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Citations sur Un homme, un vrai (48)

Washington Irving disait "il y a trois âges pour les hommes : la jeunesse, l'âge moyen et le tu-n'as-pas-changé-d'un-poil"
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Le meilleur roman de Wolfe
"Un Homme, Un Vrai" est un roman qui peut rebuter par sa longueur (comme les deux autres romans de Wolfe, à savoir "Le Bûcher des vanités" et "Moi, Charlotte Simmons", il fait 1000 pages), mais c'est indéniablement le meilleur roman de l'auteur, une satire féroce...ment drôle du monde des affaires, du Sud des USA (le Sud bien profond, avec racisme et machisme sous-jacents), des magouilles politiques et juridiques. Personnages attachants ou pas, mais toujours remarquables. Un chef d'oeuvre !
Les deux autres romans de Wolfe (et ses documents, ses livres-reportages) sont également parfaits.
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L'une des rares libertés que nous avons en tant qu'êtres humains, la liberté qu'on ne peut pas nous ôter, est celle de consentir à ce qui est vrai et de dénier ce qui est faux. Rien de ce que vous pouvez me donner ne vaut d'abandonner cette liberté.
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La foule se pressait...avant même qu'elle l'ait vu venir, un homme très grand se retrouva à quelques centimètres d'elle, s'adressant à un autre homme qui tournait le dos à Martha. Pourtant elle n'eut aucun mal à le reconnaître (...)ce ne pouvait être qu'Arthur Lomprey, le président de Plannersbanq. Il avait été son invité d'honneur à trois dîners au moins, à l'époque où Charlie essayait d'obtenir le financement de Crocker Concourse. Après tout, c'était son retour ... en société. Elle avait payé 20 000$ pour une table et invité neuf personnes. Elle avait acheté cette robe 3 500$, elle était fière de ses larges épaules et de ses mollets bien tournés. Elle avait oint ses épaules de lait pour bébé afin de les satiner. Elle avait dépensé 4 200$ pour ce collier (une chaîne de montre en or avec de petits rubis), 225$ pour sa coloration (blond ananas) et sa coupe chez Philippe Brudnoy, 150$ de maquillage chez LaCrosse, 850$ pour ces escarpins noirs, lézard et cuir, sans compter les cours de Mustafa Gunt chez DefinitionAmerica dans l'espoir de ressembler un tant soit peu à ces garçons-avec-des-seins.
En plus de tout ça, elle venait de descendre une autre coupe de champagne. Elle s'approcha donc, comme elle put, de la grande silhouette voûtée et lança :
_ Arthur !
Arthur Lomprey se retourna, la regarda, et son sourire s'élargit tellement qu'elle aurait pu compter ses dents. Mais ses yeux reflétaient la panique pure. Ils disaient : Mayday ! S.O.S ! J'ai rencontré cette femme un jour, mais qui est-ce, bon Dieu ?
_ Héééé ! Comment ça va ? s'exclama-t-il tout en continuant à sourire bêtement, alors que ses yeux cherchaient frénétiquement un indice. Ils couraient de ses boucles teintes, son visage maquillé, son collier, sa robe, ses épaules satinées, à tout son corps si studieusement travaillé.
_ Comment vont les enfants ? demanda-t-il finalement, tentant le tout pour le tout.
_ Comment vont les enfants ? Rien n'aurait pu la blesser davantage. L'homme venait de passer au scanner ce qu'elle pouvait offrir de mieux au monde après une dépense de 8 925$ ainsi que d'innombrables heures d'agonie cardio-vasculaire entre les mains d'un bourreau turc, et son cerveau, cet ordinateur entièrement analogique, chimiquement activé, était arrivé en quelques millisecondes à cette conclusion : une matrone. Donc... Comment vont les enfants ?
Martha avait envie de hurler, mais, dans son état de stupeur, le mieux était encore de répondre d'un ton morne et mécanique :
_ Bien.
_ C'est merveilleux ! s'exclama Arthur Lomprey, qui ne l'avait probablement même pas entendue. C'est vraiment bien ! Il continuait à secouer la tête avec enthousiasme, mais il fuyait son regard, essayant de trouver un moyen de la planter là avant d'être contraint de la présenter aux gens qui l'accompagnaient. Qui était cette femme superflue ? Qui était cette invisible ex-femme ? Qui était ce fantôme social (sans un mari à son côté pour lui donner une identité) ?... Elle n'attendit pas que la situation empire (et) tourna les talons.
