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sur 1224 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Belle découverte que le Problème Spinoza.

J'y suis rentré à reculons, la philo et moi n'ayant jamais été soudé comme les six doigts de la main. Puis s'installe très rapidement une trame brillante et insolite. le portrait croisé de deux hommes que tout oppose. Spinoza, homme fort de son intégrité intellectuelle en perpétuelle quête de bonheur, du bonheur dans son plus simple appareil, et qui n'hésitera pas à s'opposer aux principes fondateurs de tout un peuple, le sien, au risque de s'aliéner toute la communauté. Parallèlement l'on découvre le Reichleiter Rosenberg totalement déboussolé à l'idée qu'un petit juif ait pu être porté au pinacle par Goethe qu'il admire par-dessus tout, Hitler excepté. Véritable éminence grise du Nazisme, Rosenberg n'aura de cesse de se construire et d'évoluer au sein de l'appareil d'état, quémandant douloureusement la caresse servile d'un führer qui l'utilise plus qu'il ne l'apprécie. Deux portraits forts et complexes tout aussi passionnants qui méritent le détour pour peu qu'on en accepte le postulat de départ...

L'auteur a bossé le sujet et cela se sent d'entrée de jeu. L'évolution sociétale néerlandaise du XVIIe décrite conjointement à celle d'une Allemagne balbutiant encore ses gammes Hitlériennes participe grandement à l'intérêt d'un tel ouvrage pouvant sembler rébarbatif de prime abord. L'intrigue vous happe littéralement. La vulgarisation philosophique passionne au point de vouloir pousser plus avant le sujet ultérieurement.

Original et racé, le Problème Spinoza a tout d'un très grand roman qui interpelle tout en suggérant plusieurs pistes personnelles. Que demander de plus ?

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Le nouveau roman d'Irvin Yalom est dédié à Spinoza, un génie s'il en fut et ça tombe vraiment bien car il est sans doute le philosophe à qui je porte la plus grande admiration. Mais Irvin Yalom ne se contente pas d'un roman biographique car son texte a deux versants et le second est dédié à la vie d'un des hommes les plus terribles du siècle : Alfred Rosenberg qui fut à l'origine de l'idéologie nazie prônant la supériorité de la race aryenne et l'antisémitisme et qui un jour eut à faire avec Spinoza et plus spécialement sa bibliothèque.
Une face lumineuse et une face obscure.

La face lumineuse d'abord : Irvin Yalom nous propulse dans l'Amsterdam du XVII ème siècle dans les boutiques qui jouxtent la Synagogue. Il nous fait faire la connaissance de Bento Spinoza (ou Baruch ou Benedictus) et nous le montre étudiant déjà érudit, promis aux plus hautes fonctions, mais ... il y a un mais de taille, Spinoza est à quelques jours de son excommunicationou Herem, par les rabbins de la Synagogue d'Amsterdam.

Le Herem prononcé le 27 juillet 1956 est infamant et définitif :
« Nous excluons, chassons, maudissons et exécrons Baruch de Spinoza »
Il est non seulement exclu mais les rabbins attirent sur lui les foudres divines
« Qu'il soit maudit pendant son sommeil et pendant qu'il veille. Qu'il soit maudit à son entrée et qu'il soit maudit à sa sortie. Veuille l'Éternel ne jamais lui pardonner. Veuille l'Éternel allumer contre cet homme toute Sa colère et déverser sur lui tous les maux mentionnés dans le livre de la Loi : que son nom soit effacé dans ce monde »
Et pour la mise au ban soit totale :
« Qu'il ne lui soit rendu aucun service et que personne ne l'approche à moins de quatre coudées. Que personne ne demeure sous le même toit que lui et que personne ne lise aucun de ses écrits. »

Baruch Spinoza a bien des tords, il a ouvertement mis en cause le contenu de la Torah, son origine divine, il s'interroge : avec qui les enfants d'Adam et Eve se sont-ils mariés ? Comment Moïse pouvait-il écrire sur sa propre mort ? La Torah ne serait-elle pas un conte à dormir debout et la vérité de Dieu ne serait-elle pas ailleurs ?

