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EAN : 9782020319874
192 pages
Seuil (03/02/2000)
3.64/5   22 notes
Résumé :

" D'un bout à l'autre du monde méditerranéen, un motif ornemental revient avec une puissance presque obsédante.

C'est une sorte de rosace, ou plutôt un polygone pointant vers l'extérieur des angles offensifs.

" Rencontrant Jacques Berque à Tunis, en 1958, Kateb Yacine décidait que tout son travail procéderait (et avait, depuis l'origine, procédé) de la figure du " polygone étoilé ".

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Roman de Kateb Yacine. Lettre Y de mon Challenge ABC 2010.

Quatrième de couverture : "D'un bout à l'autre du monde méditerranéen, un motif ornemental revient avec une puissance obsédante. C'est une sorte de rosace, ou plutôt un polygone pointant vers l'extérieur des angles offensifs." Rencontrant Jacques Berque à Tunis en 1958, Kateb Yacine décidait que tout son travail procéderait (et avait, depuis l'origine, procédé) de la figure du "polygone étoilé". Ce livre au carrefour du roman, de la poésie et du théâtre, à la frontière du récit et de l'oral, peut être considéré à juste titre comme fondateur de la littérature algérienne moderne.

Les habitués de ce blog savent que citer la quatrième de couverture révèle mon incompréhension ou mon désappointement. Sans fioriture, je dis simplement que je suis passée à côté du livre. Sa forme est déconcertante : la poésie se mêle à la prose, le narratif alterne avec des dialogues théâtraux, les descriptions s'enchaînent avec les réflexions. Il me semble que le texte révèle toutes les voix de l'Algérie, qu'il s'efforce d'incarner chacune d'elle et de leur donner la parole. Voyageant entre proximité historique et temps immémoriaux, le récit semble se dérouler comme une tapisserie à trous, un long ruban qui ménage des analepses. Entre ballade populaire et poésie épique, le polygone étoilé a des airs de cosmogonie algérienne, comme si le récit concentrait en une seule et même place tout ce qui fait le pays.

J'ai saisi des bribes du voyage de Lakhda et de quelques autres Algériens. Ils quittent l'Algérie clandestinement, rejoignent Marseille, puis essaiment en France en fonction du travail, jusqu'à Lyon, Grenoble, Paris. La colonisation, la décolonisation, le rêve de revenir au pays riche et reconnu sont des repères omniprésents. La pauvreté de l'émigré algérien ne fait aucun douts, mais s'entoure d'un fatalisme grinçant: "Ca fait rien / C'est un Algérien / qui travaille beaucoup / et qui mange rien [...] Un Algérien / prolétarien / qui souffre et qui dit rien." (p. 59 et 60) Les prénoms des protagonistes s'effacent peu à peu au profit d'identités qui portent une histoire. Ammar, Hassan et les autres disparaissent pour devenir Mauvais Temps, Pas de Chance, Visage d'hôpital, Face de Ramadan. Ces nouvelles désignations racontent chacune une portion de l'histoire des émigrés algériens.

Certains thèmes semblent être récurrents voire fondateurs. La femme apparaît tel un fanal, sa beauté est chantée et reconnue, presque crainte. Nedjma, personnage d'un précédent roman éponyme de l'auteur, apparaît à la fin du récit, mais floue, comme esquissée. "On connaissait Nedjma sans la connaître." (p. 152) Cette impression est également celle du lecteur. Il est évident que le polygone étoilé renvoie et rappelle les autres textes de l'auteur, mais subtilement, comme une grille de lecture à superposer à tous les récits.

L'instance narratrice est polymorphe. Tantôt distante voire absente, elle livre le récit de Lakhdar et de ses comparses. Elle disparaît dans les passages poétiques, à moins qu'elle soit son incarnation la plus pure. Un "je" apparaît parfois, flou et sans nom. Difficile de savoir qui tient le récit, qui le délivre et pourquoi. Mais il semble que ces questions ne sont pas fondamentales pour appréhender l'histoire.

Me voilà à la fin de la lecture d'une oeuvre majeure de la littérature moderne et je suis dépitée de n'en tirer que du sens théorique, de ne reconnaître que des trames. Je suis déçue de ne pas avoir ressenti le texte. À se demander si les études littéraires n'empêchent pas parfois une approche libérée et purement sensible...
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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Dernier livre du challenge ABC 2015.

Appelé roman, ce texte un peu décousu a beaucoup de la prose poétique, surtout au début, où l'on devine qu'il est question de la guerre d'Algérie, mais aussi de la Première Guerre mondiale. On a des lignes très particulières sur le rapport bourreau-victime. On suit Lakhdar en France où il cherche du travail. C'est probablement mon passage préféré ; j'y lis, le coeur serré bien que le pathétique ne soit pas du tout la tonalité recherchée par l'auteur, une chronique de mon grand-père, arrivé en France à la même époque. Il y a plusieurs pages très émouvantes sur sa propre histoire familiale et l'amour pour Nedjma.

