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François Mauriac (Préfacier, etc.)
EAN : 9782707304070
175 pages
Editions de Minuit (01/09/1958)
4.43/5   734 notes
Résumé :
"Ce que j'affirme, c'est que ce témoignage qui vient après tant d'autres et qui décrit une abomination dont nous pourrions croire que plus rien ne nous demeure inconnu, est cependant différent, singulier, unique... L'enfant qui nous raconte ici son histoire était un élu de Dieu. Il ne vivait, depuis l’éveil de sa conscience, que pour Dieu, nourri du Talmud, ambitieux d’être initié à la Kabbale, voué à l’Eternel. Avions-nous jamais pensé à cette conséquence d’une hor... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (80) Voir plus Ajouter une critique
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Un récit indispensable. La mémoire peut flancher, les écrits eux rappellent ce que la folie humaine peut engendrer. Elie Wiesel fut interné à Auschwitz-Birkenau avec sa famille puis se fut le camp de Buna avec son père. Et alors que la débâcle allemande se rapproche, la terrible marche de la mort vers Buchenwald.
Wiesel nous décrit cet enfer, ces abominables souffrances infligées, la faim qui vous rend fou, le froid qui vous gèle jusqu'aux os, les coups, les brimades infligés au hasard, la terrible sélection qui vous envoie vers les chambres à gaz. Il nous parle aussi du désespoir, de la colère vers un Dieu aveugle devant ce génocide. de la honte aussi, de penser un seul instant que le père qui vous maintient en vie devient un fardeau.
Wiesel n'occulte rien, ne juge pas, sait parfaitement qu'aucun texte ne pourra témoigner de ce que furent les camps de concentration. Mais grâce à lui, à Primo Levi et tant d'autres, c'est de notre devoir de faire passer ces témoignages. C'est le moins que l'on puisse faire.

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"L'oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n'est responsable de leur première mort,  nous le sommes de la seconde."

***

Dire l'indicible… 
Nommer l'innommable…
Transmettre l'intransmissible…


Membre de la communauté juive orthodoxe de Sighet, une petite ville de Transylvanie, Elie Wiesel a 15 ans lorsqu'en 1944 il est déporté  avec sa famille à Auschwitz.

"Devant nous, ces flammes. Dans l'air, cette odeur de chair brûlée. Il devait être minuit. Nous étions arrivés."

Une fois descendus du train, ils subissent l'étape de "sélection" :  femmes, enfants, personnes âgées ou infirmes d'un côté et hommes valides de l'autre. Ceux jugés "inaptes" au travail sont directement emmenés vers les chambres à gaz. L'adolescent l'ignore encore mais il ne reverra plus jamais sa mère ni sa plus jeune soeur.

Mentant sur leur âge, lui et son père échappent à la sentence de mort immédiate. Conduits de baraque en baraque, ils sont déshabillés, entièrement tondus, désinfectés ,douchés puis affublés de vêtements qui jadis appartenaient à d'autres. Eux, que sont-ils devenus ?

"En quelques secondes, nous avions cessé d'être des hommes."

Bientôt réduits à un simple matricule, livrés à la fureur des Kapos,  ils resteront sur place trois semaines avant d'être affectés à l'un des kommandos de travail du camp de Buna.

Cris, injures, menaces, averses de coups, exécutions publiques, la violence règne en maître.  Les esprits sont pétrifiés, les coeurs anesthésiés et les âmes déshumanisées.

"Il y avait longtemps que ces corps desséchés avaient oublié la saveur amère des larmes."

Si Dieu tout-puissant existe, où se trouve-t-il? Comment peut-il rester silencieux face à ce spectacle de l'horreur? Cri étouffé d'indignation et de révolte; la foi du jeune homme vacille. 

Les troupes Alliées progressant sur les territoires du Reich, il est bientôt donné l'ordre d'évacuer le camp. S'ensuit alors une effroyable "marche de la mort" en direction de Buchenwald. le père d'Elie,comme tant d'autres, y laissera la vie.

*

Devenu l'ombre de lui-même, seul survivant de sa famille, Elie Wiesel (1928-2016) s'est retranché derrière le silence pendant dix ans avant de pouvoir mettre en mots son expérience concentrationnaire.

Plus qu'une catharsis, écrire et prendre la parole sont dès lors pour lui les armes d'un devoir essentiel : le devoir de mémoire.

Paru en 1958 puis l'objet d'une nouvelle traduction en 2006 réalisée par l'épouse de l'auteur, le présent ouvrage est le récit fragmenté de ses onze mois de détention dans l'antichambre de l'enfer.

Peu de repères temporels, le texte se présente sous forme d'un saisissant  condensé d'images, de scènes,  d'épisodes parmi les plus marquants qu'il ait vécu auxquels se mêlent ses ressentis. 

D'une puissance évocatrice terrible, La nuit est le témoignage sans concession d'un anéantissement physique, moral et spirituel. 