La face obscure est celle d'Alfred Rosenberg, étudiant qui vers 1910 se passionne pour les thèses de Houston Chamberlain sur la prétendue supériorité de la race aryenne, ayant tenu un discours antisémite virulent il est sommé de s'expliquer devant la direction et se voit contraint de faire un travail sur les écrits de Goethe et sur l'admiration que le « Génie allemand » porte à Spinoza.
Ce pensum Alfred Rosenberg s'en acquitera mais cela n'aura pas l'effet escompté par ses professeurs. La trajectoire d'Alfred Rosenberg va définitivement s'infléchir vers le mal.

Irvin Yalom tresse un récit passionnant de bout en bout, le portrait de Spinoza et son parcours qui aboutit à une Ethique de la joie se dévore littéralement. La vie et la pensée de Spinoza nourrissent le livre et même s'il s'agit ici d'une simplification de la pensée du philosophe, celle-ci est habile et juste.
Les ruptures occasionnées par le texte sur Rosenberg sont l'occasion de s'interroger sur la nature du mal, sur son inéluctabilité. Quelque chose ou quelqu'un aurait-il pu empêcher cet homme de devenir un des plus grands criminel ?
Cette construction en deux volets est très réussie et les liens entre les deux récits très efficaces.
On retrouve ici le meilleur de Yalom, sens du récit, écriture prenante, originalité du propos, bref un très très bon livre.

Lien : http://asautsetagambades.hau..
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dans ce roman où la fiction talonne l'histoire nous chevauchons deux époques et allons à la rencontre de deux personnages que tout oppose.
Baruch Spinoza et Alfred Rosenberg. Spinoza juif precurseur de la laïcité, maître à penser des philosophes des lumières.
L'auteur du traité de la réforme et de l'entendement, de l'éthique sera excommunié en 1656 en raison de son athéisme et de la remise en question des écrits biblique.Cet herem où excommunication veut dire la fin de tout contact avec la famille, les amis,la communauté.
Entre le polissage des verres d'optiques une nouvelle vie s'offre à lui, une vie dédiée à l'étude et à la réflexion.
Alfred Rosenberg quand à lui fait grise mine, remarqué par le proviseur de son lycée pour ses discours anti sémite,cet élève de 16 ans deviendra l'idéologue du parti nazi. ce personnage obsédé par le declin de la race aryenne a des origines juives, lui qui ne jure que par Goethe voit son Idole ne jurer que par Spinoza
" Goethe dit que Spinoza lui a appris à délivrer son esprit de l'influence des autres.
Pauvre Alfred, entre psychotherapie et sa souffrance de ne pas être reconnu pour son mérite,il va partir en quête du graal où comment un juif comme Spinoza a pu attirer cet écrivain génial qu'est Goethe.
J'ai aimé l'écriture de Irvin Yalom, sa façon de passer d'une époque à l'autre, on sent le thérapeute dans sa façon de poser les questions via Friedrich psychanalyste de l'école Freudienne.
On pourrait presque en sourire, " le fameux complot juif ".
Cette façon de découvrir la philosophie de Spinoza m'a séduit.
A la fin du roman on apprend que le herem de Spinoza sera levé grâce à Ben Gourion entre autre, une rue de Tel Aviv porte son nom, quand à Alfred Rosenberg il sera condamné à mort lors du procès de Nuremberg. Pendu et incinéré dans un four crématoire de Dachau.



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- Alors, chère Michfred, terminée, cette lecture, si souvent remise aux calendes grecques, mais que vous avez achetée deux fois, de crainte,   sans doute d'y échapper?  J'ai le sentiment que vos tensions à son sujet s'apaisent.. Nous pouvons en parler , si vous voulez...

- Mmmm ...pas fâchée d'avoir bouclé ces 500 pages..

- On dirait que vous redoutiez quelque chose.. serait-ce le titre qui vous effrayait tant? Problème, Spinoza...Associez, allons, vous êtes à présent rompue à cette gymnastique de l'esprit..

- Oui, oui, Dr Yalom, j'associe, j'associe...je ne fais même que ça. ..  Problème..? ma hantise des maths je suppose? ..  et Spinoza...?mon complexe d'infériorité carabiné concernant la philo, qui met souvent des mots si compliqués sur ce qui est sensé nous rendre la vie plus sereine et ses embûches plus surmontables...La philo, oui, c'etait ça, surtout, ma trouille, pas fait de philo, moi, mais une rhétorique, à  17 ans,  j'étais pas encore en France...la philo, c'est le chaînon manquant de ma francité, vous savez bien...

