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Le quatuor de Jérusalem tome 1 sur 4

Jean-Daniel Brèque (Traducteur)Gérard Klein (Préfacier, etc.)
EAN : 9782221101278
312 pages
Robert Laffont (04/01/2005)
4.06/5   32 notes
Résumé :
Un anachorète albanais égaré dans le Sinaï, Skanderberg Wallenstein, découvre par accident le manuscrit le plus ancien de la Bible. Horrifié par sa lecture, il épuise sa vie à fabriquer le plus grand faux de l'Histoire. Afin que la Bible demeure telle que nous la connaissons. Un lord anglais excentrique, Plantagenêt Strongbow, duc de Dorset, rompt avec les coutumes bizarres de sa famille et parcourt nu les déserts du Moyen-Orient avant d'écrire une somme sur le sexe... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Qu'est ce qui fait la postérité d'une oeuvre ? Quel est donc ce déclic mystérieux qui décide qu'une oeuvre devienne culte et qu'une autre prenne la poussière ?

Je ne parle pas là des best-sellers encombrant les têtes de gondoles, certains agréables d'autres de plomb mais qui partagent l'assurance d'un oubli quasi certain. Non je parle de ces oeuvres qui s'incrustent dans les mémoires collectives et acquièrent un statut inaltérable.

Voilà une question que Edward Whittemore a dû se poser quelquefois, voyant son QUATUOR DE JÉRUSALEM grossir les invendus et les étals des bouquinistes.

De fait, il est extrêmement ardu de mettre la main sur LE QUATUOR sans passer par les fourches Caudines d'un site en ligne qui met en avant de farouches guerrières se sectionnant le sein pour mieux tirer à l'arc.

Edward Whittemore est né en 1933 et mort prématurément en 1995. Il fut agent de la CIA, barman, et finit sa vie dans une relative indigence à effectuer des taches de merde administratives dans un cabinet d'avocat.
Pendant sa période CIA, Edward a entamé la rédaction de sa (bien peu) fameuse tétralogie le QUATUOR DE JÉRUSALEM.

Ces quatre romans ambitionnent rien moins que raconter l'Histoire du monde, sur la base d'un malentendu énorme : la Bible, apprenez-le, n'est qu'un tissu de fables inventées par un dément aveugle et dictée à un simple d'esprit - entièrement réécrit ensuite par un moine dingo soucieux de préserver le dogme. Complots, agents doubles, révélations mythiques, tourbillonnent autour de la Ville du Livre, celle-ci devenant l'enjeu d'une partie de poker qui durera une douzaine d'année...

Ed en a vendu 3000 exemplaires. En tout. Pour l'ensemble des quatre volumes.

Ce qui est particulièrement injuste si vous voulez mon avis. LE QUATUOR fut édité en France par la collection Ailleurs et Demain de Gérard Klein, grand éditeur de SF (et bon écrivain itou). Qu'il en soit remercié. Mais LE QUATUOR n'est pas de la SF. LE QUATUOR est... Et bien... je ne sais pas trop.
Autant vous le dire tout de suite, la qualité littéraire du QUATUOR est inversement proportionnelle à la laideur invraisemblable des couvertures.

Voilà un livre épicé, coloré, riche en vocabulaire, semé de noms propres improbables, de faux personnages historiques et de vrais personnages de contes, volontiers elliptique... pour tout dire la plume de Whittemore fait appel à l‘intelligence du lecteur, ce qui, on le sait, est un pari audacieux.

Ce premier volume est enlevé, parfois franchement barré, un mélange savant de Tex Avery burlesque, d'érudition précise (mais non précieuse) et de mysticisme lié au désert, aux religions qui s'entrechoquent, à la folie inhérente au Moyen Orient.

Sous le déluge d'humour absurde, l'on sent qu'il connait son sujet Ed et qu'il a bien retenu ses leçons d'histoire à Yale.

Ce livre est touffu, parfois trop, mais réussit à happer le lecteur qui fait l'effort de poursuivre.

Il faut bien l'avouer, lire le QUATUOR demande un réel effort. Oubliez la narration logique : départ du point A pour arriver au point B tout va bien... La logique n'est pas le fort de Whittemore et les digressions s'invitent plus qu'à leur tour.

Le deuxième tome amplifie ce mouvement : En avant Guingamp dans la démesure et la bouffonnerie Whittmore part du principe que tout est possible à Jérusalem et tout y arrive. Ville qui permet toutes les folies, qui couve la déraison.

Ce deuxième tome est encore plus barré que le premier (et c'était pas gagné) voire étrange. On y sent poindre aussi une certaine mélancolie.

J'ai une théorie. Je crois fermement que l'humeur de Whittemore, amer de voir son grand oeuvre se vendre encore moins que "Le macramé dans l'histoire", se ressent dans son style. Les pages se font moins alertes, moins ouvertement absurdes mais plus empreintes d'une tristesse sourde.

