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sur 1007 notes
Oscar travaille dans une maison de retraite à Cambridge. Un jour, se promenant il est attiré par le son de l'orgue et entre dans la chapelle. Il y fait la connaissance d'Iris Bellwether qui n'est autre que la soeur d'Eden, l'organiste. Une relation amoureuse intense entre eux naît rapidement ternie par le comportement étrange d'Eden, un être complexe et narcissique ne vouant son intérêt qu'à la musique. Petit à petit, Oscar découvre la personnalité d'Eden et commence à se poser de nombreuses questions sur son état psychique. Grâce à l'un des résidants de la maison de retraite, il entre en contact avec un spécialiste Herbert Crest, atteint malheureusement qu'une tumeur au cerveau dont les jours sont comptés. Eden et Herbert mettent chacun leur esprit en avant afin de prendre l'ascendant sur l'autre.... jusqu'au drame final...


Une lecture qui m'a laissé sceptique au départ. le roman centre son sujet sur le délire narcissique et la musicothérapie ... les délires de toute puissance voire la sensation de se percevoir en Dieu. Seulement, ce livre pèche par une inégalité rythmique et des longueurs insipides par moments. le lecteur doit vraiment s'accrocher au début du récit avec une pléiade de personnages complexes au comportement par moment déroutant. Une fois le lecteur familiarisé avec les personnages, le contexte scientifique doit être digéré avec énormément de théories abordant la musicothérapie, l'ésotérisme. L'intrigue se développe lentement et insidieusement pour se terminer avec un final a contrario express.


Globalement, ce premier roman de Benjamin Wood me laisse avec une sensation troublante. Autant le contexte de la mort, de la musicothérapie et des délires narcissiques sont des sujets sur lesquels le livre m'a passionné... autant certains personnages comme les parents d'Eden, ses amis (Marcus, Yin, Jane), la soeur (Iris) m'ont paru caricaturaux : en effet, le comportement des parents (Théo et Ruth Bellwether) via leur "indifférence", leur flegmatisme, leur détachement face à ce fils étrange m'a paru à contre-courant. L'explication donnée vers la fin par Théo ne répond pas à cette sensation de discordance avec le récit.


Bref, un roman complexe et psychologiquement bien pensé et documenté. Malheureusement, les inégalités dans la rythmique de l'intrigue, les longueurs, les personnages caricaturaux ont plus été un frein qu'un vecteur de plaisir à découvrir ce livre.
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Impressionnant pour un premier roman !

De génie, il en est question tout au long de l'histoire , entrainant bien sûr l'interrogation sur ses frontières avec la folie .

Oscar Lowe, aide-soignant dans une maison de retraite, est subjugué par la musique d'un orgue dans une église,et fait alors la connaissance d'Iris et de son frère Eden Bellwether, le musicien si doué , féru de musique baroque .

Oscar tombe sous le charme de la belle Iris et rapidement aussi sous la coupe de son frère.

Celui ci est persuadé qu'il a des dons pour guérir grâce à sa musique , expérience sur sa propre soeur à l'appui .

Commence alors pour Oscar une vie nouvelle dans les bras d'Iris d'abord puis dans ce milieu aisé où l'ambition et l'orgueil ne laissent pas de place aux doutes et à la remise en question.

Ecartelé entre sa conviction de la maladie mentale d'Eden et les certitudes d'Iris et du petit groupe d'amis du génie d'Eden , Oscar s'interroge et doute ...

Les différentes rencontres avec des personnages atypiques comme le Docteur Paulsen et Herbert Crest sont également captivantes .

Au fil des pages les questions s'enchainent : quelles sont les relations entre la science et Dieu, le rationnel et l'irrationnel , l'amour filial et la passion, l'amitié et la manipulation, l'art médical et les médecines parallèles ..

Benjamin Wood capte l'attention du lecteur avec brio et ce d'emblée car les toutes premières pages nous laissent entrevoir le drame final.

J'ai été conquise , il doit y avoir du génie la-dessous ...
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Je savais que j'allais me plonger dans un roman très dense et documenté qui ne se lit pas de façon légère ou approximative et qu'il faut du temps et de la disponibilité pour bien s'en approprier la lecture.

Cependant, à la lecture de ces près de 500 pages, je peux vous dire que le jeu en valait largement la chandelle tant "Le Complexe d'Eden Bellwether", premier roman d'une jeune anglais de 34 ans, Benjamin Wood, est un vrai bijou, et assurément un des grands coups de coeur littéraire de la rentrée littéraire.

