Jusqu'à la fin de ma vie ces jours resteront gravés dans ma mémoire... Jamais je n'ai été aussi heureuse, et proche de moi-même. Je me suis découverte... Clément a fait naître en moi la femme que trop longtemps j'avais laissée cachée sous ma carapace de petite fille abîmée. Et cette femme me plaît.
p.168 Je ne te demande qu'une chose. D'être toujours heureuse même si parfois la vie peut te sembler difficile et injuste. La vie est merveilleuse ! Je l'ai découvert avec toi. Ce qui est formidable avec elle, c'est qu'elle nous réserve toujours des surprises et que, chaque matin, tu peux la transformer selon tes désirs. Fais de ta vie ce que tu veux qu'elle soit ! Comme le dit si bien notre ami Charles : "La vie est une aventure jolie, heureux qui sait la chanter..."
Tu es l’enfant que je n’ai pas eu, celui que j’aurais dû avoir si le monde n’avait pas basculé dans la folie.
Elle est là pour éclairer de sa jeunesse mes derniers élans de vie, et moi pour lui permettre de se pardonner et de s’aimer enfin.
Il faudra qu’un jour je lui parle de la guerre et du poids que je porte… Je sais qu’il y viendra à son tour. Ses silences sont chargés de souvenirs dont il n’a semble-t-il jamais parlé. Peut-être l’aiderai-je à se libérer… Ou bien ce sera lui qui ouvrira ma cage et me donnera l’absolution.
J’ai survécu. Et pourtant je suis mort… Plus rien ne sera comment avant. Je comprends que la vie ne sera désormais qu’une mauvaise farce et que, jusqu’à ma fin, je ne serai plus qu’un mort vivant.
En me couchant cette nuit-là, je sais que quelque chose d'indéfinissable nous unit. Et pour le vieil homme sans famille que je suis, elle est désormais la petite-fille que j'aurais du avoir à mes cotés.
Demain, même si les médecins m’ont interdit de quitter le lit avant une semaine, j’aurai la force d’affronter la fatigue pour voir le sourire de Clara. Je ne sais pas pourquoi je m’accroche à cette enfant comme à une planche de salut, comme à la dernière joie qui me reste… Qu’avons-nous à nous dire, tous les deux ? Qu’ai-je à lui apporter, moi, vieux déporté sans famille, avant de quitter cette terre ? Je l’imagine dans ce décor, installée dans ce fauteuil, moi dans mon lit écoutant du Chopin ou chantant du Trenet… (p. 64)
C’est un court roman mais un concentré d’émotions.
J’ai adoré la plume de Léa, c’est un magnifique premier roman touchant, émouvant, qui parle de culpabilité, de colère, de regrets mais aussi de bonheur, de tendresse, d’amour et de pardon.
Je me suis attachée aux personnages et c’est quelque chose de rédhibitoire pour que j’apprécie ma lecture.
Clara, l’héroïne de l’histoire, est une jeune femme décalée dans son époque, qui aime écouter Charles Trénet et la littérature classique, qui a souffert du mal-être de sa mère durant son enfance et qui n’a jamais connu ses grands-parents et en a souffert.
Clément, le vieux qui déjeunait seul, ancien résistant et déporté, a perdu l’amour de sa vie durant la guerre, n’a jamais retrouvé l’amour et regrette de n’avoir jamais eu d’enfant. Il est lui aussi passionné de littérature et de beaux livres. Il vit beaucoup dans le passé.
Il est le grand-père qu’elle n’a jamais eu et elle est la petite fille qu’il aurait rêvé avoir. Ils ont en commun les fantômes du passé qui les empêchent d’être heureux.
Clara et Clément se connaissent sans se connaître, ils se croisent chaque lundi dans le restaurant où elle est serveuse et où il vient déjeuner chaque semaine. Ils ne se sont jamais véritablement parlé. Un jour, ils vont enfin oser se parler ...
Et il y a aussi Bastien, le barman du café où Clara aime se rendre, qui refuse de s’avouer attiré par cette jeune femme qui a elle-même des relations compliquées avec les hommes.
Ce roman à 3 voix est un véritable conte des temps modernes que j’ai adoré et qui m’a fait un bien fou !
Les mots de Balzac tout naturellement reprennent leur place dans ma mémoire, comme de vieux amis qui savent mes blessures… Dieu, comme je me sens seul et vieux ! Pourquoi, sur le point de quitter la vie, ai-je tant de mal à supporter cette solitude que j’ai pris tant de soin à entretenir pendant toutes ces années ?