- Nous y voilà...  alors,  ce problème Spinoza?

- Clair comme de l'eau de roche: c'etait limpide, bien expliqué,  vivant...on se serait cru ici, sur le divan, à  vos côtés...Avouez que c'est commode, hein, Dr Yalom, d' être à la fois romancier et psychanalyste! Spinoza a fait supprimer tout ce qui est un tant soit peu personnel dans ses écrits,  on n'a pas sa correspondance, ni sa vraie bibliothèque, pas même un vrai portrait de lui ...et comme ses écrits sont imbitables, vous lui mettez dans les pattes un jeune esprit brillant, Franco, qui se charge, par maieutique, d'interroger le maître,  de lui faire clarifier ses propos et même de le mettre devant ses propres contradictions...C'est vous, tout craché,  ce Franco!

-  Et l'Autre? Je suis étonné de ne pas vous avoir encore entendue tempêter , au nom de la vraisemblance historique, contre ma brillante idée de croiser la bio d'un séfarade génial du XVIIe siècle avec celle d'un antisémite notoire, grand  criminel de guerre du XXe ? 

- Ah, ce pauvre Alfred Rosenberg...son arrière- grand-mère juive doit se retourner dans sa tombe... Vous avez bien fait de lui inventer un psychanalyste,  à celui-là!  Fou comme un lapin, amoureux d'Hitler, parano au dernier degré,  et tellement persuadé d'être un esprit supérieur qu'il ne s'étonne même pas que personne ne comprenne son galimatias mytho-racial!

- Mais vous ne me dites pas ce que vous avez pensé de cet audacieux croisement des deux biographies?

- Ma foi...tout les oppose: un mauvais  juif, un bon  aryen- ah, ah, pardon, Dr Yalom, je sais que vous ne prisez guère ce genre de calembour- un excommunié quasi- volontaire et un courtisan importun, un libre-exaministe annonçant l'esprit des Lumieres et un réactionnaire nébuleux en pleine confusion mentale.. .Et pourtant..

- Ouiiii..?

- Pourtant ils ont des points communs...Tous les deux entendent se passer de l'explication divine,  même si ce n'est pas pour la même raison..Tous deux ont besoin d'un interlocuteur qui les cuisine, l'un pour dépasser ses contradictions et domestiquer vraiment ses passions, l'autre...pour éviter la camisole de force!
Le procès de Nuremberg en condamnant Rosenberg à mort a fait de lui, enfin, le grand homme du Reich! La pendaison a été sa crucifixion, à celui-là ...

- Pas mal vu...

-Sans compter que la bibliothèque de l'un devient l'obsession de l'autre, et qu'elle sauve même, par un petit miracle de la composition littéraire, deux victimes désignées de l'holocauste !

-Mmmm, boooon, alors, au final?

- Un succès !  J'ai tout pigé, même en philo!  -bravo, Dr Yalom, vous êtes un fin pédagogue!- J'ai appris plein de choses, j'ai apprécié  surtout la peinture de ce XVIIe siècle hollandais, véritable âge d'or de la tolérance, du mélange culturel, de l'ouverture d'esprit, de la confrontation des idées, de la libre édition européenne et de la créativité picturale...jusqu'à ce que le grand éteignoir de la maison d'Orange ne mette cette flamme  sous le boisseau..

- Donc, vous avez aimé. Alors, heureuse?