Même si dès le début du livre, je sais que je suis en terrain connu, car j'ai déjà eu l'occasion de lire un certain nombre de ces "Campus Novels" dont la littérature américaine s'est fait une spécialité (du "Maitre des illusions" de Dona Tart à au "roman du mariage" de Jeffrey Eugenides, deux chefs d'oeuvre du genre), "ce complexe d'Eden Bellwether" en est une version britannique absolument brillantissime et qui mélange réflexion très pertinente sur la folie, et thriller sur la manipulation parfaitement maitrisé.

Pendant tout le livre, le lecteur s'interroge, un peu comme le fait Oscar, le jeune aide soignant qui se retrouve un peu par hasard au sein de ce groupe de jeunes brillants musiciens et universitaires, afin de déterminer si ce Eden Bellwether, le frère virtuose de la jeune fille dont il tombe éperdument amoureux, est un fou manipulateur ou un génie capable d'utiliser le pouvoir hypnotique de la musique à des fins médicales et scientifiques.


Le roman de Wood, mécanique fort bien huilée, fouille ainsi de manière bien profonde la thématique du pouvoir thérapeutique de la musique et de l'hypnose sur la maladie et la souffrance, un peu à la manière du dernier film de Woody Allen oppose le rationnel à l'irrationnel; et les sciences et médecines traditionnelles aux croyances surnaturelles et parrallèlles.

J'ai été particulièrement sous le charme de la façon dont la communauté d'étudiants du livre de Benjamin Wood n'est vue qu'à travers le regard d'un "étranger",Oscar, qui va s'intégrer à cette petit groupe en préservant toutefois une certaine distance sur le soi disant génie de cet Eden, individu atteint de personnalité narcissique, tout en arrogance, de perversion et de domination.

De la même façon, j'ai tout autant apprécié l'intervention à mi parcours d'Herbert Crest, un psychologue spécialiste des troubles de comportement qui veut débusquer la personnalité d'Eden mais qui lui aussi se trouve pris dans les mailles de sa folie, et qui aboutira à un dénouement pas si attendu que cela, et qui ne déflorera pas tous les mystères et zones d'ombre parsemés au fil du récit.

Bref, un très grand livre!!!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Etre hypnotisé par Bach ou Haendel (au sens médical du terme) ou par tout autre musicien, baroque de préférence, quelle délicieuse médication!
Perdre le sens des réalités sous le charme mélodique du contrepoint, guérir en corps ou esprit par la musicothérapie sous hypnose, voici un concept qui me parle fort bien!

Quand Oscar, jeune aide-soignant, fait la connaissance d'une bande d'étudiants de Cambridge menée par le charismatique Eden Bellwether, il est rapidement intrigué et agacé par l'intelligence et par la mégalomanie de celui ci.
Etranger à la classe sociale de ses nouveaux amis, autodidacte et pragmatique, il se sent manipulé en esprit par la personnalité narcissique d'Eden et en charme amoureux par sa soeur Iris. Et quand la mise en pratique des théories thérapeutiques sous hypnose musicale se présente à l'improbable guérisseur, Oscar aura bien du mal à empêcher le drame, dans l'atmosphère psycho-maniaque qui s'installe insidieusement.

Les médecines alternatives, la psychologie de l'espoir et de l'auto-suggestion, la manipulation sectaire avec gourou inspiré sont en filigrane de ce premier roman bien maitrisé.
A la frontière du génie, du paranormal et de la folie, j'ai aimé la thématique insolite de la thérapie musicale, mais en ai regretté le traitement un peu laborieux par les pertes de rythme et des personnages décalés qui gênent parfois à la compréhension psychologique (particulièrement les parents qui sont tout sauf des parents).
Passé ce petit bémol, le montage narratif est impeccable et le suspens tient le lecteur. L'ambiance est au thriller "gothique" avec le décor magnifique des vieux murs de Cambridge qui donne des envies de concerts d'orgue dans la chapelle de King's College.

La musique adoucit les moeurs, comme on dit.
Pas toujours...
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Cambridge, de la musique, un cercle de jeunes, beaux et bourgeois pour une ambiance vouée aux poètes disparus.

