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Critique de krzysvanco


Isaku a neuf ans et vit dans un petit village coincé entre la mer et des montagnes escarpées.
La vie y est rude et dictée par les saisons, la pêche, la vente de sel et de maigres récoltes.
Pour survivre, des villageois sont contraints de se vendre pour quelques années à l'autre bout de l'île. C'est la cas du père d'Isaku, parti pour trois ans le laissant avec sa mère prendre soin de ses soeurs et de son frère.

Nous suivons ainsi la vie Isaku de ses 9 jusqu'à ses 12 ans.
Le récit est ponctué par le cycle des saisons et cela lui confère un rythme et une musicalité.
Chaque année est marquée des mêmes événements :
le roman débute avec l'automne et le rougeoiement des feuilles annonçant la pêche aux poulpes ; lorsque les montagnes perdent leur couleur, la mer commence à s'agiter, une étrange cérémonie peut commencer avec l'intervention d'une femme enceinte, sorte de prière pour qu'il y ait un naufrage ;
à partir de là, deux chaudrons pour la cuisson du sel seront chauffés toute la nuit sur la plage ; suivront les premières neiges, le Nouvel-An, la floraison des pruniers dans le village éloigné du leur, la fonte des neiges, la vente du sel ;
à la mi-mars, un rituel pour obtenir une bonne pêche ; il y aura encore la pêche aux sardines, puis aux encornets, ensuite aux maquereaux, la récolte de la ramie, la vente des maquereaux sales contre des céréales, la fête des morts....

Tous ces événements se répètent, d'année en année, et nous voyons qu'ils ne suffisent pas à survivre, le village est à la merci d'une mauvaise pêche.
Survivre implique aux chefs de famille et aux filles à se vendre pour quelques années.

Depuis des générations, et c'est dicté par les traditions ancestrales, on espère, attend et facilite les naufrages.
Ceux-ci permettent au village de ne pas disparaître.
La cote est escarpée, les récifs sont nombreux, pour tromper un navire en difficulté, l'on cuit toutes les nuits le sel dans deux chaudrons sur la plage sous de grands feux qui ne peuvent s'éteindre, afin d'attirer les bateaux vers les récifs et s'emparer ainsi de leur précieuse cargaison (riz, saké, sucré blanc, chandelles, tabac,...) et de vivre quelques années plus à l'aise.
Ces naufrages sont rares, cachés et bien entendu illicites.

Je suppose que l'action se déroulé au moyen-âge, Akira Yoshimura nous décrit toutes les superstitions et traditions, les croyances quant à la mort, à l'âme des défunts, à la réincarnation, aux présages qu'apporte un arc-en-ciel, il nous détaille la cérémonie des funérailles, comment les couples se forment, les interdits (ni rire, ni parler pendant cinq jours après le Nouvel-An), comment sont considérés les suicides, etc

Le livre s'attache à Isoku qui endosse des responsabilités d'adulte, sui va grandir vite, qui va découvrir une à une les traditions, on verra ses relations avec sa mère, sévère, qui lui impose une discipline de fer et lui inspire de la crainte, mais qui montre parfois de la tendresse pour lui. Isoku est jeune encore mais son coeur bat pour Tami, une jeune fille qu'il espère un jour pouvoir épouser.

Ce qui est assez remarquable c'est la faculté qu'a l'auteur a ne pas nous faire juger ces actes qui s'apparentent à du piratage, tant il nous fait plonger dans cette vie difficile, cette survie. Quand on a tout, il est facile d'avoir un comportement moral !
Ici, les valeurs sont celles du travail, du travail pénible, du sens du devoir, du respect des ancêtres.

C'est un récit sur la lutte, l'importance de la communauté, il est beau et déchirant.
Il a moins de deux cent pages pourtant, mais est extrêmement dense et en même temps sobre, l'auteur se contente d'énumérer les faits, nul besoin de développements pour nous faire comprendre la vie du village.

La fin est tragique et émouvante.

C'est un grand livre et je voudrais remercier Sachka qui me l'a conseillé.




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