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Pierre Leyris (Autre)
EAN : 9782070701032
210 pages
Gallimard (22/02/1984)
4.15/5   543 notes
Résumé :
Les montagnes du Massachusetts à la fin du XIXe siècle. Ethan Frome est un jeune homme pauvre qui aime les livres et rêve de voyages. Il a hérité d'une ferme et d'une scierie qui ne rapportent rien, épousé une vieille cousine hypocondriaque. Et, sans comprendre ce qui lui arrive, il tombe amoureux pour la première fois. En trois jours, sa vie va basculer. Même la mort ne voudra pas des héros de cette tragédie rurale, chef-d'oeuvre atypique d'Edith Wharton.
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Critiques, Analyses et Avis (128) Voir plus Ajouter une critique
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Edith Wharton signe avec son Ethan Frome une longue nouvelle d'exception. Ce terme « d'exception » est souvent galvaudé, tant on fait crouler les oeuvres sous des superlatifs tous plus ronflants les uns que les autres. Alors, quand on se hasarde à vouloir utiliser des épithètes ultimes, fatalement, on risque de servir un vilain jus de radis tiède, là où l'on espérait produire un brûlant élixir, un nectar, deux hectares, même ! Qu'importe, je maintiens mon superlatif pour ce livre.

Je n'ai pas peur d'affirmer que d'un point de vue filiatif, cette nouvelle constitue le chaînon manquant entre Maître et Serviteur de Léon Tolstoï et Des Souris et des Hommes de John Steinbeck, rien que ça, excusez du peu.

Il est assez incroyable, en effet, qu'Edith Wharton, plus habituée aux salons mondains des grandes villes qu'aux rudes campagnes, ait su trouver le souffle, l'élan, la crédibilité nécessaires à la mise sur pied de cette fulgurante histoire de campagne et de climat septentrional, où, je vous assure, on sent le vent froid s'engouffrer sous nos vêtements, on sent les courroies de cuir et l'haleine blanche des chevaux fatigués sur ces mauvais chemins pleins de neige.

Qui est Ethan Frome ? Pourquoi est-il si boiteux, si vieilli, si contrefait ? de quel mal la cicatrice qui barre son visage est-elle la marque ? Que cache-t-il dans ses silences, dans ses gestes douloureux, mille fois répétés depuis des décennies ? Comment parvient-il à vivre encore dans cette misérable ferme dépourvue de tout ?

Qui sont ces femmes qui vivent recluses dans sa maison ? Quel destin semble assez impitoyable pour leur assigner pareille non vie ? le coeur d'Ethan a-t-il toujours été aussi sec et rabougri qu'il semble l'être à présent ? Quels battements a-t-il connu, bien des années auparavant ? Et pourquoi tous et toutes semblent tourner la tête, au village, lorsqu'on leur demande des précisions sur Ethan Frome ?

Aurez-vous le coeur et l'âme à vouloir affronter les frimas piquants d'un hiver dans le Massachusetts au tournant du XIXème siècle avec le suivant ? Aurez-vous assez d'estomac pour encaisser toute l'amertume accumulée dans la vie, le destin et les veines d'Ethan Frome ?

Qu'est-ce donc que cet étrange sentiment qu'est l'amour ? Que peut-il nous faire faire ? ou ne pas faire ? Comment nos personnalités sont-elles influencées par nos corps ravagés ? Que peuvent le temps et les hasards de l'existence sur notre tempérament ?

Si vous brûlez de le savoir, alors lisez Ethan Frome d'Edith Wharton. D'après moi, une orfèvrerie narrative, psychologique et littéraire, telle qu'on en rencontre peu, dans une vie de lectrice. Mais bien sûr, de cela comme du reste, c'est à vous d'en décider, car voilà ici compilées les minces conclusions de mon misérable avis, c'est-à-dire, bien peu de chose.

N.B. : je ne sais pas si c'est toujours le cas dans les éditions plus récentes, en tout cas, sur mon édition dans la collection L'Imaginaire de Gallimard, première époque, donc, la quatrième de couverture est un véritable scandale : elle divulgue des morceaux importants et essentiels de l'intrigue que l'auteure s'est justement employée à faire découvrir progressivement au lecteur. Donc, si rien n'a changé, surtout, surtout, surtout ne lisez pas cette accroche avant votre lecture.
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Massachusetts – Un petit village en zone rurale – Début du 20e siècle.

Le narrateur, ingénieur en mission dans la région, est intrigué par cet homme, Ethan Frome, qu'il croise chaque jour à la poste durant cet hiver glacial. Grand, difforme, une balafre défigurante, un simple salut, rien de plus. Les gens sont peu bavards dans le coin, mènent une vie dure et austère.

Un accident. Un drame.

Obligé d'effectuer des déplacements quotidiens pour son travail, le narrateur est bloqué au village à cause des chutes de neige et des congères qui empêchent la circulation. Ethan Frome, fermier pauvre, également propriétaire d'une scierie peu rentable, lui propose ses services, ceux de sa charrette et de sa vieille rosse. de jour en jour, malgré les silences – ou grâce à eux – la confiance s'installe et l'ingénieur finit par connaître l'inimaginable réalité.

