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Critique de Olivia-A


Résidente à Portmantle depuis dix ans, Knell tente de retrouver l'inspiration pour peindre. Au fil des années, elle s'est familiarisée avec ce refuge pour artistes en difficulté, bien caché sur une île au large d'Istanbul, bercé par les vagues de la Marmara. Elle a tissé des liens forts avec trois autres résidents anglais, même si elle ne les connait que par leur nom d'emprunt, ce nom tiré des pages de l'histoire que le doyen leur a attribué pour préserver leur anonymat. Elle non plus en fait, ne s'appelle pas Knell, mais Elspeth Conroy et il fut un temps où elle était considérée comme l'étoile montante de la peinture abstraite britannique.
Le petit monde restreint de Knell est chamboulé par l'arrivée d'un jeune garçon torturé, tourmenté par des rêves traumatisants, mais nécessaires à son processus créatif. Est-il musicien, peintre, écrivain ? Nul ne le sait vraiment, mais il sème le trouble dans cette résidence où calme et tranquillité sont des règles d'or. Perturbée par cette arrivée, Knell s'attache au garçon, s'en inquiète et laisse sa mémoire s'égarer vers sa vie d'avant Portmantle…
Benjamin Wood revient dans ce second roman sur ses thèmes de prédilection : le génie, et la folie (nécessaire ?) qui l'accompagne. Ici, le processus créatif est au centre du roman : il gouverne les personnages, tous ces artistes désoeuvrés pour qui la vie doit être dédiée à l'art et qui pourtant, n'arrivent à rien dans leur travail. Elspeth Conroy est totalement à la merci de ses instincts artistiques : dans ses phases les plus productives, elle s'enferme en solitaire dans son atelier, se nourrit à peine et se néglige totalement pendant dans des semaines afin de pouvoir accoucher de ses tableaux. Retour aux clichés de l'artiste fou et incapable de libre arbitre devant l'élan incontrôlable de l'inspiration – c'est déjà vu et revu. Faire échouer tous ces artistes à bout de nerfs dans un même endroit salvateur, une sorte de sanatorium secret basé en Turquie, il fallait y penser. le décor, le contexte est intéressant, les règles de l'endroit sont quelque peu loufoques, mais tout cela prend son sens globalement, on aime l'idée de ce lieu rédempteur – même si totalement inutile, à ce stade, pour nos personnages principaux.
Le roman se découpe en quatre temps : plantage du décor, mémoires d'avant Portmantle, retour au présent, chute. La partie la plus crédible et la mieux écrite reste celle des mémoires d'Elspeth, son parcours pour devenir peintre : une fille d'ouvriers qui se démène dans l'Angleterre des années 1960 pour se faire une place sur la scène artistique londonienne, ses premiers amours, et ses premiers ébats. Jusqu'au jour où tout dérape, et elle sombre dans une dépression atroce où elle n'arrive plus à peindre des tableaux ayant du sens, de la profondeur. Tout part en vrille – et ça part vraiment très loin.
A peine la troisième partie du récit commencée, le lecteur comprend rapidement ce qu'il se cache derrière les grilles de Portmantle, derrière ces règles absurdes et le personnage énigmatique de ce garçon étrange. C'est attendu finalement, sujet déjà souvent traité par la littérature et le cinéma – et déjà mieux exploité si vous voulez mon avis. C'est dommage, Benjamin Wood consacre les deux tiers de son roman à faire monter la tension dramatique pour la laisser retomber maladroitement dans le dernier tiers. Après avoir minutieusement décrit les endroits, les ressentis, les pensées, il passe rapidement sur les mécanismes psychologiques latents et passionnants qu'il s'était pourtant donné les moyens d'explorer. La fin est bâclée, et notre lecture aussi.
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