-Dites donc, Dr Yalom, vous ne sortez pas un peu de votre rôle ?  On dirait que votre surmoi parle un peu fort, ou je me trompe? Ma parole, en tout psychanalyste, il y a un auteur avide de compliments qui sommeille!!!
Je vous dois combien pour la séance?
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Vous avez eu votre bac de philo en potassant exclusivement « Le Monde de Sophie »? Amis lecteurs, ce livre pourrait être pour vous: ultra-didactique, ode à la maïeutique (des dialogues, des dialogues et encore des dialogues), tricotant imperturbablement un chapitre à l'endroit sur la vie de Spinoza, un chapitre à l'envers sur l'idéologue du troisième Reich, osant le climax de fin de chapitre entre 2 tartines philosophiques... « Le Problème Spinoza » semble voué à ne trouver d'autres lecteurs que l'étudiant nécessiteux ou le cuistre snobinard. Et bien, pas du tout. Ça se lit, ça se lit même très bien et la rigueur du propos échappe à la platitude démonstrative.
Soit Spinoza, sans doute le premier laïque au monde, incapable de se soumettre aux rituels superstitieux et désireux de vivre selon la Raison, même au risque de la solitude. Soit quelques siècles plus tard l'idéologue nazi Rosenberg, antisémite pédant fasciné par Hitler. Entre eux, le combat de la raison humaniste et de l'idéologie irrationnelle... Mais Yalom a l'intelligence de suggérer que le lumineux Spinoza n'est pas seulement l'adversaire du nazi; il peut aussi en être le lointain parent. le philosophe n'est pas exempté des préjugés de son temps et Rosenberg affuble sa haine des juifs des oripeaux de la raison en dissertant interminablement.
Spinoza l'avoue: « J'ai à ce point transformé la raison qu'on peut en arriver à ne pas la distinguer de la déraison. » le philosophe pensait l'homme aussi lié par la chaîne des causalités que tout objet soumis aux lois de la physique et Yalom le psychanalyste sait combien le passé explique l'individu. Mais l'histoire qu'il nous conte n'est pas une simple ruse pour nous faire ingurgiter de difficiles concepts : elle est une clé. L'art de la fiction est le signe de la liberté humaine. Et Rosenberg comme Spinoza échappent à tous les déterminismes: le premier définitivement coupable, le second définitivement génial.
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A partir de la découverte de l’intérêt du nazi Rosenberg pour le philosophe juif Spinoza, Yalom a inventé un lien entre les deux, en s’appuyant sur les connaissances historiques et en complétant grâce à son expérience de psychiatre. Il s’est surtout appuyé sur l’évolution de leur vie intérieure par le biais de confidences auprès d’un ami pour l’un et d’un psychiatre pour l’autre.
J’ai trouvé ce roman extrêmement adroit. Il y a peu d’endroit où j’ai senti le procédé pour introduire une explication. Et surtout j’ai beaucoup appris, particulièrement sur Spinoza sur lequel finalement je savais peu de choses. Du coup je me suis fait une petite bibliographie pour l’aborder un jour.
J’ai voulu commencer par ce titre mais sans doute continuerai-je plus tard avec les deux précédents volumes consacrés à Schopenhauer et Nietzsche, même si ces deux philosophes m’attirent moins a priori.

Challenge ABC 2014-2015
Challenge Pavés
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« Je demande à la foule ignorante et superstitieuse de ne pas lire mon livre » p.223
Ah que cette phrase fait réfléchir...Oui ? Non ? Tant pis ! Elle reviendra !?

A ma gauche : Spinoza à la pensée si haute, à l'aspiration si élevée que l'une et l'autre le condamnent à l'isolement.
D'après Irvin Yalom il le sait et l'assume :
« Je sais que je dois être libre. Si une communauté qui respecte ma liberté n'existe pas, alors peut-être dois-je vivre en dehors de la communauté. » p.139
car pas de liberté sans sacrifices
« Ceux qui désirent immodérément des biens incertains et sont impuissants devant l'adversité implorent le secours du divin par des prières et des larmes de femmes » p.222

A ma droite : Alfred Rosenberg, idéologue du parti Nazi, en recherche, lui aussi, mais désemparé, livré à ses passions. Incapable de sortir de son isolement.
« Plus que jamais, conclut-il, je vois maintenant comment ma propre estime dépend de l'opinion qu'Hitler a de moi. Je dois dépasser cela. Je suis esclave du désir que j'ai de son approbation. »p.439

Sont-ils sur un ring de boxe ? Non. Ni vainqueur, ni vaincu ! Morts, oui.