Ce n'est pas encore trop prégnant dans ce deuxième volume mais cette sensation explose dans les paragraphes du troisième opus. Troisième volume du QUATUOR, écrit cinq ans après le deuxième, OMBRES SUR LE NIL cumule les superlatifs. Plus gros, plus beau - couverture exceptée, ahem... comment dire ? -, plus déprimé, plus triste et plus fou, ce roman [?] renoue cependant avec une certaine normalité littéraire en s'affranchissant totalement des éléments bizarro-sciencefictifs qui jalonnaient les deux précédent.

Whittmore n'a jamais voulu vendre. Il n'accordait pas d'interview et n'a jamais donné dans le easy reading. Mais je précise (et cela n'engage que moi) : s'il n'a jamais voulu vendre des containers entiers de son roman, s'il n'a jamais rien fait pour produire un bon gros best-seller à base de recettes éprouvées, il n'avait rien contre une réussite imprévue, au moins un succès d'estime. Mais cette indifférence, ce néant total, cette absence quasi cosmique, je pense qu'il l'a mal vécu. Et ça se lit entre les lignes. le ton se fait plus dur, plus désespéré.

Fini la bouffonnerie absurde. Toujours foisonnant de personnages, ce livre mélancolique déroule un synopsis classique et un dénouement cohérent. Il faut avoir le goût des digression cela dit, ne rien avoir contre des détours nombreux. Si vous voulez de l'action pure, du Jack Bauer en mode adrénaline, ce n'est pas le genre de la maison !

Ces trois tomes sont étroitement liés. Ils ne peuvent se lire indépendamment et forme un tout. Ce n'est pas le cas du dernier livre.
Whittemore délaisse les protagonistes des premiers romans et déroule une histoire plus classique, moins touffue et à vrai dire je trouve cet opus le plus réussi.

Nous sommes là dans l'univers de l'espionnage documenté voire documentaire. Inspiré d'un réel agent double, Ed déploie toute sa connaissance du terrain, il connait ces déserts, il les a arpenté, il sait l'agencement d'opérations d'infiltration d'envergure. Il nous détaille le ressac sans fin des conflits opposant les Arabes aux juifs.

À travers les tourments du Coureur, qui ne sait plus s'il est un Israélien espionnant la Syrie ou un espion syrien, se dégage une ultime conviction : il est un « Oriental » que ses racines lient irrévocablement à un désert disputé et inspiré. Whittemore rêve : celui, sur cette terre pétrie de sang et de symboles, d'une société apaisée, multiculturelle et multiconfessionnelle. Un rêve pareil à la Ville sainte : inaccessible.

Très beau livre. J'ai beaucoup aimé les 3 premiers, mais celui là a ma préférence. je le conseillerai à ceux qui veulent s'immerger dans l'univers de cet écrivain hors norme, inconnu. Lire Whittemore nous donne l'impression d'appartenir à une société secrète, on se sent privilégié et c'est là le plus bel hommage que je puisse lui faire.

Je laisse le mot de la fin à Tom Robbins, autre écrivain :

"L'oeuvre de Whittemore est l'un de secrets les mieux gardés de la littérature américaine (...) comparable à un bol de pudding au haschisch : riche, sombre, goûteux, amusant, vénéneux, révélateur, avec un parfum d'exotisme et de danger. "

Lien : https://micmacbibliotheque.b..
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J'ai lu les quatre tomes il y a déjà bien longtemps, et je voulais contribuer aux 5 étoiles de cette épopée incroyable et inédite. Jamais un tel sujet n'a été si bien écrit et réalisé. Il est dommage que ces livres n'aient pas eu le succès qu'ils auraient du avoir, que l'auteur n'ait pas reçu assez de lauriers très mérités. Les livres auraient du avoir un écho beaucoup plus grands tant les sujets abordés sont brulants d'actualité. Les deux premiers tomes sont à lire absolument; les deux suivants sont moins captivants. Il faut lire le Quatuor de Jérusalem, il ne faut pas passer à coté.
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Peut-être LE grand roman du Moyen-Orient, par un ex-agent de la CIA inspiré et subtil (1).