C'est alors que les tuyaux de l'orgue firent brusquement éclater un rugissement formidable et discordant. La musique s'emballa. le volume augmenta. le timbre de l'instrument changea, de grinçant il devint retentissant.[…]

La musique comme thérapie. La musique comme aliénation. Ou comment un être peut sombrer dans l'art comme dans la folie. Somptueuse mélodie que ces touches noires et blanches, l'harmonie qui s'envole et l'esprit qui s'effrite. La raison disparait dans les méandres de ces accords, comme la mousse de ma bière qui s'efface face à l'insistance de mes lèvres à plonger dedans.

Prêterait-on des vertus à cet orgue comme l'on en donne au cannabis, parce que cette musique semble guérir. Comme une puissance irrationnelle. Soigner des maux, effacer même les maux humains. Une musique illuminée comme une écoute sous hypnose ou sous LSD. Question de croyance ou de feeling. Et question musique sous LSD, j'en connais un rayon. Mais au-delà de l'orgue, au-delà des musiciens, des voix et des instruments, c'est surtout la partition accouchée sur cette feuille de papier qui donne tout le pouvoir à cette harmonique.

Cette musique-là était pleine d'énergie, furieuse et contagieuse, fiévreuse et tranchante. Elle évoquait un jaillissement d'eau, un troupeau d'animaux affolés, un formidable tumulte, un océan qui se déchire, deux grandes armées marchant l'une vers l'autre. Son jeu de pieds produisait des notes graves et voilées qui se mêlaient à la mélodie tissée par ses doigts, donnant du corps, de l'épaisseur au son. Il faisait sonner chaque note basse sans même baisser les yeux, avec des pressions légères de ses pieds nus, des mouvements talon-pointe de danseur de salon expérimenté, ajoutant des accords brusques et percutants, tout en faisant courir ses doigts sur les touches. Puis il actionna une commande et décala ses mains vers le bas d'un mouvement fluide, passant du clavier supérieur au clavier inférieur, si bien que les touches de tous les claviers suivaient le mouvement incessant de ses doigts. La musique se fait plus lourde, plus sombre. Les touches s'enfonçaient et se soulevaient toutes seules, comme si des chats invisibles couraient dessus. […]

Un roman merveilleux, première partition littéraire d'un Benjamin Wood pris en trance devant les mots et les notes. Une oeuvre magistrale entre folie et art. L'un ne se dépareille pas de l'autre, et pour devenir l'un il faut être l'autre ou vice-versa. Mais lorsque l'art est poussé à sa folie, la perception est toute différente. Elle capte l'attention, elle hypnotise, elle dérange et provoque le malaise, car en allant au bout de sa folie, la vie ne peut que sombrer dans le drame. Fraicheur et envoutement ; des notes, simples doubles avec croches, noires ou blanches, qui ont le « pouvoir » de pénétrer une âme réceptive, comme une odeur qui monte en toi, un parfum qui t'enveloppe, une bière qui t'enivre, un vent qui ondule ou une femme qui te chevauche.

Le son ne pouvait pas s'échapper ailleurs. le bâtiment n'allait certainement pas le contenir. Il allait faire voler le toit en éclats. Mais à cet instant, Iris joua un trille aigu qui trancha sur le souffle puissant de l'orgue. Sa main gauche glissa sur le manche de son violoncelle, et elle se mit à jouer des accords rapides et nerveux – un deux trois quatre, un deux trois quatre – qui trouvèrent leur propre place au milieu de la clameur croissante.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Rien n'est jamais très simple dans les histoires qui ne tournent pas rond et qui se déplient lentement. Benjamin Wood aborde différents thèmes dont celui du pouvoir qui a la musique d'éveiller diverses émotions en nous. Puisque la musique n'a pas de règles et que ses bienfaits ne peuvent être soumis à des preuves scientifiques, elle ouvre d'énormes possibilités, dont celle de guérir.

L'auteur nous ouvre les portes d'un monde clos et mystérieux de la psychanalyse et plus particulièrement des dangers liés aux comportements pervers narcissiques. Flagornerie, suffisance, esprit tortueux, sentiment de supériorité, cette déviance se caractérise surtout par un besoin exacerbé de se faire admirer et de manipuler les proches de son entourage, sans ressentir aucune culpabilité lorsqu'il blesse les autres.

Benjamin Wood précipite ses personnages aux confins de la folie avec une parfaite mesure des temps de respiration. Quelques références musicales donnent le rythme et annoncent une tension psychologique qui s'installe au fil des pages jusqu'à aboutir à une surprenante scène dans les derniers chapitres.

Malgré l'écriture parfois trop fonctionnelle et quelques clichés on se laisse prendre dans les méandres de la folie et de la perversité. C'est une inoubliable plongée dans un esprit déviant.