Deux hommes tout simplement et la simple juxtaposition de leurs vies nous donne bien à réfléchir. Sur la liberté si importante notamment, mais pas seulement, oh non, tant le roman est riche. Il serait dommage de passer à côté ! A court de temps ? Vite, alors, lis la fable de la Fontaine le chien et le loup qui aborde elle aussi l'aspect liberté. Mais demande-toi surtout : pourquoi cours-tu ?

L'introspection de chacun d'eux avec l'aide de deux personnages fictionnels est une idée lumineuse. Bravo ! C'est très, très fort. Et bien écrit. Irvin Yalom parvient à rendre humain et compréhensible cet espèce de phare monolithique qu'est Spinoza. Rebravo ! Encore !

Mais il reste le problème. Oh là là !
Le problème de Spinoza dont on a perdu l'énoncé ! Alors là Irvin Yalom a perdu une belle occasion, me semble-t-il, plutôt qu'échafauder sur Goethe.
Effectivement, pour la propagande nazi, il serait très tentant d'utiliser la réfutation par Spinoza que les juifs sont un peuple élu mais le raisonnement s'oppose aussi à la supériorité de la race aryenne. L'argument de Spinoza s'adresse à toutes les religions et s'étend aux idéologies grégaires, l'auteur le fait remarquer p.393 « Je crois que vous (=Alfred) êtes en train de commettre la même erreur que les juifs, qui pendant deux millénaires se sont crus un peuple supérieur choisi par Dieu. Nous avons lu l'un et l'autre que Spinoza démolissait cet argument, et je ne doute pas que, s'il vivait aujourd'hui, la force de sa logique démolirait votre argument aryen aussi. », mais il n'en fait pas pour autant la question centrale de son roman.
Ah, alors, me dites-vous, il aurait dû faire sienne la citation de la p. 223 et la placer en p.1 (vous voyez, on y revient) !
Vous croyez ?
Il est donc un sage ?
Pas Spinoza ?
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Que j'ai du mal à l'écrire cette critique sur le problème Spinoza ...
Pourtant tout avait bien commencé , dès les premières pages de ma lecture , j'ai été enchantée , heureuse d'apprendre plein de choses , de faire de la philosophie sans effort , n'est ce pas formidable comme programme .
Le libraire me l'avait dit ' en lisant ce livre on se sent plus intelligent ' , ça avait d'ailleurs motivé fortement mon choix , comment résister à pareil argument , d'autant plus qu'il s'agit d'une lecture somme toute assez facile , pas de mots difficiles ou si peu , des notions très simples , alors d'où me vient ce sentiment mitigé ?
Sentiment pas facile à avouer au nombre de lectures dithyrambiques sur le site ou ailleurs .
Alors quoi ?
Ai - je lu trop de livres sur les nazis , sans doute y a - t - il un peu de ça , mais je ne connaisais pas spécialement Alfred Rosenberg .
Et je l'avoue , pas bien grave d'ailleurs , oui j'ai entendu parler de Spinoza bien entendu mais je n'ai jamais lu un de ses textes , lors des premières pages de la lecture du problème Spinoza , j'ai eu une envie soudaine de lire l'Ethique , envie qui a disparu aussitôt , ça ne m'étonne pas du tout .
Et puis je n'ai pas bien compris , quelle était exactement la position de Spinoza sur la religion , j'ai bien essayé de lire quelques articles sur internet mais ça ne m'a pas aidée bien au contraire .
J'ai eu beaucoup de mal à avoir de l'empathie pour Spinoza , il m'a semblé tellement parfait , tellement loin des passions humaines , était - il insensible , je n'ai pu m'empêcher de faire un parallèle avec la froideur de Rosenberg , certes lui ne consacre pas sa vie à l'étude , il n'a rien de la grandeur du philosophe mais tous deux semblent avoir peu d'émotions . Et ce qu'il me semble partager c'est la fidélité à leurs idées qu'elles que soient les conséquences , le hérem ou l'excommunication pour l'un avec tout ce que ça comporte , ne plus jamais avoir de contact avec la communauté juive d'Amsterdam mais surtout plus aucun contact avec les menbres de leur famille , ce qui était peut - être plus facile pour cet orphelin de mère , c'est le cas également pour Rosenberg d'être orphelin de mère , ce même Rosenberg qui restera fidèle à ses idées même si dans ce cas , elles sont au service du troisième Reich , personne n'arrivera à trouver pourquoi il déteste tant les juifs et celà évidemment en dehors du contexte de l'époque .
Ce que j'ai le plus apprécié dans ce roman , c'est la description de la communauté juive à Amsterdam à l'époque de Spinoza .
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Ce roman m'a retournée, au sens "polar" du terme retournement.
Pourtant au début je me sentais très forte : il n'allait pas me la faire à moi, cet américain faiseur de romans historico-philosophico-psychanalytiques à forts tirages dont je n'avais jamais entendu parler jusqu'à aujourd'hui.

