) et tout un système d'hibernation. Dans les faits, les humains ne sont réveillés que par poignée pour quelques jours à peine et, seulement si l'IA est confrontée à une difficulté potentielle ou réelle qui bénéficierait de l'intuition animale.

Sunday est ainsi sur la brèche environ tous les 2000 ans. Au fil de la lecture, nous comprenons que cette fréquence est plus élevée, pour elle que pour les autres : elle possède un statut particulier aux « yeux » de Chimp, elle est sa chouchou!

La trame repose sans doute un peu moins sur la science, et davantage sur l'humain; nous assistons dans ce vaisseau à un véritable rapport de force. Ces « rapports de force » ont toujours existé dans la production littéraire de Watts; ici, il n'est plus aussi intellectuel, exigeant des prouesses cognitives et des facultés d'analyse exceptionnelles. Il repose davantage sur une intrigue opposant des humains à l'IA, et sur les personnages, notamment Sunday.

En effet, le Chimp a besoin des humains pour remplir sa mission sans fin, et par conséquent veille sur eux. Des « bons » humains, ceux en capacité de remplir la mission, sans état d'âme. Les autres, l'IA en dispose. Or, la logique humaine s'impose et, avec les millénaires défilant, les tranches de vie volées à l'immobilité, l'esprit développe une soif pugnace. Une envie de tangible, d'autonomie, d'indépendance, de vie! Ces gens éprouvent la nécessité de connaître autre chose entre ces temps morts, que ces brèves missions, et veulent des frissons, des émotions.

Toutefois, difficile pour eux de s'émanciper avec cet espion omni-conscient qui veille sur eux à travers leurs implants. En douce, la résistance se développe alors que Sunday se trouve écartelée entre deux loyautés…

chronique plus complète sur mon blog
Lien : https://albdoblog.com/2020/1..
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Eriophora de Peter Watts est un court roman ou plutôt une longue novella (comme le souligne l'auteur lui-même) qui s'inscrit dans le cycle Sunflower. Cette série comporte quatre nouvelles : L'île (le texte qui m'a donné envie de lire la présente novella), Eclat (texte disponible gratuitement sur le site du Bélial jusqu'au 18 octobre prochain), Géantes (disponible comme les deux précédentes dans le recueil Au-Delà du Gouffre toujours au Bélial) et enfin L'Autostoppeur…

L'Eriophora est un vaisseau-astéroïde qui navigue depuis plusieurs dizaines de millions d'années au sein de la galaxie avec à son bord 30 000 spores, entendez 30 000 humains spécialement conçus/formés pour ce voyage. Ces spores passent la quasi totalité du temps en stase, ils ne sont réveillés à tour de rôle et pour une durée limitée par le Chimp, l'Intelligence Artificielle du vaisseau, qu'à de rares occasions quand la nécessité s'en fait sentir. L'IA n'est pas "particulièrement futée" et a besoin de l'intuition humaine quand des problèmes dépassent ses domaines de compétence. La mission de l'Eriophora, est de construire les portails trous de verre pour qu'un jour les humains puissent s'affranchir de l'espace et du temps et voyager librement à travers les étoiles.

La routine s'installe, les réveils succèdent aux longues phases de sommeil, les spores se croisent de temps en temps pour quelques jours, plus ou moins régulièrement, selon les besoins du Chimp. Sunday Ahzmundin est l'une de ces spores. Sa relation avec l'IA est particulière voire conflictuelle. D'autant plus qu'avec le temps, une partie de la population devient paranoïaque, l'humanité n'a jamais donné de nouvelles et cette mission ne semble pas avoir de fin. La fronde gronde dans les profondeurs du vaisseau mais il est difficile de se rebeller face à une IA toute puissante qui a des yeux et des oreilles un peu partout...

Eriophora nous narre l'histoire de cette rébellion et celle des difficiles relations entre Sunday Ahzmundin et l'IA. L'éternel conflit IA/Humain n'est pas nouveau mais Peter Watts nous le sert sur une échelle de temps inimaginable et rend l'intrigue intéressante et surprenante.

L'autre point fort du roman est la psychologie des personnages. L'auteur s'affaire à nous détailler les rapports humains dans cet immense huis-clos. Il insuffle paranoïa et psychose chez les différents protagonistes rendant l'atmosphère oppressante.

Eriophora est au final un texte Hard-SF particulièrement accessible, Peter Watts vulgarisant son propos et rendant les concepts scientifiques abordables. Originale, riche en émotion cette novella fera voyager loin et longtemps. (et même un peu plus si vous trouvez le message caché au sein du roman !)


Lien : https://les-lectures-du-maki..
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*soupir de satisfaction* j'ai vraiment beaucoup aimé ce bouquin :)

Voila enfin de la belle science-fiction, à la fois profonde et si simple... Ce livre représente globalement tout ce que j'aime dans la science fiction :
- avant tout, au coeur se trouve une histoire humaine, de pseudos-humains enfermés sur un vaisseau à accomplir une tâche dont la raison profonde n'est pas franchement expliquée ici. C'est une histoire de sentiments, de bonheur, de sens de la vie, de liberté
- en toile de fond, un univers dont on soupçonne, dont on effleure, la profondeur. Avec une histoire qui se base tout simplement sur des millions d'années !

Bref, lisez le ! Ne vous laissez pas effrayer par l'étiquette hard-sf : cela veut juste dire que l'auteur est rigoureux dans la science. Mais au fond, c'est bien un roman de personnes, de voyages, de destinée, et cela donne rudement envie de lire d'autres bouquins de l'auteur !
Lien : https://www.sorties-sfff.fr/..
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