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2014/12/29/note-de-lecture-le-quatuor-de-jerusalem-edward-whittemore/
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Ouah! le titre est trop cool!
...
? Allez encore 50 pages.
...
Nul. A part le titre.
Mon avis.
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Je prends note des judicieux conseils de Annie
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Pardon, on va reprendre au début. Pose-moi une question.
Maud lui prit la main et sourit.
Que voudrait voir ton père s’il était ici aujourd’hui?
Sûrement le désert. Nous devons fuir cette ruche qu’est Jérusalem, avec ses foules de fanatiques religieux. Tu as vu ce type qui fait les cent pas en haut des marches de la crypte?
Oui.
Eh bien, ça fait deux mille ans qu’il fait son petit numéro qu’il marche et marmonne sans trêve ni repos. Comment pourrions-nous rester lucides dans une ville où il se passe ce genre de choses?
Qui t’a raconté cela?
L’histoire de l’homme en haut des marches? Mon ami le sorcier. Et il sait de quoi il parle, car il n’a cessé de l’observer durant tout ce temps-là. Au début de chaque siècle, il va le voir pour jeter un coup d’oeil et faire un tour d’horizon de la situation, mais celle-ci est toujours la même. Mais qu’en penses-tu, veux-tu que nous allions dans le désert? Je n’y ai jamais mis les pieds, mais le vieil Arabe affirme que c’est l’endroit idéal pour se remplir l’âme. Ça fait dix siècles qu’il part régulièrement en hadj, et il dit qu’il n’y a rien de tel que le désert au printemps, à cause de toutes ces fleurs sauvages et tout ça. On y va?
Oui, mon amour, ce doit être un endroit merveilleux, et je pense que nous devrions y aller.
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Certaines œuvres, certains romans mais aussi des nouvelles, échappent au domaine de la science-fiction, si extensive que soit la définition qu'on donne de cette espèce littéraire.
Cependant, elles semblent par construction destinées surtout aux lecteurs de science-fiction, voire parfois à eux seuls, tant elles échappent aux conventions habituelles de la littérature dite générale. Elles développent une sorte d'élaboration rationnelle poussée jusqu'aux frontières de l'absurde, voire du délire paranoïaque, tout en s'affirmant avec une jubilation ironique comme de la fiction.
En d'autres termes, elles renoncent avec allégresse aux séductions du mentir-vrai, de la vraisemblance et de la copie plus ou moins conforme de la réalité commune, pour exalter les saveurs plus fortes de l'invention débridée, de l'histoire énorme, de la tall story des Anglo-Saxons. Elles sont trop incroyables pour se réclamer du réalisme et trop logiques pour procéder de l'onirique ou du fantastique. Bien entendu, elle font grincer les dents des lecteurs académiques et mettent parfois du temps à s'imposer. On ne peut pas les prendre au sérieux et pourtant elles sont tragiquement sérieuses par ce qu'elle révèlent de l'absurdité irrémédiable de la condition humaine.
[...] Impossible de prendre au sérieux ces textes et ces auteurs et pourtant ils sont terriblement sérieux dans ce qu'ils nous révèlent des faux-semblants du monde et de notre insondable propension à la crédulité.

[Préface de Gérard Klein]
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L'homme a tendance à projeter sa propre cause sur la cause de l'humanité. Ainsi, un cordonnier voit le monde comme une chaussure et s'estime comme seul responsable de l'état de sa semelle.
Un naturaliste ayant suffisamment d'esprit pour comprendre qu'il a évolué vers l'âge adulte en sélectionnant ceci plutôt que cela, ou cela plutôt que ceci, estime que toutes les espèces vivantes ont procédé de la même façon. Enfin, un philosophe politique aux intestins bloqués et figés considère le passé comme pesant et indigeste, et pense que l'avenir sera nécessairement le théâtre de bouleversements explosifs trouvant leur origine dans les régions ou les classes inférieures.
Certes, ils ont l'un comme l'autre théoriquement raison en ce qui les concerne, ce qui signifie que chacun de nous a raison lorsqu'il se décrit lui-même.
Vu par un cordonnier, le monde est un soulier. L'homme évolue vers l'âge adulte, et il est probable qu'une occlusion intestinale débouche sur une explosion. Mais on ne doit pas laisser ces innombrables actes individuels occulter ce dont ils ne sont que des éléments, à savoir un univers chaotique dont la démence ne connaît pas de bornes.
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Il ne pouvait pas survivre aux mitrailleuses anonymes, ce monde, ni aux tanks sans visage, ni aux nuages de gaz empoisonné qui ont tué sans discernement les braves et les couards, les forts et les faibles, les bons et les mauvais, tous ensemble, de sorte que votre identité, votre nature n’avaient plus d’importance. Oui, leur monde est mort, et nous devions en avoir un nouveau, et nous l’avons eu, nous avons eu notre nouveau siècle en 1918, et Smyrne a été son acte fondateur, le prélude à tout ce qui devait suivre.
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Ce manuscrit trouvé dans le désert était ainsi fait, de pages de sable où les traces de pas s’estompaient sans cesse, où la trame de l’Histoire était tissée dans le plus magique des désordres, toute de nœuds imprévus et de motifs spéculaires, et les ombres sacrées de la foi y étaient tantôt allongées, tantôt raccourcies, par un soleil agité et une lune capricieuse.
Car dans cette Bible, la plus antique de toutes, le paradis n’était jamais du bon côté du fleuve, ce n’était jamais le bon peuple qui le cherchait, jamais le prophète attendu qui le prêchait, et les événements historiques s’y déroulaient toujours avant ou après le moment fixé par l’Histoire, à moins qu’ils n’aient tous lieu en même temps.
Une telle confusion vous engourdissait, vous plongeait dans une perplexité annonciatrice de démence. Un texte circulaire, une antichronique, calmement contradictoire, suggérant l’infini.
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