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Le crotale s'était changé en un monstre de colère sinueuse. Son énorme gueule grande ouverte mordait le vide de ses deux crocs, semblables à des seringues hypodermiques. Crachant autour de lui de grosses gouttes de venin jaune, sa langue fourchue noire s'agitait dans tous les sens, un sifflement glacial jaillissant de sa gorge. La bête, deux mètres de muscles, de vertèbres et des centaines de côtes, fouettait l'air avec une telle force que Charlie se demanda s'il pourrait maintenir sa prise plus longtemps. Une puanteur lourde, terrible, comme celle d'un sconse, émanait du serpent et empoisonnait l'atmosphère, mais pour Charlie, à cet instant, elle évoquait une fragrance riche comme l'encens ou la myrrhe. Et surtout, dominant tout le reste, on entendait le cliquetis des sonnettes...
Frappé par le son ! Des chevaux d'une tonne vous faisaient vider les étriers et vous piétinaient quand ils entendaient la terrifiante castagnette d'un serpent à sonnettes. Ce sifflement, c'était la gâchette de la terreur pour tout système nerveux disposant de l'ouïe, y compris et en premier lieu celui de l'homme.
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_ Aïe ! (C'était Serena juste derrière lui) Charlie ! Une abeille m'a piquée !
_ C'tait pas une abeille, dit Charlie sans même regarder, c'tait une mouche !
Probablement une mouche noire, songeait-il. Méchantes petites salopes : noiraudes, avec un aspect malsain, et des ailes déployées en arrière comme celles d'un avion de chasse ou d'un bombardier furtif. Elles ne rataient jamais leur cible.
_ Charlie ! cria Serena. Qu'est-ce que c'est que ces petites... pffft pffft pffft pffft... bêtes blanches ? Elles sont dégoûtantes !
Charlie les vit aussi, une autre sorte de mouche, plutôt dans les blancs.
_ C'est des mouches d'aisance, dit-il. Elles ne te piqueront pas. Elles volent autour des...pffft pffft pffft pffft... lieux d'aisances.
_ Quels lieux d'aisances ?
_ Les chiottes extérieures.
_ Monsieur Crocker ! s'exclama Heidi. Regardez arbre !
_ Des chenilles processionnaires, expliqua Charlie.
Elles avaient infesté la totalité de l'arbre. Elles le dénuderaient de ses feuilles en un rien de temps.
_ Ce qu'on entend, dit Serena, c'est le ...pffft pffft pffft pffft... bruit qu'elles font en se nourrissant ?
_ Ouaip, fit Charlie.
Elles émettaient une espèce de crunch crunch. En réalité, c'était le bruit de leur défécation et des excréments de dizaines de milliers de chenilles touchant le sol. Mais inutile de donner cette information à six mètres à peine de la porte d'entrée. Inutile de mentionner également qu'en juin à Baker County, sous l'ombre des grands chênes et des magnolias, il y aurait des moustiques, des moustiques géants, de la famille des Culicidae, toute la sainte journée. Le marais de Jook - là où, en cette saison, les moustiques se multipliaient par milliards et prospéraient en suçant le sang de leurs victimes - était à quelques pas. Inutile aussi d'attirer l'attention sur cette souche de grand chêne, là-bas, à l'ombre. Qu'on essaie de s'y asseoir pour jouir quelques instants du soleil, ou de s'allonger sur le joli tapis d'aiguilles de pin ! Les moustiques, mouches jaunes, taons, mouches noires et moucherons tomberaient du ciel, et les chenilles attaqueraient aussitôt les chevilles, les cuisses, le cou, et le gros cul imprudent avant même qu'on ait eu le temps de prononcer leur nom. Juin était le mois des chenilles. Pour elles, juin c'était Thanksgiving, Noël et le 4 juillet réunis.
