Un arbre n’a d’autre choix que de rester sa vie durant où sa graine a germé et s’est enracinée. Il peut néanmoins se reproduire. Durant le cours laps de temps où les embryons d’arbres sommeillent encore enveloppés dans les graines, ils sont libres, rien ne s’oppose à ce qu’ils partent vers de nouveaux horizons. Le voyage peut commencer dès que les graines tombent de l’arbre. Certaines espèces sont très pressées. Elles équipent leurs progéniture de poils très fins afin que le premier vent les soulève et les emporte. Pour présenter la légèreté nécessaire, les graines des espèces qui choisissent cette stratégie doivent être très petites. Les peupliers et les saules fabriquent ainsi de minuscules petits planeurs qui peuvent être disséminés à des kilomètres à la ronde.
Nous savons de l'observation de la floraison des sites forestiers en voie de dépérissement que ce sont précisément les sujets mal en point qui mettent le plus d'ardeur à fleurir. Sans doute est-ce afin d'assurer leur descendance avant que la mort signe la disparition définitive de leur patrimoine génétique. Des effets similaires sont induits par les records de sécheresse et de chaleur de certains étés qui mènent les arbres au bord de la rupture puis les font abondamment fleurir le printemps suivant. Ce qui, au passage, tord le cou à l'idée qui voudrait qu'une abondance de glands et de faînes indique que l'hiver sera particulièrement rigoureux.
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Le résultat de l'étude est d'autant plus surprenant : les arbres compensent mutuellement leurs faiblesses et leurs forces. Le rééquilibrage s'effectue dans le sol, par les racines. Et les échanges vont bon train. Qui est bien nanti donne généreusement et qui peine à se nourrir reçoit de quoi améliorer son ordinaire.
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La condition d'un arbre ne peut être meilleure que celle de la forêt qui l'entoure
Les arbres fruitiers, les saules ou les châtaigniers diffusent des messages olfactifs pour attirer l'attention et inviter les abeilles à venir faire le plein chez eux. Le doux nectar que les insectes butinent est la récompense de la pollinisation qu'ils accomplissent à leur insu. La forme et la couleur des fleurs sont elles aussi des signaux destinés à les distinguer de toute la verdure du feuillage, un peu comme des panneaux publicitaires qui indiquent l'entrée d'un restaurant.
Les pucerons n’en sont pas moins une bénédiction pour de nombreux animaux. Certains insectes s’en délectent, dont la coccinelle qui avale un puceron après l’autre. La fourmi rousse des bois, en revanche, s’intéresse essentiellement au miellat qu’elle prélève directement à la source, à l’extrémité de l’abdomen du puceron. Pour en accélérer la production, elle tâte ce dernier avec la pointe de ses antennes, ce qui déclenche une excitation qui force le puceron à uriner.
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Dès qu’ils franchissent le cap des 200 ans, la base des hêtres commence elle aussi à se fissurer. Et histoire d’informer toute la forêt, des mousses entreprennent de coloniser les fissures. L’humidité due aux précipitations y persiste plus longtemps qu’ailleurs et fournit l’eau nécessaire à leur alimentation. Leur présence, visible de loin, permet d’évaluer l’âge d’une hêtraie : plus la végétation s’élève sur le tronc, plus l’arbre est vieux.
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Les arbres urbains sont les enfants de la rue de la forêt.
Les champignons sont en quelque sorte l'Internet de la forêt.
Les arbres veillent à ce que les gouttes de pluie ne frappent pas le sol trop durement, mais tombent doucement des branches.