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« Personnalité narcissique : le sujet a le besoin d'être admiré, a un sens grandiose de sa propre importance, pense être spécial et unique, utilise autrui pour arriver à ses propres fins, fait preuve d'attitude et de comportements arrogants et hautains, manque totalement d'empathie ».

Vous reconnaissez-vous dans cette description ?
J'espère que non, car vous ressembleriez à Eden Bellwether, ce jeune homme très … hum, spécial, oui. Borderline, se prenant quasi pour Dieu, il utilise les autres pour montrer sa propre importance. Et il les utilise de manière dangereuse : par l'hypnose et la musique. C'est vrai qu'ils tombent tous dans le panneau !

Sa bande d'amis se réduit à 2 garçons et une fille, en plus de sa soeur Iris, amoureuse d'Oscar.
C'est par le biais d'Oscar, du moins à travers son point de vue, que le complexe d'Eden Bellwether nous sera expliqué. Oscar, le seul à ne pas être étudiant à Cambridge, le seul à venir d'une famille modeste dont les études ne constituent pas le but de la vie, c'est le moins qu'on puisse dire, le seul donc à travailler, il est aide-soignant dans une maison de repos. Oscar, le seul à cultiver une relation dénuée de toute superficialité avec deux hommes intelligents et plus âgés.

J'ai beaucoup aimé suivre les expériences flirtant avec l'irrationnel de cette bande d'amis dirigée et manipulée par Eden.
Oui, l'irrationnel…mais avant de le rejeter, n'oublions pas que « l'irrationnalité d'un phénomène n'est pas un argument contre son existence » (citation de Nietzche). Certaines expériences m'ont bluffée, et j'adhère totalement à l'idée que le mental – sous la forme de l'Espoir - agirait en souverain maitre dans les cas tragiques où la mort n'est plus que la seule issue.
Que dire alors d'Eden, celui qui orchestre cela ! Etre anormal parce que exceptionnel, être exceptionnel parce que anormal, je résume sa personnalité en trois mots : anormalement et exceptionnellement dangereux. Et Oscar n'est pas dupe, depuis le premier jour.

Ce roman provoque la réflexion, immanquablement, tout en cultivant le sentiment amoureux et l'amitié. Très bon cocktail mêlant activation des neurones et de l'émotion.
L'auteur s'est bien documenté et a le sens de la narration.
Bref, si j'ai en horreur ce complexe narcissique dans la vraie vie, je l'ai côtoyé avec grand plaisir dans ce roman.
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Eden Bellwether est un élève brillant, bien conscient de sa supériorité sur les autres. Il cultive cette intelligence auprès d'un petit groupe d'élus, dont fait partie sa soeur Iris, et avec lequel il organise des soirées où joutes verbales, concerts privés et expériences peu communes sont au rendez-vous… Passionné de musique baroque, le jeune homme est persuadé que la musique, parmi ses multiples vertus, a des pouvoirs hypnotiques, qu'il peut mettre au service de la science et de la médecine…


Oscar Lowe, aide-soignant dans une maison de retraite, va faire malgré lui l'expérience de cette étrange théorie… Envoûté par la musique qui s'échappe de la chapelle du King's College, à Cambridge, le jeune homme va assister à la représentation et ainsi rencontrer la jolie Iris dont le charme est loin de le laisser indifférent… Oscar ne s'en doute pas encore, mais il vient de tomber dans les filets d'Eden. Commence alors une lente descente aux enfers qui ne laissera personne indemne…



« le complexe d'Eden Bellwether » est un premier roman qui surprend par son habileté et sa parfaite maîtrise. Benjamin Wood nous met l'eau à la bouche dès les premières pages avec un prélude qui laisse présager le pire et instaure d'ores et déjà une tension qui n'aura de cesse de croître… Aux côtés d'Eden, l'auteur nous plonge dans une réalité autre, complètement déconnectée de la raison et où ce que l'on croyait impossible devient possible… Il ne cesse de repousser les limites de la perception, prêt à démontrer ses hypothèses par des expériences pour le moins spectaculaires. Difficile alors de démêler la vérité de la manipulation…


Toute la complexité et l'habileté du roman consiste à faire des personnages et du lecteur des jouets aux mains d'un esprit brillant et néanmoins perturbé. A travers un sujet passionnant et envoûtant, Benjamin Wood explore avec talent les frontières entre génie et folie, laissant son lecteur à la fois subjugué et horrifié ! Un premier roman haletant, voire dérangeant et néanmoins très réussi ! A découvrir !
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Et si la musique avait le pouvoir d'hypnotiser les gens?

