Je poursuis la lecture de cette auteure aussi engagée que talentueuse...
Après "
L'Enfant unique", et "
Funérailles célestes"...j'ai achevé en une
nuit insomniaque: "
Chinoises"...Un livre faussement désordonné, avec moult témoignages des plus significatifs et éclairants !...
Je tire mon chapeau à cette femme, qui , fille d'un milieu libéral, a souffert
, dans son enfance et sa jeunesse, de la main mise du Parti communiste et
de la Révolution culturelle, ayant dû composer avec..., du mieux possible,
pour faire avancer les choses, dont le sort des femmes; ses émissions de
radio, son travail journalistique...ses engagements et la défense de ses
convictions...
Qu'un véritable espace de parole existe ... !
"Personne ne m'a félicitée d'avoir sauvé cette jeune fille, par contre, j'ai eu droit à des critiques pour « avoir mis les troupes en branle et troublé l'ordre public » et avoir gaspillé le temps et l'argent de la station de radio. Ces reproches m'ont ébranlée. Une jeune fille s'était trouvée en danger et quand on allait à son secours, on vous accusait de « dilapider les deniers
publics ». Que valait donc la vie d'une femme en Chine ?"
Un ouvrage où l'on perçoit les bouleversements gigantesques vécus par
la Chine, à travers ses régimes politiques extrêmes...et enfin, tardivement
son ouverture au monde. Mais que de tragédies et d'individus sacrifiés
pendant des décennies... où les premières victimes étaient les femmes et
les enfants !!...
Un ensemble de témoignages des plus prenants et dérangeants... où
nous pouvons lire à la fin de l'ouvrage que l'espérance de vie la plus
courte se trouve dans quatre professions : ouvriers d'usines chimiques,
Les chauffeurs routiers longue distance, les policiers, et plus SURPRENANT : Les journalistes !! ?
Tous ces journalistes qui ont vu un trop grand nombre d'événements
choquants, écrasés par les contrôles du Parti... Souvent contraints
d'écrire des choses avec lesquelles ils n'étaient pas d'accord...
Ce livre, comme les autres écrits de cette écrivaine-journaliste ont d'autant plus de mérite d'exister.
Xinran avoue avoir décidé d'abandonner sa carrière de journaliste, se trouvant en permanence tiraillée, déchirée entre la vérité et le tragique des témoignages recueillis , écrasés par la censure omniprésente du pouvoir politique. Elle nous confirme que si elle a pu publier ces témoignages c'est parce qu'elle l'a fait en Angleterre...
"Je me suis souvenue de ce que le Vieux Chen m'avait dit : "
Xinran, vous devriez écrire tout cela. Ecrire permet de se décharger de ce qu'on porte et cela peut aider à créer un espace pour accueillir de
nouvelles façons de penser et de sentir.
Si vois n'écrivez pas ces histoires, leur trop-plein va vous briser le coeur.
" A l'époque, en Chine, écrire un livre tel que celui-ci m'aurait peut-être
valu la prison. Je ne pouvais prendre le risque d'abandonner mon fils ou
ces femmes qui comptaient sur l'aide et les encouragements que leur
apportait mon émission de radio. En Angleterre, le livre est devenu possible. Comme si une plume m'avait poussé dans mon coeur." (p. 352)
Vraiment très heureuse d'avoir enfin découvert cette auteure....Cela me donne envie de relire "
Balzac et la petite tailleuse chinoise" de
Dai Sijie...