Vingt-cinq ans auparavant, Ethan venait de perdre son père, et sa mère, malade, avait besoin d'aide. Ainsi entre dans la ferme, Zeena qui se rend aussitôt indispensable. Ethan l'épouse à la mort de sa mère. Elle se révèle alors hypocondriaque, plaintive, et mène la vie dure à son jeune mari jusqu'à exiger à son tour une aide familiale. Mattie Silver, orpheline sans ressources, de bonne humeur et travailleuse malgré une santé fragile, devient un rayon de soleil pour Ethan, de plus en plus taciturne tant les besoins en médicaments et les visites médicales de son épouse grèvent un budget déjà misérable. Après plus d'un an de bons et loyaux services, le renvoi, totalement inattendu, de Mattie par une Zeena soupçonneuse et machiavélique est à l'origine du drame.

C'est l'histoire, poignante, d'un amour impossible, d'un huis clos magistral, d'une manipulatrice démoniaque, de non-dits accablants et de la lutte entre les sentiments et le devoir. L'exploit d'Edith Wharton réside dans l'histoire qu'elle tisse autour d'un fait divers aux conséquences funestes qui s'est produit dans la région, en hiver, avec une luge. le scénario qu'elle élabore, tout en pudeur et en sobriété, donne une puissance émotionnelle incroyable à ce roman écrit en 1911, où les moeurs sont codifiées, où la retenue des personnages n'a d'égale que leurs tourments intérieurs.

On ne sait rien de ce qu'il s'est passé durant les vingt-cinq ans après l'accident, avant la rencontre entre le narrateur et Ethan Frome, brisé dans son coeur et dans son corps.

Véritable coup de coeur, j'ai rarement lu quelque chose d'aussi intense, d'aussi tragiquement humain.

L'écriture parfaite, efficace, opposant la magnificence des paysages enneigés à l'âpreté des gens isolés des mois durant, fait merveille.

Edith Wharton est une écrivaine américaine (1862-1937) issue de la grande bourgeoisie new-yorkaise, francophile et voyageuse, à l'imagination débordante, a commencé à écrire dès l'adolescence, de la poésie d'abord qu'elle publie à compte d'auteur, puis, qui sont publiés dans divers journaux. Elle fait construire une maison dans le Massachusetts et s'y installe avec son mari mais elle préfère voyager et Paris et Londres deviennent ses lieux de prédilection. Durant la Première Guerre mondiale, elle crée des hôtels pour réfugiés et collecte des fonds sans relâche. Elle sera décorée de la Légion d'Honneur. Elle meurt des suites d'une crise cardiaque à 75 ans et est enterrée au cimetière paysager des Gonards à Versailles.

Régulièrement réédité, ce livre date de 2014, publié aux éditions POL dans une nouvelle traduction de Julie Wolkenstein.

Brillantissime.
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Une lecture ancienne dont je me souviens encore un peu : l'atmosphère étouffante de la campagne, avec la rumeur qui obsède tout le monde ou presque ; le huis clos, plus étouffant encore, dans la maison de Frome, où chaque détail se remarque presque immédiatement ; la maladie : tout le monde est malade à la fin du roman, à l'exception de Zeena, qui croit toutefois l'être ; le duel entre Ethan et Zeena, qui se doute peut-être de quelque chose, mais prend finalement le pouvoir.
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♫Avec le temps...
Avec le temps va tout s'en va
On oublie les passions et l'on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard surtout ne prend pas froid♫
Léo Ferré-1971-

Avec l'Ethan, tu vois Orion là-bas
Aldébaran dans le panorama
Avec l'étang, ou la lune dans le lac
tout cet amour va te rendre patraque
Avec les taons, pique-nique platonique
Satan l'habite, un jeu démonique
Ethan pis, ment, si tu te l' interdis,
Ethan pis, rogue, si tu le détruis...
ton jeu de Mot Hue Nique.

On dirait vraiment un tableau !
Ethan eut l'impression qu'on ne pouvait pousser plus loin l'art du commentaire, et que, enfin des mots étaient mis sur ce qu'il éprouvait au plus secret de son âme. p 51
Frustrations, sentiments, effusions
confusions, complications et .....collisions.

Bravo à cette interprétation d'Edith Wharton magistrale
Sûr, j'aurais aimé pouvoir la lire en version originale.



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Ethan Frome, ou la chute inexorable d'un pauvre diable autrefois jeune et vif vers un destin désespérant, dans lequel les charges de la pauvreté conjuguées à une épouse odieuse éteindront une à une toutes les lumières de son avenir : l'accomplissement, la liberté, l'amour, jusqu'à l'envie de vivre.

Où diable va donc Edith Wharton puiser le talent de mettre une écriture aussi belle, précise, douce comme du velours, au service d'une si épouvantable tragédie, à la construction implacable ?