A propos de retournement, j'avais d'ailleurs commencé ma lecture à l'envers, par les annexes à la fin du livre, sorte de "how to", de "making of", fort intéressantes et bien faites. J'avais donc lu :

“J'ai voulu écrire un roman qui aurait pu se produire. En restant aussi proche que possible des événements historiques, je me suis servi de mon expérience professionnelle de psychiatre pour imaginer le monde intérieur de mes protagonistes, Bento Spinoza et Alfred Rozenberg. Afin de donner accès à leur âme, j'ai inventé deux personnages, Franco Benitez et Friedrich Pfister, et toutes les scènes les impliquant relèvent, naturellement de la fiction. ”

Mais bon, entre un roman historique et moi, cela a rarement été le coup de foudre, alors j'étais plutôt sceptique sur ce grand écart que proposait l'auteur entre les époques (trois cents ans), et les personnalités (le philosophe juif excommunié, le nazi). Deux bios romancées pour le prix d'une... méfiance !

D'ailleurs dès les premières lignes du début du roman je ricanais déjà : Irvin Yalom y décrit les rues d'Amsterdam en 1656 où ouvriers et artisans se régalent de casse-croûtes au hareng arrosés de gin. Quoi, du gin ? Je l'avoue, je suis allée vérifier aussi sec dans l'encyclopédie libre.

Au temps pour moi : l'alcool de genévrier dit gin est bien apparu aux Pays-Bas... au XIVe siècle !

Au temps pour moi : ce gros roman est un tourne-pages habile et passionnant d'un bout à l'autre. Évidemment, il s'agit d'une forme de vulgarisation philosophique et historique, mais l'auteur la revendique telle. Irvin Yalom ne cherche pas à réécrire l'histoire. Sans verser dans l'uchronie, le romancier imagine que le cours de l'Histoire aurait pu changer si la névrose d'un grand criminel nazi avait été traitée... par la philosophie !

Au temps pour moi : la construction du roman, qu'on pourrait trouver systématique et répétitive, est terriblement efficace : de courts épisodes alternés qui font avancer en parallèle les histoires de Spinoza et de Rozenberg, avec à chaque fois une fin en suspens, rappel subliminal de la technique éprouvée des meilleures séries télévisées américaines.

Donc au final, une lecture très étonnante, intelligente et agréable. Un sujet totalement original, à la fois distrayant et instructif. Bien traduit.
Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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1656, à Amsterdam. le philosophe en devenir Baruch Spinoza est à l'aube de subir un herem, d'être rejeté par la communauté juive dans laquelle il vit pour ses prises de position répétées contre la religion. Il ne le sait pas encore, mais il deviendra l'un des philosophes les plus respectés du monde intellectuel des Lumières et contemporain. 1910, en Estonie. Deux professeurs assistent éberlués à une argumentation antisémite très profonde de la part de leur élève Alfred Rosenberg. Celui-ci ne deviendra pas moins que l'esprit philosophique à la base même du nazisme. Fasciné par Spinoza, il ne comprend néanmoins pas comment un tel génie puisse être Juif...

