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Critique de claudine42


Il est des livres, nous dit Marguerite Yourcenar, qu'on ne doit pas oser écrire avant d'avoir dépassé quarante ans. Je dirais aussi qu'il est des livres qu'on devrait lire, ou relire, après avoir dépassé quarante ans. Ce sont les mêmes. En voici un. Rencontre au delà des siècles de deux esprits universels, de deux humanismes, de deux consciences morales, ces mémoires que Marguerite Yourcenar prête à l'empereur Hadrien sont riches de méditations sur la nature humaine, l'amitié, le courage, sur les peuples et les hommes, sur les ressorts parfois dérisoires qui les animent, sur la médiocrité des sentiments et des passions qu'ils ont dans le coeur.
Hadrien, espagnol de naissance, éduqué à Rome, et dans la langue grecque à Athènes, s'illustre d'abord en campagne militaire aux confins de la Germanie. Il a voulu voir et comprendre, s'approprier, toutes les régions et toutes les dimensions de l'empire: Egypte, Asie mineure, Judée, Bretagne (où son fameux mur est toujours debout), Dalmatie, Pannonie...
Je n'essaierai pas de résumer ces pages très fortes, mais j'y ai relevé quelques paroles et pensées qui m'ont paru frappantes:
- sur l'inconstance des hommes: "... les lâches qui pleurent leurs mots avant de les oublier."
- sur l'amitié qui l'unissait à Plotine (veuve du précédent empereur): "L'amitié était un choix où elle s'engageait toute entière. Elle m'a connu mieux que personne; je lui ai laissé voir ce que j'ai soigneusement dissimulé à tout autre: par exemple de secrètes lâchetés. J'aime à croire que de son côté elle ne m'a presque rien tu. L'intimité des corps, qui n'exista jamais entre nous, a été compensée par le contact de deux esprits étroitement mêlés l'un à l'autre."
- sur le christianisme naissant: "l'injonction qui consiste à aimer autrui comme soi-même est trop contraire à la nature humaine pour être sincèrement obéie par le vulgaire, qui n'aimera jamais que soi, et ne convient nullement au sage, qui ne s'aime pas particulièrement soi-même."

Ce grand livre mérite d'être un livre de chevet. Superbe remède contre l'idée bêlante de progrès et de perfectibilité qui est notre drogue depuis quelques siècles. Pour mieux connaître Hadrien, une visite approfondie de la villa Adriana à Tivoli s'impose. Dans ce lieu magique à l'écart du tumulte de Rome, Hadrien avait voulu reproduire la diversité des provinces de l'Empire.
Un chef-d'oeuvre d'une Grande Dame qu'était Marguerite Yourcenar !


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