Sortir pour se poser, dans un grand parc de Tokyo. Sentiment d'arrêter le temps. Faire des rencontres superficielles. Contempler l'environnement. Pas d'intrigues dans ce non-roman. Juste saisir l'instant présent et l'apprécier pleinement. Suivre parfois des inconnu(e)s lors d'accompagnements improbables. Ce livre, c'est le déroulement incertain de le vie, d'instants fugitifs. Ça m'a parfois fait penser au film de Sophia Coppola « Lost in translation ». Ne rien attendre et tout arrive !
Attention, être prêt pour cette non-lecture !
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J'ai beaucoup aimé ce court roman qui propose une immersion dans le corps et l'esprit d'un trentenaire solitaire -un tantinet excentrique- en quête de sens. le jeune homme est un commercial anonyme qui vend du gel-douches et des parfums. Chaque jour à l'heure de la pause déjeuner, il s'échappe de la jungle urbaine surchargée de publicités, s'affranchit des convenances et pénètre dans le parc Hibiya à Tôkyô. Là Il desserre sa cravate, ferme les yeux à peine quelques secondes puis relève d'un trait la tête en direction du ciel. Il savoure alors un délicieux vertige. M Kondo son voisin de banc qui s'y essaye avec application n'y arrive pas. (Quant à moi j'essayerai demain ou après-demain). Or donc, ce jour là, dans le métro malodorant, le narrateur a regardé vaguement une publicité morbide pour un réseau de greffes d'organes de l'autre côté de la vitre. le slogan en était « Même après votre mort, une partie de vous continue à vivre ». le jeune homme a pointé son doigt sur la vitre et a souri sans le vouloir à une inconnue. Elle lui a sauvé la mise en partageant son malaise à voix haute. Il n'a pas osé poursuivre la conversation. Cette occasion manquée lui rappelle un amour de jeunesse. le narrateur est indécis, incapable d'agir et de vivre avec quelqu'un. Quand sa mère débarque à Tokyo pour faire des emplettes, il s'en va loger chez un couple d'amis qui ont déserté leur vaste appartement pour vivre chacun de leur côté. Ils lui ont laissé Lagerfeld, leur ouistiti indocile. Pendant qu'il marche, devise avec M. Kondo et d'autres habitués du parc tous un peu excentriques, le narrateur retrouve l'inconnue du métro, tenant un gobelet de Starbucks…
Le livre m'a plu car il parle de mal être, de solitude profonde d'une manière originale. On suit par bribes les perceptions du narrateur, ses rêveries, ses réminiscences. On saute du coq à l'âne comme dans la vraie vie. Sous les situations cocasses ou derrière l'excentricité des personnages se devinent détresse et angoisse. On perçoit l'impuissance du narrateur à survoler longtemps le parc et à faire partager son ivresse. On parle beaucoup du corps qui lui échappe, qui ne lui appartient pas. le récit use beaucoup des métaphores. le parc est un personnage vivant à part entière avec son étang en forme de coeur. Les personnages s'y croisent, se parlent, se séparent sans se comprendre. Ils semblent interchangeables comme les organes des poupées mannequins anatomiques que le narrateur regarde dans la vitrine du marchand de couleur. le narrateur semble ne pouvoir s'attacher à personne. Il paraît toujours fuir et se fuir. Et pourtant et pourtant il y a cette inconnue qu'il cherche et cherche encore.
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J'ai acheté ce livre en raison de la quatrième de couverture ("ce petit roman est une bouffée d'air pur dans la vie affairée et raisonnable des citoyens du XXIeme siècle que nous sommes") et aussi, je dois l'avouer, en raison du format du libre (poche, 120 pages ... très pratique à lire dans les transports en commun).
Pas d'intrigue, relative absence d'histoire.....et pourtant ce roman est une vraie bonne surprise. J'ai eu beaucoup de plaisirs à le lire, à partager avec les protagonistes la petite musique du grand parc qui est le "personnage" central de l'ouvrage. Les personnages et les choses ne prennent vie que par et à travers ce parc.
Je me suis demandé comment l'auteur pouvait conclure une telle histoire .... Et même sur ce point je n'ai pas été déçu.....mais ne comptez pas sur moi pour vous la dévoiler.
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Ce très court roman nous invite à nous poser, quelques instants, au coeur d'un parc où règnent le calme et la sérénité, alors que tout autour, la ville s'agite.
