AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Soleney


C'est le deuxième livre de cette auteure, après Oss. Je retrouve son écriture fluide, poétique et prenante, son imaginaire profondément dérangeant, ces personnages tordus et étranges… Les Sangs m'a tout de suite fascinée. À peine avais-je commencé à lire quelques lignes que j'ai accroché. Pari gagné pour l'auteure !

Audrée Wilhelmy s'attache à dresser le portrait d'un homme, Féléor Barthélémy Rü, au travers des femmes qu'il a connues. Riche, puissant, beau, énigmatique, il a tout pour plaire. Mais ce sont les femmes qui prennent la parole pour le raconter. En parallèle, elles racontent leur histoire à elles. Leur vie, leurs désirs, le sexe, surtout, et leur mort.
Le récit est découpé en sept parties, chacune au nom d'une des protagonistes. On commence avec une courte description du personnage, puis elle raconte à la première personne son aventure avec Féléor ; et parfois son enfance pour expliquer une partie de sa personnalité. Cela peut prendre la forme d'un journal intime, mais aussi de lettre adressée aux morts ou à Féléor. À la fin de chaque partie, ce dernier parle à la première personne et donne sa version des faits. Et là, surprise ! On constate qu'ils ne sont pas tout à fait les mêmes – ou que certaines choses ont été passées sous silence. Les filles se laissent parfois emporter par leurs lubies, leurs désirs, elles perdent le sens de la réalité – à l'image de Mercredi. Cela donne matière à réfléchir sur la subjectivité de chacun. Nous déformons la réalité, qu'on le veuille ou non, car nous l'interprétons malgré nous.

Selon la femme avec qui est Féléor, la relation qu'ils auront prendra des tons de manipulation, de sadomasochisme, d'inceste… Il y en a pour tous les goûts, et le moins qu'on puisse dire, c'est que sa vie n'est pas triste ! Au début des accidents, puis des lubies de ses femmes, les meurtres de ses compagnes deviennent habituels. Féléor finit même par y prendre goût.

Le procédé d'écriture est étrange, mais innovant et très intéressant. Parfois presque inquiétant. Les personnages sont…bizarres. Mais ils restent réalistes, humains – contrairement à certains livres où on ne parvient plus à s'y retrouver, tellement ils sont exagérés et leurs pensées, erratiques (comme Quai Ouest, de Koltès ou Nightfall, de David Goodis). Ils ont tous une certaine profondeur ; à l'exception de Phélie, que je trouve trop ressembler à Abigaëlle.
On a beau se voiler la face, mais les désirs que décrit l'auteure peuvent prendre part en chacun de nous, on peut se les approprier. Même si certains sont tellement horribles que ça donne plutôt envie de vomir – je pense notamment au moment où Féléor lèche et mord le pied d'Abigaëlle pour goûter ses plaies et faire exploser ses cloques entre ses dents... Gloups. À mon avis, c'est un des passages les plus marquants de ce livre (c'est pourquoi il est en citation).

J'ai aussi remarqué quelque chose d'intéressant : le premier amour de Féléor s'appelle Mercredi, et le nom de famille de la dernière est des Cendres. On dirait une connotation chrétienne, d'autant plus qu'on ne connaît pas le nom de famille de Marie et que ce n'est qu'en regardant la table des matières qu'on peut le remarquer. Mais d'après l'auteure ce n'est pas voulu. Et « c'est dans ces moments qu'on se découvre plus intelligent qu'on ne le croit ».

Ce livre fait partie de mes coups de coeur. Il est dérangeant et original, mais c'est ce qui fait sa particularité. J'ai accroché aux personnages, j'ai accroché à l'écriture fluide de l'auteure, j'ai accroché à l'idée : si vous êtes prêts à tenter l'aventure, je vous le recommande ! :)
Commenter  J’apprécie          100



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}