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Critique de le_Bison


Cambridge, de la musique, un cercle de jeunes, beaux et bourgeois pour une ambiance vouée aux poètes disparus.

C'est alors que les tuyaux de l'orgue firent brusquement éclater un rugissement formidable et discordant. La musique s'emballa. le volume augmenta. le timbre de l'instrument changea, de grinçant il devint retentissant.[…]

La musique comme thérapie. La musique comme aliénation. Ou comment un être peut sombrer dans l'art comme dans la folie. Somptueuse mélodie que ces touches noires et blanches, l'harmonie qui s'envole et l'esprit qui s'effrite. La raison disparait dans les méandres de ces accords, comme la mousse de ma bière qui s'efface face à l'insistance de mes lèvres à plonger dedans.

Prêterait-on des vertus à cet orgue comme l'on en donne au cannabis, parce que cette musique semble guérir. Comme une puissance irrationnelle. Soigner des maux, effacer même les maux humains. Une musique illuminée comme une écoute sous hypnose ou sous LSD. Question de croyance ou de feeling. Et question musique sous LSD, j'en connais un rayon. Mais au-delà de l'orgue, au-delà des musiciens, des voix et des instruments, c'est surtout la partition accouchée sur cette feuille de papier qui donne tout le pouvoir à cette harmonique.

Cette musique-là était pleine d'énergie, furieuse et contagieuse, fiévreuse et tranchante. Elle évoquait un jaillissement d'eau, un troupeau d'animaux affolés, un formidable tumulte, un océan qui se déchire, deux grandes armées marchant l'une vers l'autre. Son jeu de pieds produisait des notes graves et voilées qui se mêlaient à la mélodie tissée par ses doigts, donnant du corps, de l'épaisseur au son. Il faisait sonner chaque note basse sans même baisser les yeux, avec des pressions légères de ses pieds nus, des mouvements talon-pointe de danseur de salon expérimenté, ajoutant des accords brusques et percutants, tout en faisant courir ses doigts sur les touches. Puis il actionna une commande et décala ses mains vers le bas d'un mouvement fluide, passant du clavier supérieur au clavier inférieur, si bien que les touches de tous les claviers suivaient le mouvement incessant de ses doigts. La musique se fait plus lourde, plus sombre. Les touches s'enfonçaient et se soulevaient toutes seules, comme si des chats invisibles couraient dessus. […]

Un roman merveilleux, première partition littéraire d'un Benjamin Wood pris en trance devant les mots et les notes. Une oeuvre magistrale entre folie et art. L'un ne se dépareille pas de l'autre, et pour devenir l'un il faut être l'autre ou vice-versa. Mais lorsque l'art est poussé à sa folie, la perception est toute différente. Elle capte l'attention, elle hypnotise, elle dérange et provoque le malaise, car en allant au bout de sa folie, la vie ne peut que sombrer dans le drame. Fraicheur et envoutement ; des notes, simples doubles avec croches, noires ou blanches, qui ont le « pouvoir » de pénétrer une âme réceptive, comme une odeur qui monte en toi, un parfum qui t'enveloppe, une bière qui t'enivre, un vent qui ondule ou une femme qui te chevauche.

Le son ne pouvait pas s'échapper ailleurs. le bâtiment n'allait certainement pas le contenir. Il allait faire voler le toit en éclats. Mais à cet instant, Iris joua un trille aigu qui trancha sur le souffle puissant de l'orgue. Sa main gauche glissa sur le manche de son violoncelle, et elle se mit à jouer des accords rapides et nerveux – un deux trois quatre, un deux trois quatre – qui trouvèrent leur propre place au milieu de la clameur croissante.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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