Une lecture absolument bouleversante qui laissera en moi une empreinte indélébile…

***

"Jamais je n'oublierai cette nuit, la première nuit de camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée. Jamais je n'oublierai cette fumée. Jamais je n'oublierai les petits visages des enfants dont j'avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet. Jamais je n'oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma foi. Jamais je n'oublierai ce silence nocturne qui m'a privé pour l'éternité du désir de vivre. Jamais je n'oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert. Jamais je n'oublierai cela, même si j'étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même. Jamais."
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Pourquoi continuer à lire des témoignages de rescapés de la Shoah ? Bonne question ... Ce n'est certes pas pour la nouveauté du propos, car on retombe toujours sur les mêmes événements, les mêmes scènes; de la privation à la sélection, de la faim au froid, des coups à la maladie, de l'incompréhension au désespoir, etc.
Peut-être pas par masochisme ou voyeurisme non plus (du moins on peut l'espérer).

La nouveauté n'est pas dans les faits qu'Elie Wiesel raconte, mais c'est la façon qu'il a de les raconter. A l'inverse de Primo Levi, ce n'est pas le récit d'un homme qui se raccroche à tout ce qui faisait de lui un homme (un être humain, plutôt) dans sa vie d'avant Auschwitz. Ici, c'est le récit d'un adolescent qui s'est construit dans les camps (tour à tour Auschwitz, Gleiwitz et Buchenwald, en passant par la case ghetto) et qui a vu et appris l'essence (et la lie) de la nature humaine dans les camps.
Le fait qu'Elie Wiesel était adolescent au moment de sa déportation détermine le ton de son témoignage.On le voit en rébellion quasi constante contre Dieu, mais même parfois contre son père qu'il l'aura accompagné jusqu'en janvier 1944.
La voix de l'auteur est pleine de haine et de colère, pas seulement contre ses bourreaux mais vis-à-vis de lui-même. Lui aussi se demande les "comment?" et "pourquoi?" il en est arrivé là. Pour lui aussi ces questions seront sans réponse.

Il y a une énorme tension tout au long de ce texte, comme un cri étouffé. Si un mot devait le résumer ce serait l'anéantissement. L'anéantissement de ce ce que le petit Elie avait appris, de tout ceux en quoi il croyait et de tout ceux qui le lui avaient enseigné.
Bien sûr, ce témoignage - comme tous ceux de cette période - est bouleversant, mais il a aussi quelque chose de terrifiant. D'abord car on voit l'ombre du néant planer sur toutes les choses du quotidien (dans les premiers chapitres qui se déroulent avant la déportation), et puis parce qu'en même temps que le narrateur, on se trouve horrifié par cette découverte de la condition humaine n'est la solitude. Les dernières lignes de ce récit cristallisent bien l'effroi de cette découverte.

Un court témoignage très dense qui mérite d'être lu.
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Je viens de terminer la lecture de ce terrible témoignage sur L'Holocauste avec des larmes qui ont roulé toutes seules sur mes joues...bouleversée par le périple de cet homme qui séparé de sa famille, se retrouve juste avec son père à traverser sans faillir dans sa foi et sa détermination sur le chemin de l'enfer. Cet instinct de survie pour cet affreux parcours de la mort en wagons, puis en camps de concentration au travail forcé....comment arriver par la suite à pourvoir prôner l'Humanité, et "rester debout" après tant de souffrances et d'ignominie?

L'écriture est dense, saisissante, ce texte me résonnera longtemps... et à ce jour me feront taire et relativiser les petits soucis et problèmes quotidiens de notre confortable vie contemporaine en France.
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On en a lu, on continue à en lire, les témoignages sur l'holocauste pendant la deuxième guerre mondiale, un moment suicidaire que le moment a traversé car comme un voile qui venait de quitter le monde et que la notion de l'humanité a surgis tout d'un coup dans chacun des cœurs qu'on s'est demandé "pourquoi n'avons-nous rien fait pour arrêter ça" mais on est arrivé à conclure le mal était plus fort que la sensation de cette humanité.

Mais les récits des enfants nous font vivre à poil cette cruauté, à les entendre, on entend pleurer des enfances et des jeunesses étouffées, violées, sacrifiées.