N'est-ce pas ce qui se produit pour tous ces gens heureux, subjugués, dans une salle de concert ? Et que dire de ceux qui souffrent qui se sentent mieux le temps d'un concerto?

Et si la musique pouvait aller plus loin, si elle avait le pouvoir de guérir? de faire en sorte que les blessures se referment plus vite, que les cicatrices disparaissent, que les os se recalcifient?

Et si ce pouvoir menaçait la santé mentale de ceux qui le détiennent?

Un premier roman imposant, qui met en scène un groupe de jeunes, avec des amours et des tensions, ainsi qu'une intrigue mystérieuse.

Et qui apporte aussi de bien belles pages sur la passion pour la musique! On croirait entendre les choeurs…
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Il n'y a rien de plus effrayant que la manipulation.
Rien de plus fascinant non plus, quand elle constitue la trame d'un récit.

C'est un ressort puissant du roman, du polar, du thriller.

Le complexe d'Eden Bellwether tient des trois à la fois – roman de formation et d'initiation sociale -, polar – qui va tuer ? qui va mourir ?-, et thriller – voir les ingrédients détaillés plus loin…

Où la manipulation s' exerce en toute impunité et cruauté.

En vase clos, dans le très chic campus du « college » de Cambridge.

Entre intellectuels distingués, entre gens de bon ton, qui jonglent avec les codes culturels mais qui ont aussi l'humour c'est-à-dire le recul qui permet de ne pas accorder trop de sérieux ou de gravité à ce qui se dit.

Ce qui rend la manipulation effroyable, ici, c'est que son champ est celui de la maladie - de l'accident grave à la maladie incurable.- et que son medium est celui de l'art le plus délicieusement dégagé des contingences matérielles: la musique.

Le péan apollinien – ce chant thérapeutique de l'Iliade- revisité par les orgues de Mattheson ! La musicothérapie comme cure de choc : le clavier déchaîné d'Eden comme un pianocktail distillant le fol espoir, quand on en vient à désespérer de la médecine...

Ajoutons à ce cocktail détonnant un peu de lutte des classes : rentrer dans la petite bande des happy few est un rêve pour Oscar, aide-soignant dévoué mais sans diplôme, qui rêve de sortir de son milieu… et Eden sait aussi jouer de cette corde-là.

Saupoudrons d' une pincée de passion : l'amour d'Oscar pour Iris, la soeur d'Eden, musicienne, brillante étudiante…. en médecine, mais inquiète, fragile devant ce frère envahissant, narcissique, si inquiétant parfois mais qui sait se rendre indispensable!

Enlevons d'un coup d'épuisette les adultes référents : les parents d'Iris et d'Eden sont de vrais enfants, des êtres de fuite, immatures, qui ne veulent rien voir, rien comprendre et surtout rien assumer...

Rajoutons alors quelques grammes de vieux sages : le Dr Paulsen, grognon mais lucide, le patient favori d'Oscar à la maison de retraite, qui lui prête le Traité des Passions de Descartes et le met en garde contre les charlatans de tout poil, et le Dr Crest, ancien amant du précédent, psychiatre renommé, qui pourrait bien détenir la clé du problème, s'il n'était fragilisé par son tendon d'Achille à lui: une méchante tumeur au cerveau...

Secouez…et laissez le mélange agir !

Vous avez la recette d'une petite bombe qui va vous tenir en haleine dès la première page: on sait en effet dès le début que tout finira en catastrophe- mais cette prolepse reste toutefois assez vague pour laisser planer tension, crainte, et doutes...

Très fort!

J'ai pensé tout le temps au Maître des Illusions de Donna Tartt, en moins vénéneux, alcoolisé et déjanté mais aussi en beaucoup mieux construit- la fin du roman de Donna Tartt est à mon sens franchement ratée.

J'ai aussi beaucoup pensé à un film de Losey scénarisé par Harold Pinter, « Accident », qui se passe à ...Oxford
- Cambridge, Oxford, c'est Oxbridge !- et dont les ambiguïtés, les dialogues pleins de brio sont au diapason du climat étouffant et étincelant du Complexe d'Eden Bellwether.

Et dire que c'est un premier roman!!

Vraiment très prometteur, j'attends le prochain Benjamin Wood avec impatience!
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