Roman époustouflant à mi-chemin entre une double biographie mi-réelle mi-fictive et une vulgarisation philosophique, emballée de concepts psychanalytiques.
C'est passionnant, complexe bien que clair, et surtout l'auteur maîtrise parfaitement sa construction narrative au début déroutante mais au final dynamique.
Yalom met en parallèle deux relations, deux amitiés, toutes deux gâchées par les idéologies personnelles et la religion, et nous montre comment deux destins distants de 300 ans se rejoignent. Comment la société évolue et a évolué (ou pas) au regard majoritairement de la religion, responsable de la scission perpétuelle entre êtres humains, que ce soit dans une même communauté ou non.
Dans cet ouvrage, on s'arrête massivement sur la question du dogme religieux quel qu'il soit, l'existence et les origines de la religion et ses effets sur l'Homme et la société au-travers des idées de Spinoza. Et à l'aide d'échanges nombreux entre nos quatre personnages dans deux huis-clos distincts, l'auteur utilise l'analyse psychologique pour questionner et mettre en évidence des idées et soulever les principaux problèmes qui divisent le monde d'hier, d'aujourd'hui et certainement, malheureusement, celui de demain. Yalom se sert notamment de l'introspection, de l'impact émotionnel sur les actions et la perception de soi et d'autrui, ainsi que de la sociologie pour faire aussi bien ressortir les traits de caractère de ses personnages que pour situer leurs idées dans le contexte de leurs époques respectives. C'est admirablement bien fait, bien qu'il faille reconnaître que ne n'est pas le genre de livre à lire de manière distraite.
Grâce aux très nombreuses explications données dans ces longs dialogues à répétition (et pour le coup pas forcément très crédibles ou du moins "spontanés, normaux"), il n'est nul besoin d'aborder ce livre avec des connaissances en psychanalyse et philosophie. Il faut juste rester attentif et suivre la logique et l'enchaînement des idées, tout comme réfléchir à l'impact de telle ou telle question.
L'une des nombreuses forces de cet ouvrage, c'est aussi d'aborder de l'intérieur l'idéologie nazie, dans sa construction, son cheminement et ses conquêtes (physiques mais également de l'esprit). Yalom a fourni un travail incroyable de reconstitution tout en supputant les pensées intimes d'un homme et d'autres figures de l'Histoire telles que celle d'Hitler. le parallèle qu'il dresse entre les deux hommes, les deux époques, les deux contextes est renversant et fait totalement sens : l'aveuglement personnel à cause d'une idée, d'une conviction, fondée ou pas, et qui conduit à la division maximale.
Je dois avouer que j'ai vraiment découvert Spinoza avec ce livre. Sa capacité à se détacher de son temps est fascinante. Ce qui est d'autant plus fascinant et perturbant, c'est de voir qu'un homme si évolué dans sa pensée puisse être si misogyne (on découvre cela en fin d'ouvrage, et Spinoza a vraiment de quoi décevoir sur ce point). Ainsi, lui même s'est retrouvé acteur d'erreurs qu'il reprochait aux autres de faire, coincé dans l'une des pensées universelles de son époque, lui qui excellait pourtant à démontrer par a + b et de manière très avancée pour l'époque que la religion n'est que le produit de l'Homme.
Quant au "problème", quel est-il ce problème ? Il est multiple. le titre a plusieurs niveaux d'interprétation et j'en compte au moins quatre : le premier, facile et mentionné dans le livre : comment se fait-il qu'un génie puisse être Juif, selon le nazi Rosenberg ; le deuxième : Spinoza était un problème dans sa communauté car il menaçait le grand ordre religieux de perdre sa crédibilité ; le troisième : Spinoza est un problème en cela qu'il est très mystérieux et bien peu de choses ont transparu et perduré dans le temps. Qui était-il vraiment ? ; enfin, le quatrième : en niant l'existence de Dieu, ou du moins en prouvant que l'Homme est à l'origine des religions, c'est un philosophe qui continue de déranger toutes les institutions religieuses du monde. Même si l'athéisme a gagné des ouailles (notez l'oxymore) au cours des centenaires suivant la mort du philosophe, la présence de religions diverses et pour certaines qui ont du mal à coexister, ainsi que leur cohabitation avec l'athéisme restent compliquées et constituent l'un des quatre piliers à l'origine des guerres (argent, religion/idéologie, politique, géographique).
Au final, comment résumer cet ouvrage si dense, même ponctué de quelques longueurs ? Un joli travail. Une belle lecture. Il y aurait tant à dire, tant à analyser, tant à débattre... de surcroît, j'aurais aimé avoir ce genre de livre entre les mains l'année du Bac. Pas sûre toutefois qu'à cet âge, j'aurais saisi l'ampleur du contenu l'intégralité des enjeux discutés.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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