LES VIERGES DU PARADIS de
BARBARA WOOD
J'ai lu ce livre comme un témoignage de la vie des femmes dans l'Islam, en Egypte, depuis le début du 20ème siècle. L'histoire de cette famille d'aristocrates suit l'histoire de l'Egypte, depuis le roi Farouk (1920-1965), le coup d'état des « officiers libres » avec Nasser puis Sadate… jusqu'en 1988 ; Dépaysement assuré, dans une autre époque et un autre coin du globe. La famille Rachid vit dans un palais « impasse des vierges du paradis », réunie autour de l'héroïne, AMIRA, mère et grand-mère qui regroupe autour d'elle enfants et petits-enfants et contribue au maintien des traditions ancestrales. le personnage principal de la maisonnée est le fils, Ibrahim, car le père est mort, il est le médecin particulier du roi Farouk.
On suit l'histoire des différents personnages, particulièrement des filles au destin modelé par les préceptes religieux dont le principal est celui de la soumission complète à leur père puis à leur époux. Objets d'échanges entre hommes, en fonction de leurs intérêts financiers ou de prestige, elles sont mariées sans avoir la possibilité de faire valoir leurs sentiments, puis doivent obéissance à leur mari, qui garde la possibilité de les répudier à sa convenance (il lui suffit alors en ce début de 20ème siècle de prononcer 3X la formule « je te répudie » pour que la femme soit jetée dehors avec ses enfants et sans ressources. Heureusement la loi impose peu à peu au mari d'informer sa femme de sa décision ! Si le mari est violent, comme c'est le cas pour Yasmina, elle doit supporter ses coups car le dénoncer signifierait ruiner l'honneur de la famille. Une fille violée ne peut dénoncer son violeur et doit cacher sa honte pour la même raison car une fille ne peut approcher un garçon sans la présence d'un membre masculin de sa famille. En cas de viol, ce ne peut être qu'elle la coupable. Au début du siècle, les femmes ne peuvent sortir que rarement de leur maison et jamais sans accompagnement. Toutes ces règles et ces contraintes sociales font que les non-dits sont fréquents, tout comme les secrets de famille. La fille ainée d'Amira, Fatima, a été chassée de la maison et personne n'a plus le droit de prononcer son nom, elle n'existe plus pour la famille. Toutes les photos d'elle ont disparu. Yasmina, après son viol, s'exile aux Etats-Unis pour poursuivre ses études de médecine mais ignore que l'enfant dont elle a accouché n'est pas mort-né comme on le lui a dit. Amira quant à elle, ignore son origine et recherche d'où elle vient, (elle a été enlevée petite ). L'un des devoirs d'un fils est celui de d'engendrer un fils, mais Ibrahim n'y parvient pas et choisit le subterfuge d'adopter en secret celui d'une mendiante qu'il prend à son service.
On imagine les développements, les drames et les larmes que tous ces secrets finissent par provoquer au détriment de tous, femmes et hommes.
Ce livre peint le tableau terrible de la condition des femmes que la religion tient dans un carcan néfaste à l'épanouissement et donc aux relations à l'intérieur de la famille. BW décrit avec subtilité chacun des personnages et dresse un tableau vivant de cette société archaïque qui se dirige à la fois vers la modernité mais aussi vers le fanatisme car les frères musulmans ne sont pas loin. On prend grand plaisir à lire ce roman sur une toile de fond historique et qui pousse à réfléchir sur les droits des femmes, difficile conquête arrachée à la toute -puissance des traditions et de la religion.
Lien :
https://chevalier.chant@gmai..