Maman disait toujours que Papi était un homme plein de bon sens.
— Il est comme ton père. Ils voient le monde en noir et blanc.
— Pourquoi ils s’entendent pas, alors ?
— Ils ne sont pas vraiment fâchés, c’est juste qu’ils ne sont pas d’accord sur ce qui doit être noir et ce qui doit être blanc. C’est pour ça qu’ils se chamaillent tout le temps.
Les femmes adorent le chocolat. N’oublie jamais ça, mon garçon. Si t’es capable de faire un gâteau, c’est encore mieux. Y a pas meilleur moyen pour se faire pardonner, je te le garantis.
Elle avait les jambes nues, et elles paraissaient plus longues que d’ordinaire. Mes notions d’arithmétique me faisaient dire que c’était dû à l’effet combiné de la minijupe et des talons aiguilles vertigineux, mais même le fait de penser aux maths en cet instant crucial n’atténua pas la réaction intense que j’eus en la voyant – dans ce costume à tomber, en plus.
...s’il y avait une chose que je savais sur les filles, c’était qu’elles veulent pouvoir porter des chaussures à talons sans pour autant faire deux têtes de plus que leur copain.
Je contemplai le reflet de la lune qui dansait sur l’eau et songeai au néant vertigineux qu’était ma vie. Je n’avais pas d’objectif à atteindre, aucun but pour lequel me battre – juste le besoin crucial de garder mon passé enfoui, assez profondément pour que je ne ressente rien.
C’était la seule solution pour éviter la souffrance.
Quand je lui effleurai le bras, le temps se suspendit. Du coin de l’œil je vis ses copines, mais impossible de les saluer : plus rien n’existait hormis ces épaules nues.
Il y avait cette fille que j’aimais bien, avant. (À présent, ma vie se divisait en avant et en après.) La fille d’avant s’appelait Yesenia et elle était dans ma classe. Je ne l’avais pas revue depuis la fin de l’année scolaire, mais pendant l’été on était restés en contact par texto et sur les réseaux sociaux, et avec tous les commentaires sibyllins qu’on avait échangés, il n’était pas exagéré de dire qu’on flirtait : « top cool, ta photo », « ha, ha, délire ! », « t’as vraiment des beaux yeux. » Ce dernier venait d’elle et lui avait été inspiré par un cliché que Maman avait pris de moi sur la plage, chez mon grand-père. J’étais debout, les pieds dans l’eau, et je contemplais le coucher du soleil.
Elle me regarda de ses beaux yeux, et j'aurais tout donné pour la protéger de la moindre injustice, du moindre désagrément auquel elle pourrait être confrontée.
Explorer ce corps devenait tout à coup l’unique but de ma vie. Je me mis à sucer sa lèvre inférieure et faillis bien me pâmer tant elle était douce et sucrée. Elle haleta. Ma langue s’enfonça dans sa bouche, plus loin, plus fort, et elle serra les poings sous mes doigts. Aussitôt j’arrêtai, craignant de la faire flipper tant ce que je ressentais était intense
J’avais toujours pensé qu’être jaloux, c’était désirer une chose que votre voisin possédait et pas vous. Par exemple, moi qui convoitais la petite amie d’un autre. Elle ne pouvait pas se dédoubler. Si elle se mettait avec moi, c’est qu’elle ne serait plus avec lui, nécessairement.