Tout est saisissant dans ce roman : le froid mordant de l'hiver sur les collines de ce recoin miséreux du Massachussets, le huit-clos théâtral entre les trois protagonistes, la violence des non dits, les contrastes de lumières (la flamme chaude de la bougie de la cuisine dans la noirceur de la nuit hivernale), de caractères (Mattie la douce et vive contre la démoniaque et morbide Zeena ferrant son doigt fielleux dans les frustrations douloureuses d'Ethan), de mouvements aussi (le balancement inexorable du rocking chair de Zeena face à l'envolée libératrice de la luge…)

Il est impossible de ne pas compatir devant la faiblesse de ce brave type, de ne pas frémir devant l'enchaînement des événements, depuis la maladie de ses parents qui l'enchaînent à la scierie, la perversion d'une épouse qui n'aura de cesse de lui pourrir la vie jusqu'au drame de la « collision », qui ont fait de lui l'homme littéralement brisé par la vie que l'on rencontre au début du livre.

Et c'est tellement bien écrit ! Ce roman m'a subjuguée.
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critiques presse (2)
Actualitte
24 septembre 2014
Vous allez découvrir un roman superbe, une histoire merveilleusement contée, une vie en cette fin de XIXème siècle dont la dureté n'a d'égale que la rigueur de l'hiver, un village qui regarde la rue derrière ses volets clos et s'empresse de taire l'indicible, l'inavouable [...].
Lire la critique sur le site : Actualitte
Telerama
09 juillet 2014
Une centaine de pages suffit à la romancière pour déployer sa tragédie, inscrite dans le paysage désolé d'un Massachusetts comme en proie à une glaciation éternelle. C'est âpre, funeste, poignant – on en ressort tout à la fois inconsolable et ébloui.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (59) Voir plus Ajouter une citation
Il garda les yeux fixés sur elle, admirant la manière dont son visage se transformait à chaque détour de la conversation, comme un chant de blé sous une brise d'été.
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"Je suis beaucoup plus malade que tu ne penses. [...]
" J'ai des complications."
Ethan mesurait l'importance exceptionnelle de ce mot. Presque tout le monde dans le voisinage avait des "problèmes", clairement localisés et spécifiques; mais seule une élite avait des "complications". En avoir constituait une distinction honorifique, même si, dans la plupart des cas, cela signifiait votre arrêt de mort. Les gens combattaient pendant des années leurs "problèmes", mais ils succombaient presque toujours à leurs "complications".
P136
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Voir ainsi une jeunesse pleine d'espoir faire irruption dans sa maison, c'était comme allumer un feu dans un âtre froid. Mais il n'y avait pas que cela. La jeune fille était davantage que la créature extrêmement serviable qu'il avait discernée en elle. Elle ouvrait grands ses yeux et ses oreilles : il pouvait tout lui montrer, tout lui expliquer, et savourer le bonheur de voir toutes les connaissances qui lui transmettait laisser en elle des répercussions et des échos durables qu'il pouvait ressusciter à volonté.
p49
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Ce n'était pas que Mrs. Ned Hale ressentît ni affectât aucune supériorité sociale à l'égard des gens qui l'entouraient ; c'était simplement que sa sensibilité plus aiguisée, accidentellement conjuguée à une éducation un peu poussée, avait créé entre elle et ses voisins une distance tout juste assez grande pour lui permettre de les juger avec détachement. Elle ne se faisait pas prier pour exercer cette faculté, et je nourrissais ardemment l'espoir qu'elle me livre les épisodes de l'histoire d'Ethan Froome qui me manquaient, ou du moins une sorte de clef qui m'expliquerait le personnage et me permettrait de relier les faits dont je disposais.
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Cette aube d'hiver était transparente comme du cristal. Le soleil se lavait tout rouge dans un ciel pur. A l'orée du bois les ombres s'étalaient, profondes et bleues. Pa delà la scintillante blancheur des champs, les futaies lointaines s'estompaient en masses vaporeuses.

Frome aimait cette heure matinale, si paisible. A mesure que ses muscles s'assouplissaient pour la tâche quotidienne et que ses poumons aspiraient à longs traits l'air de la montagne, sa pensée devenait plus lucide.
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Videos de Edith Wharton (33) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Edith Wharton
https://www.laprocure.com/product/1525906/chevaillier-louis-les-jeux-olympiques-de-litterature-paris-1924
Les Jeux olympiques de littérature Louis Chevaillier Éditions Grasset
« Certains d'entre vous apprendrez que dans les années 1912 à 1948, il y avait aux Jeux olympiques des épreuves d'art et de littérature. C'était Pierre de Coubertin qui tenait beaucoup à ces épreuves et on y avait comme jury, à l'époque, des gens comme Paul Claudel, Jean Giraudoux, Paul Valéry et Edith Wharton. Il y avait aussi des prix Nobel, Selma Lagerlof, Maeterlinck (...). C'était ça à l'époque. C'était ça les années 20. Et c'est raconté dans ce livre qui est vraiment érudit, brillant et un vrai plaisir de lecture que je vous recommande. » Marie-Joseph, libraire à La Procure de Paris
+ Lire la suite
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