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Critique de Alfaric


On sent tout de suite le cycle de qualité, même si on doit se coltiner le sempiternel tome d'introduction (ici en plus découpé en 4 parties) avant que les choses ne s'animent vraiment. La prose travaillé nous ballade gentiment aux quatre coins du château du Hayholt, et des grands cycles de BCF des années 80/90 c'est sans doute de loin le plus ambitieux.
Signe qui ne trompe pas, les plus grands s'en inspirent : Robin Hobb et son "Assassin Royal" (Fitz spectateur de la rivalité Vérité / Royal remplaçant Simon spectateur de la rivalité Elias / Joshua), GRR Martin et son "Trône de Fer" (Bran puis Arya empruntent beaucoup à Simon crapahutant dans les couloirs du Hayholt), mais aussi Greg Keyes et Brian Ruckley qui en auraient presque composé une version dark fantasy avec "Les Royaumes d'épine et d'os" et "Un Monde sans dieux"…

André-François Ruaud, que j'ai en immense estime, a parlé d'un roman fantasy qui est le fidèle héritier du roman-feuilleton du XIXe siècle. D'accord, sauf qu'ici on est largement plus proche des émules d'Honoré de Balzac que de ceux d'Alexandre Dumas.
Bref, je me suis joliment emmerdé. Les dialogues honteusement hachés m'ont obligé à lire en diagonal (c'est d'un pénible ce gimmick d'entrecouper chaque bout de tirade par la description de toutes les modes de communication non verbale possibles et imaginables !), l'auteur s'échine à esquiver les ressorts pour nous abreuver de détails sur son univers qui finissent par endormir (architecture elfe, linguistique trolle, généalogie des Hernystiris, chroniques des Rimmersmen…) Par contre pour expliquer les pouvoirs du prêtre-sorcier, la rivalité entre les 2 frères, la folie d'Elias, les révoltes, les massacres, le Sombre Seigneur et les Renard Blancs… NADA ! L'intrigue avance ainsi de manière discontinue à partir des remarques volées ici et là par Simon qui vagabonde dans tel ou tel endroit du château.
Pourquoi cela marche chez Tolkien et pas chez Williams ? Parce que dans Tolkien les Hobbits n'existaient que pour qu'on s'identifie à eux en nous rendant acteurs de l'action à travers leurs yeux. Ici on nous oblige à être spectateur de l'action, quand on le la fuit pas, à travers les yeux d'un adolescent orphelin pas très malin, très naïf voire carrément simplet. Au bout de 200 pages enfin un rebondissement ? Aussitôt amené, aussitôt évacué.
Très tolkienien, tant mieux, trop tolkienien, tant pis. On retrouve la belle prose poétique à la Tolkien, le worldbuilding approfondi à la Tolkien… Sauf que c'est moins dense et moins riche que Tolkien (derrière l'assemblage haut-médiéval à la Tolkien, on retrouve le traditionnel gimmick de la Fantasy américaine : pour la énième fois des colons anglo-saxons venus d'un vieux continent dont on ne saura rien, ont pris possession d'un nouveau continent en dépit des efforts des indigènes pour défendre leurs terres ancestrales). de plus pas mal de rebondissements sont empruntés à Tolkien
Car dès qu'on met un peu d'animation, on tombe sur des scènes déjà vu dans le SdA, donc on a droit à : « vous ne passerez pas », des tunnels avec des araignées éclairés à la seul lumière d'un objet magique, l'auberge du Poney Fringant, les Nazgûls, la forêt de Mirkwood, le sombre seigneur dont l'oeil se pose sur le pauvre Frodon, euh pardon Simon…
Fort heureusement le mystérieux rôdeur de noble ascendance est remplacé par Bibanik le troll… enfin troll l'auteur s'échine à ne pas trop le décrire. On s'inspire des traditions scandinaves et qui vont du grelin farceur à l'affreux titan... pour finalement explorer l'altérité des Lapons ou des Inuits (le dieu Sedda remplaçant la déesse Sedna). C'est très réussi, le personnage au phrasé ampoulé est délicieux. Je gage que les autres peuples seront aussi à l'honneur ultérieurement.

J'avais vraiment envie d'aimer ce cycle, mais cette entrée en matière ne m'a pas emballé du tout… le trait d'union entre la Fantasy à aventures et la Fantasy à intrigues… Mais dans les 2 genres il y a des mises en place bien plus palpitantes, Tad Williams prenant tout son temps avec des lenteurs et des longueurs voire même du remplissage pur et simple quitte à rebuter et à perdre des lecteurs.
Mais je continuerai, car les qualités me semblent trop grandes pour laisser tomber l'affaire. Là tout de suite j'hésite entre un 4/5 pour le style et un 2/5 pour l'ennui…
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