Certaines images sont à la fois choquantes et talentueuses.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Jamais je n’ai cessé, même aux jours de succès près de l’institutrice, de ressentir au fond de moi cette seconde rupture du lien ombilical, cet exil intérieur qui ne rapprochait plus l’écolier de sa mère que pour les arracher, chaque fois un peu plus, au murmure du sang, aux frémissements réprobateurs d’une langue bannie, secrètement, d’un même accord, aussitôt brisé que conclu… Ainsi avais-je perdu tout à la fois ma mère et son langage, les seuls trésors inaliénables – et pourtant aliénés ! (p.181-182)
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Les deux bars du village sont tenus, l'un par un Français, l'autre par un juif. Mais une incontestable majorité arabo-berbère se retrouve au comptoir. Le Français compte les gendarmes parmi ses clients les plus assidus ; en seconde position, viennent les honnêtes gens, y compris l'administrateur, à la sortie du jeu de boules. Un joli monde, et même des femmes à la recherche de leurs maris.
Le juif, plus proche du peuple, accueille tous les assoiffés, sans distinction de race ni de religion. Il cache, pour aujourd'hui, dans son arrière-boutique, un conseiller municipal trahi par ses amis de la sous-préfecture, saoul à l'ultime degré depuis le jour des élections. Cette cuite héroïque est la seule forme jusqu'ici de la protestation unanime contre les truquages.
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Mon père prit soudain la décision irrévocable de me fourrer sans plus tarder dans la « gueule du loup », c’est-à-dire à l’école française. Il le faisait le cœur serré.
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Le Colonel : Quand on n'a jamais vécu dans la troupe, quand on n'a pas senti la douleur et la crispation des hommes qui vont déboucher pour l'assaut et probablement mourir, quand on n'a pas vu de ses yeux les rangs fauchés autour de soi par la mitrailleuse, il est très facile de téléphoner de loin, du fond d'un P.C. sûr et confortable : "Attaquez, attaquez coûte que coûte !" et ensuite d'aller dîner. Être un bourreau d'hommes, c'est la meilleure manière de décrocher les étoiles. Quant aux soldats, ils se demandent si mourir pour le communiqué, c'est mourir pour la France.
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Ne soupirons pas dans la cendre de nos ancêtres présumés ; s'ils ont brouillé leur trace, n'est-ce pas pour nous initier au gouffre où ils vont de l’avant, suspendus à leur chute ? Et c'est à eux d’escalader le gouffre, à eux de rester sourds à nos questions.
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Videos de Kateb Yacine (14) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Kateb Yacine
L'acteur Reda Kateb est le directeur de cabinet d'une maire du 93, jouée par Isabelle Huppert, dans "Les Promesses", le nouveau film de Thomas Kruithof. Un élément de plus à ajouter dans la palette filmographique politique impressionnante de celui ayant incarné Django Reinhardt en 2017.
À deux pas de Paris, il incarne Yazid, le directeur de cabinet dévoué et ambitieux d'une maire du 93, jouée par Isabelle Huppert, avec pour défi de faire accepter le projet de rénovation de la cité des Bernardins - délabrée et en proie aux marchands de sommeil - à la commission du Grand Paris. Lorsque l'ambition de la maire la détourne de cet objectif, c'est Yazid qui reprend les choses en main joué avec nuances et humanité par Reda Kateb. Un film qui sait décortiquer les niveaux de pouvoir et tenir en haleine.
C'est par sa famille que Reda Kateb découvre le jeu. Son père est un homme de théâtre ayant fondé le Théâtre national algérien dans les années 80 et son grand-oncle n'est autre que l'auteur Kateb Yacine, fondateur de la littérature moderne algérienne qui "appelait à écrire en français en tant qu'auteur algérien. Il appelait ça 'arracher le fusil des mains du parachutiste' " explique Reda Kateb.
Le fil rouge de sa filmographie tient à un certain engagement social, politique et humain auprès des thèmes qu'il choisit de traiter et des réalisateurs avec qui il choisit de travailler. Pour celui qui refuse l'étiquette hétéroclite d'artiste engagé, c'est l'ancrage dans le réel qui importe et oriente ses choix comme le rôle d'étudiant en sociologie qu'il joue pour Claire Simon dans "Gare du Nord", le médecin algérien dont les diplômes ne sont pas reconnus en France au moment de la transformation de l'hôpital public qu'il incarne pour Thomas Lilti dans "Hippocrate" ou encore le vigile et étudiant infirmier dans "Qui vive" de Marianne Tardieu.
Olivia Gesbert invite à sa table le comédien Reda Kateb pour nous parler de son dernier film.
#Cinéma #RedaKateb #LesPromesses _____________
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Kateb Yacine est un auteur francophone,

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