Plusieurs personnes, en quête d'identité, y prennent le temps de se poser des questions existentielles.
Une vraie petite bouffée d'oxygène !
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Cette histoire, relativement courte, représente pour moi une petite parenthèse méditative dans la vie contemporaine qui passe si vite, rythmée par nos journées de travail routinières. Il ne se passe pas grand-chose pour le protagoniste mais on est comme hypnotisés par son quotidien, on se demande si le lien avec la Femme se resserrera ou si l'excitation de cette rencontre s'évanouira dans la foule tokyoïte... J'ai bien aimé les personnages qui sortent de l'ordinaire comme le singe Lagerfeld ou la poésie qui se dégage du parc (personnage à part entière) avec sa forme de coeur notamment.
Une très belle oeuvre de la littérature japonaise, à lire et relire comme je l'ai fait, en prenant son temps et en méditant sur la vie avec son lot de rencontres surprenantes et d'endroits foulés.
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Tel un parc au milieu d'une grande ville, ce livre est un petit espace d'oxygène dans notre quotidien.
Dans le métro, un jeune homme est intrigué par une affiche vantant les dons d'organes. Sans y penser, il partage son avis avec la femme derrière lui. Celle-ci entre dans son jeu. Cette rencontre aurait pu finir ainsi mais le hasard fait qu'ils passent leur pause déjeuner dans le même par cet qu'il partage un même "loisir" : l'observation. Commence alors une relation faite de réflexions, de complicité et de distance. Une petite bulle de liberté qui coupe la vie organisée des citadins d'une grande ville, telle Tokyo.
Deux personnages : le narrateur et la femme du métro. Autour gravite une foule, pour ne pas dire une faune, bigarrée. le tout est un aperçu de la société qui bien qu'universelle, reste par bien des côtés, très japonaise.
Dans la postface écrite par le traducteur, nous apprenons que beaucoup de lecteurs se plaignent d'un manque d'action. Est-ce vraiment le cas ? L'action de ce roman est juste différente, basée sur les différentes rencontres que fait le narrateur Aucune description n'est anodine : la femme du métro et sa conception du monde, son collègue de travail, mentor du narrateur, à la vision plus étriqué le portrait des amis a aussi son importance : la rupture entre la jeunesse et la prise de conscience du passage à la vie d'adulte le groupe s'éloigne progressivement, soit géographiquement, soit socialement. Les couples se forment et se séparent. le rapport avec les parents : cette mère que nous sentons envahissante et ce père absent. La pudeur du fils à découvrir l'amour qui lie sa mère et son père. Cette pudeur des sentiments est très présente tout au long de l'ouvrage, et ce, dès la rencontre dans le métro. Cette société japonaise, hyper-productive et moderne, reste très traditionnelle. Comme le fait qu'un homme ne puisse adresser la parole en public à une femme inconnue. Grâce à la postface, j'ai pu réaliser qu'en effet, un autre "personnage" était présent. Personnage secondaire mais qui sert de fil conducteur au roman : le corps humain. Celui-ci est représenté de façon si différente tout au long du livre qu'il est facile de ne pas le prendre comme une entité unique. D'abord vu à travers les dons d'organes et la possible survivance de soi dans un nouveau corps, il devient planche anatomique. le corps est aussi le reflet de ce que nous voulons renvoyer. Il faut donc l'entretenir par le sport. le corps humain, enfin, est associé à la nature, notamment au parc, dont les différents composants sont comparés à l'anatomie. En allant plus loin, nous pouvons penser que ce parc est aussi le cerveau, le centre de la pensée, d'une philosophie de vie et la recherche d'une liberté qui n'existe pas dans le quotidien. le meilleur exemple est la relation que partage les habitués du parc. Alors qu'au début du roman le narrateur subit la moquerie de ses voisins pour avoir parlé à une inconnue, dans le parc, hommes et femmes engagent la conversation, toutes les barrières sociales semblant s'écrouler. Je ne pouvais finir sans une petite pensée affectueuse pour Lagerfled, le singe apprivoisé.
Comme nous pouvons le voir, ce petit roman a beaucoup à dire, plus qu'il n'y parait. Mais surtout, il est rare de le sourire tout au long d'une lecture. Or, c'est exactement ce qui se passe ici. Un roman à déguster.
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