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Critique de kielosa


A part les capitales nationales comme Paris évidemment, II y a trois villes dont le nom figure dans le titre de plusieurs livres : Istanbul, Odessa et bizarrement Ostende. Bizarrement parce que comparée à Istanbul avec ses 15 millions d'habitants, à cheval entre l'Europe et l'Asie et à Odessa en Ukraine avec plus d'un million d'Odessites, point de départ pour une nouvelle existence, surtout de beaucoup de juifs, vers l'Amérique et Israel et ville natale de célébrités comme Anna Akhmatova, isaac Babel et Vladimir Ze'ev Jabotinsky, Ostende avec ses 70.600 habitants ne fait guère le poids. Et pourtant son nom est écrit en toutes lettres dans le titre d'ouvrages de Colette Cambier, Benoît Damon, Cyrille Deroulneau, Magali Duru, Patrick Devaux, Jacqueline Harpman, Arthur Loustalot, Paule Noyart, Erich-Emmanuel Schmitt et Volker Weidermann, qui ont trouvé leur place dans la bibliothèque de Babelio. Peut-être en ai-je même oublié quelques-uns?
Ce nombre est d'autant plus invraisemblable que 'la reine des plages' , surnom donné lors de la Belle Époque et du temps du roi Leopold II, est actuellement loin de sa gloire d'antan.
Une des raisons qui explique, en partie du moins, cette étrange réalité, est très probablement liée à la présence de tout un groupe d'artistes dans cette ville balnéaire dans les années 30 du siècle dernier. En effet, après la prise de pouvoir de Hitler en Allemagne, son annexion de l'Autriche et son occupation de la République Tchèque, Ostende a accuelli des réfugiés dont les noms sont immortels, tels Stefan Zweig, Joseph Roth, Egon Erwin Kisch, Herman Kesten, Irmgard Keun...et le peintre Felix Nussbaum. Tous étaient juifs, à la seule exception d'Irmgard Keun, qui était populaire mais dont les livres furent proscrits, qualifiés de trop légers par ces messieurs très sérieux de la Chambre de Littérature du Reich ('Reichsschrifttumskammer')!
L'intérêt de l'ouvrage réside avant tout dans la description de l'interaction entre ces artistes, réduits à l'exode, face à des problèmes d'argent (excepté Zweig qui aidait financièrement Roth et quelques autres), ayant des difficultés à trouver un éditeur, logeant dans des hôtels choisis en fonction de leur bourse, traînant dans des cafés et sur des terasses pour écrire ou simplement tuer le temps et inquiets pour leur famille et amis restés derrière. Sans mentionner leur angoisse de ce qu'allait apporter demain. Il va de soi que ce climat particulier suscitait aussi des relations et attitudes particulières : fausses joies, rivalités, beuveries, remarques désobligeantes, suspicions etc. Tout n'etait donc pas amitié, comme le titre original de l'ouvrage de Weidermann laisse supposer. Bien que, comme dans les romans, il y avait aussi de la place pour l'amour, notamment entre Keun et Roth.
Un livre qui couvre exactement le même sujet, mais qui n'est malheureusement pas encore traduit en français, est celui d' Els Snick, qui traduit librement donnerait :"Ou cela me fait mal c'est dans ma patrie" (en néerlandais 'Waar het me slecht gaat is mijn vaderland'). L'auteur est professeur à l'Université de Gand en littérature allemande et fondatrice-présidente de l'Association Joseph Roth de Belgique et des Pays-Bas. A en juger par cet ouvrage et d'autres écrits d'elle, je crois que très peu de la vie et de l'oeuvre de Joseph Roth lui soit inconnu. Un ouvrage que je recommande vivement sur ce grand maître de la littérature germanophone, en pleine redécouverte d'ailleurs, dès sa parution en France
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