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Critique de Madame_lit


hère lectrice, Cher lecteur,

J'ai décidé de lire Vers le phare de Virginia Woolf car M. Robert Benoit me l'a gentiment proposé. Alors, j'ai plongé dans ce livre en même temps que lui et je tiens à le remercier pour cette proposition. Je possède Romans, essais de Virginia Woolf de Quarto Gallimard alors j'ai lu Vers le phare à partir de ce bouquin.

Virginia Woolf et Madame lit

Il est des autrices et des auteurs dont il m'est difficile de parler sur ce blogue. Virginia Woolf fait partie de cette catégorie. Pourquoi? Je crois que je suis intimidée par elle et par son intelligence. Sa plume apparaît tellement magnifique, son talent s'avère incommensurable, ses personnages semblent inoubliables. Son génie est couché là, sur le papier. Qui d'ailleurs peut oublier le formidable incipit de Mrs. Dalloway : «Mrs. Dalloway dit qu'elle irait acheter les fleurs elle-même». Il suffit d'ouvrir un de ses romans et de prendre le temps de savourer chaque phrase qui appelle au recueillement. Je retiens mon souffle lorsque je lis ses mots et je plonge dans mon intériorité la plus sombre. Sa façon d'aborder la mort, le temps qui passe, les drames de la vie, m'atteint profondément. Je ressens sa douleur à travers ses mots. Pour moi, les univers de Virginia Woolf sont un peu cela et beaucoup plus… à l'image d'une cathédrale trop belle pour les yeux.

Et le phare (paru en 1927) ?

Le phare raconte l'histoire des Ramsay à des moments précis de leur vie et de certains de leurs amis. Quelque part sur une île située en Écosse, les Ramsay reçoivent dans leur maison de vacances des amis (peintre, scientifique, écrivain). Ce couple a 8 enfants et l'un d'entre eux, James, souhaite aller au phare. Une expédition se prépare mais cette dernière aura lieu dix ans plus tard.

Dialectique mer-mère

Dans ce livre, le lecteur suit le rythme de l'eau ou celui imposé par la figure maternelle. La mer/mère est toujours présente. Il peut s'agir parfois de la mère, la mère adorée, la mère aimante, la mère trop belle, la mère synonyme du paradis perdu. Cette mère est aussi prisonnière de l'autorité patriarcale, c'est une mère qui aime son mari, elle est au centre de tout l'univers. Mais encore, cette mère possède une intériorité riche. Elle perçoit la réalité, l'analyse, elle essaye de la modifier en créant à sa façon la beauté du monde (un jardin, une lecture); elle devient une «éponge imbibée d'émotions humaines». Cette mère, c'est bien entendu Mrs. Ramsay. Elle est partout, elle est 10 000 fois supérieure à son époux. Mrs. Ramsay apparaît comme un magnifique personnage qui sait où se trouve son bonheur, qui connaît le sens de son existence. le phare, est-ce elle qui éclaire par sa beauté, par sa bonté, par son amour son entourage? Ou encore, est-elle cette forme évoquant la solitude, la vérité de toutes choses?

Par ailleurs, la mer encercle les protagonistes. Sous la plume de Virginia Woolf, la nature participe à la description intérieure des personnages. À cet égard, la mer s'avère la métaphore des émotions humaines.

«Ils venaient là régulièrement chaque soir, poussée par quelque besoin intérieur. Comme si l'eau faisait flotter, voguer des pensées devenues stagnantes sur la terre ferme, et procurait à leurs corps mêmes une espèce de détente physique. D'abord, la vibration de la couleur inondait la baie de bleu et le coeur se dilatait lui aussi et le coeur ondoyait librement avant d'être aussitôt freiné et glacé par la noirceur épineuse dont se hérissait chaque vague.» (p. 245-246)

Il y a de sublimes passages sur les vagues, l'eau. Les vagues rythment le récit. Elles deviennent la puissance lyrique de ce dernier au gré des émotions de l'un, puis de l'autre.

Lily Briscoe

Par le biais de ce personnage peintre que j'ai adoré, le lecteur est amené à percevoir l'univers des protagonistes. Lily cherche à rendre compte de l'endroit où elle se trouve car elle est amoureuse de la perfection de ce dernier. Elle aime voir, percevoir, chercher un sens. Grâce à elle, le lecteur a accès à de très beaux questionnements sur la mort, sur la vie, sur la vérité de toutes choses.

«Quel est le sens de la vie? Rien d'autre – une question simple, qui semblait se faire plus pressante au fil des années. La grande révélation n'était jamais arrivée. En fait, la grande révélation n'arriverait peut-être jamais. C'étaient plutôt de petits miracles quotidiens, des illuminations, allumettes craquées à l'improviste dans le noir ; en voici une. Tout cet ensemble; elle-même, Charles Tanslay et la vague déferlante; Mrs. Ramsay les rassemblant; Mrs. Ramsay disant : «Qu'ici la vie s'arrête»; Mrs. Ramsay faisant de cet instant quelque chose de permanent (tout comme Lily s'efforçait de le faire dans un autre domaine)- cela tenait de la révélation.» (p. 351)

Lily la vieille-fille occupe, entre autres, la troisième partie du livre. Elle offre une manière de comprendre le travail d'un artiste tout au long du récit. C'est en quelque sorte une façon de rendre hommage aux artisans qui tentent de dévoiler la beauté de l'existence par le biais de leurs oeuvres. Il faut lire son questionnement par rapport à sa quête de la perfection. C'est touchant.

Vous l'aurez sans aucun doute compris, j'ai adoré ma lecture. Pour moi, lire un bouquin de Virginia Woolf, c'est toujours une aventure existentielle. Parfois je me perds, mais chaque fois, je reviens, comme une vague se couchant sur le sable après la tempête.

https://madamelit.ca/2022/01/19/madame-lit-vers-le-phare-de-virginia-woolf/


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