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Dans les hauts parleurs, Doc Refouloir Doc Doc chantait (si on pouvait appeler ça chanter) une nouvelle chanson (si on pouvait appeler ça une chanson). Combien est-ce que je peux l'aimer bien, chantait-il ou rappait-il, quand j'la surprends avec mes frangins ? Ces images d'amour-jalousie, si typiques chez ces troubadours complètement illettrés du "On baise-comme-des-bêtes", irritaient Martha à un point insoupçonnable. Mais que faisait Martha Crocker, née Martha Starling, de Richmond, Virginie, du plus beau quartier de Richmond...Que faisait-elle dans une salle de gym de Buckhead à Atlanta, à subir cette "musique de nègres", comme son père l'avait toujours appelée, musique obscène, sans esprit, totalement vulgaire...? Que faisait-elle à se laisser bousculer, cogner et rabaisser par une bande de filles futiles, sans cervelle, narcissiques et folles de leurs corps, totalement soumises à un tortionnaire turc chauve nommé Mustafa Gunt, qui prenait plaisir à l'expédier, elle, Martha Starling Crocker, dans un footing de cinq étages jusqu'à son seuil de tolérance cardiaque ? Elle avait passé la ménopause. Elle n'était plus assez jeune pour être à l'abri d'une attaque cardiaque...
Pourquoi était-elle dans cette situation ridicule ?
Charlie. C'est toi, Charlie, et toi seul, toi et tes caprices, toi et ton égoïsme sans bornes, qui m'a fait ça ! Tu as éviscéré ma vie si agréable, Charlie ! Et me voilà à cinquante-trois ans, suant comme une bête pour renaître en tant que femme dans cette ridicule fabrique de garçons avec des seins !
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Brrrannnnnng ! Brrrannnnnng !...Soudain le terrible bruit cessa. Serena avait fini par trouver le bouton. La sonnerie résonnait encore dans le crâne de Charlie quand il se tourna vers le placard. Serena en sortit, débordant de sa petite nuisette. Elle respirait bruyamment et évitait de le regarder.
Tout à coup on frappa à la porte de la chambre.
_ Papa ! Papa ! Tu es là ?
C'était Wally, l'air dérouté, endormi, décomposé, maigre, gauche. Il portait une robe de chambre en laine sur le tee-shirt et le caleçon dans lesquels il dormait.
_ Que s'est-il passé ? demanda Wally.
_ Pas de quoi s'inquiéter, le rassura Charlie. C'est juste Serena...juste le système d'alarme qui nous a fait une de ses petites attaques.
Wally passa la tête dans l'entrebâillement de la porte. Il vit la nouvelle femme de son père, assise au bord du grand lit avec ses longues jambes nues croisées. Ses cheveux tombaient en cascade sauvage sur ses épaules dénudées. Elle avait les bras sur sa poitrine, assez pudiquement, mais il n'y avait pas une chance pour qu'une telle fille, pourvue d'un tel corps et portant une aussi minuscule nuisette soit pudique. Les yeux de Wally lui sortaient de la tête comme les crochets à chapeau d'une église de campagne de Baker County. Charlie était mortifié, et pour des raisons qui allaient bien au-delà de la pudeur. Son fils de seize ans avait un aperçu de la tanière du plaisir, de la chambre du maître, et, sur le bord du lit du maître lui-même, un aperçu interdit de ce pour quoi son père avait quitté sa mère. Charlie regarda Serena. Il avait envie de dire : "Wally, ne regarde pas ! Sors d'ici !" Il avait envie de dire : "Serena ! Pour l'amour du ciel ! Disparais ou couvre-toi !" Mais les mots restaient bloqués dans sa gorge.
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Et qui, à part elle, prenait le temps de s'apitoyer sur les solitaires ? Personne de sa connaissance. Ils voyaient tous la solitude comme un stigmate, un signe d'échec, une erreur grave. C'était une violation de l'étiquette, une source d'embarras.
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il sortit une calculette HP-12C de la poche de sa veste, le sillon au milieu de son front se creusa, et il commença à calculer. Ce satané HP-12C, c'était le Wiz sous forme de hardware. C'était la baguette magique des techno-guignols. Charlie ne supportait pas cette vision, parce qu'elle le déconcertait complètement et lui faisait sentir combien il était coupé de la nouvelle génération diplômée des écoles de commerce. Curieux tout de même, il avait demandé un jour au Wiz de le laisser essayer une minute. Il avait tenté d'entrer 2+2. Il n'avait pas pu obtenir 4 ! Il n'avait pas pu obtenir 2+2=4 ! Il s'avéra qu'avec cette satanée machine il fallait entrer +2 plus +2. Ca marchait à l'envers ou quoi ? Seuls les gens possédant un MBA de Wharton étaient apparemment en mesure de la faire fonctionner.
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