AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ghislainemota


Quand un pays n'arrive pas à cicatriser ses blessures, chaque génération s'interroge. Chacun panse ses plaies: du silence au déni, de victime à coupable.
Le tour de force de Barbara Yelin est de nous livrer dans ce roman graphique la trajectoire d'une femme allemande "Irmina" durant la période nazi.
Pleine de rêves et confiante, elle débarque à Londres en 1930 où elle étudie le secrétariat international. Une relation amoureuse va se profiler en la personne d'Howard, étudiant venu de la Barbade. Mais faute de moyens, elle choisit de rentrer en Allemagne où Hitler est au pouvoir. Elle trouve du travail à Berlin attendant une mutation à Londres. Mais un malheur n'arrive jamais seul: sa mutation est refusée et les lettres adressées à Howard lui sont retournées. Désabusée, elle démissionne. Sa rencontre avec Meinrich , un architecte SS sera décisive. Elle se marie en 1937 acceptant la condition féminine de l'époque: enfant et soumission au mari. La guerre éclate et Meinrich est envoyé sur le front russe. Irmina se débrouille pendant cette période de pénurie qui touche les allemands , "sacrifice d'un peuple pour la grandeur d'un pays". Devenue veuve, elle se réfugie à la campagne pour subsister. Elle retrouvera Howard , devenu gouverneur de l'île qui durant les années noires de l'Allemagne, a su réaliser ses rêves de citoyen.
Ce roman dérangeant et déprimant est le constat d'une vie gâchée en tant que femme, d'une vie coupable par sa passivité face aux horreurs subis par les juifs: humiliation, expulsion et extorsion et face au déni" Plus un mot, Gerda, je ne veux rien savoir".
Dans cet ouvrage nous sommes loin du regard de Schlink dans "Le liseur" où le narrateur n'impose aucun verdict.
Ici, Yelin dépeint l' intimité d'une vie "banale" auscultant les blessures personnelles d'une femme ainsi que sa culpabilité passive.
Toutefois Irmina aurait pu prendre d'autres chemins de vie mais son manque de courage l'a menée à la solitude et aux regrets.
Pour accentuer ses actes manqués Yelin dessine des architectures sombres dans des gris noirs charbonneux. Et pour suggérer le vide de cette vie , elle termine ses dernières pages avec beaucoup de blanc, signe de vacuité.
En fin d'ouvrage la postface du Dr Alexander. Korb affinera ma critique.
Je ressors de cette lecture avec un mal-être et le souvenir personnel d'une professeure d'allemand que j'ai côtoyée.
Elle portait la culpabilité d'un grand-père qui floutait ses années vécues durant le national-socialisme.
Une lecture qui ne s'oublie pas de sitôt entre le féminisme et la culpabilité.
Commenter  J’apprécie          261



Ont apprécié cette critique (25)voir plus




{* *}