C'est le cas de ce livre, on se laisse emballer par le récit du jeune adolescent Elie Wiesel, censé découvrir à cet âge là les bonnes choses qui font l'homme mais c'est la pire des cruautés de l'homme qui va s'ouvrir devant lui...
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Citations et extraits (103) Voir plus Ajouter une citation
Jamais je n'oublierai cette nuit, la première nuit de camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée.
Jamais je n'oublierai cette fumée.
Jamais je n'oublierai les petits visages des enfants dont j'avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet.
Jamais je n'oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma foi.
Jamais je n'oublierai ce silence nocturne qui m'a privé pour l'éternité du désir de vivre.
Jamais je n'oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert.
Jamais je n'oublierai cela, même si j'étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même. Jamais.
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Je réfléchissais ainsi lorsque j'entendis le son d'un violon. Le son d'un violon dans la baraque obscure où des morts s'entassaient sur les vivants. Quel était le fou qui jouait du violon ici, au bord de sa propre tombe? ou bien n'était-ce qu'une hallucination?
Ce devait etre Juliek.
Il jouait un fragment d'un concert de Beethoven. Je n'avais jamais entendu de sons si purs. Dans un tel silence.
Comment avait-il réussi à se dégager? A s'extraire de sous mon corps sans que je le sente?
L'obscurité était totale. J'entendais seulement ce violon et s'était comme si l'ame de Juliek lui servait d'archet. Il jouait sa vie. Toute sa vie glissait sur les cordes. Ses espoirs perdus. Son passé calciné, son avenir éteint. Il jouait ce que jamais plus il n'allait jouer.
Je ne pourrai jamais oublier Juliek. Comment pourrais-je oublier ce concert donné à un public d'agonisants et de morts! Aujourd'hui encore, lorsque j'entends jouer du Beethoven, mes yeux se ferment et, de l'obscurité, surgit le visage pale et triste de mon camarade polonais faisant au violon ses adieux à un auditoire de mourants.
Je ne sais pas combien de temps il joua. Le sommeil m'a vaincu. Quand je m'éveillai, à la clarté du jour, j'aperçus Juliek, en face de moi, recroquevillé sur lui-meme, mort. Près de lui gisait son violon, piétiné, écrasé, petit cadavre insolite et bouleversant.
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Après quelques minutes de course folle, nous arrivâmes devant un nouveau block. Le responsable nous y attendait. C’était un jeune Polonais, qui nous souriait. Il se mit à nous parler et, malgré notre lassitude, nous l’écoutâmes patiemment :
- Camarades, vous vous trouvez au camp de concentration d’Auschwitz. Une longue route de souffrance vous attend. Mais ne perdez pas courage. Vous venez déjà d’échapper au plus grand danger : la sélection. Eh bien, rassemblez vos forces et ne perdez pas espoir. Nous verrons tous le jour de la libération. Ayez confiance en la vie, mille fois confiance. Chassez le désespoir et vous vous éloignerez de la mort. L’enfer ne dure pas éternellement....
Et maintenant, une prière, plutôt un conseil : que la camaraderie règne parmi vous. Nous sommes tous des frères et subissons le même sort. Au-dessus de nos têtes flotte la même fumée. Aidez-vous les uns les autres. C’est le seul moyen de survivre.
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(p. 178)
Un groupe d'ouvriers et de curieux s'était rassemblé le long du train. Ils n'avaient sans doute jamais vu un train avec un tel chargement. Bientôt, d'un peu partout, des morceaux de pain tombèrent dans les wagons. Les spectateurs contemplaient ces hommes squelettiques s'entretuant pour une bouchée.

Un morceau tomba dans notre wagon. Je savais d'ailleurs que je n'aurais pas la force nécessaire pour lutter contre ces dizaines d'hommes déchaînés ! J'aperçus non loin de moi un vieillard qui se traînait à quatre pattes. Il venait de se dégager de la mêlée. Il porta une main à son cœur. Je crus d'abord qu'il avait reçu un coup dans la poitrine. Puis je compris : il avait sous sa veste un bout de pain. Avec une rapidité extraordinaire, il le retira, le porta à sa bouche. Ses yeux s'illuminèrent; un sourire, pareil à une grimace, éclaira son visage mort. Et s'éteignit aussitôt. Une ombre venait de s'allonger près de lui. Et cette ombre se jeta sur lui. Assommé, ivre de coups, le vieillard criait :

- Méir, mon petit Méir ! Tu ne me reconnais pas ? Je suis ton père... Tu me fais mal... Tu assassines ton père... J'ai du pain... pour toi aussi... pour toi aussi...

Il s'écroula. Il tenait encore son poing refermé sur un petit morceau. Il voulut le porter à sa bouche. Mais l'autre se jeta sur lui et le lui retira. Le vieillard murmura encore quelque chose, pourra un râle et mourut, dans l'indifférence générale. Son fils le fouilla, prit le morceau et commença à le dévorer. Il ne put aller bien loin. Deux hommes l'avaient vu et se précipitèrent sur lui. D'autres se joignirent à eux. Lorsqu'ils se retirèrent, il y avait près de moi deux morts côté à côte, le père et le fils. J'avais seize ans.
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Béni soit le nom de l'Eternel !
Pourquoi, mais pourquoi Le bénirais-je ?
Toutes mes fibres se révoltaient. Parce qu'Il avait fait brûler des milliers d'enfants dans ses fosses ? Parce qu'Il faisait fonctionner six crématoires jour et nuit les jours de Sabbat et les jours de fête ? Parce que dans Sa grande puissance Il avait créé Auschwitz, Birkenau, Buna et tant d'usines de la mort ? Comment Lui dirais-je :
"Béni sois-Tu, l'Eternel, Maître de l'Univers, qui nous a élus parmi les peuples pour être torturés jour et nuit, pour voir nos pères, nos mères, nos frères finir au crématoire ? Loué soit Ton Saint Nom, Toi qui nous as choisis pour être égorgés sur Ton autel ?"
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Quel écrivain reçut le prix Nobel de la Paix et passa toute sa vie à essayer de changer le monde à travers la littérature ? Il fut déporté à Auschwitz à l'âge de 15 ans…
« La Nuit » d'Elie Wiesel, c'est à lire en poche aux éditions de Minuit.
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