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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"Alors repos."
Ainsi s'achève "A défaut d'Amérique" de Carole Zalberg, comme un écho à la scène d'ouverture dans un cimetière parisien à l'occasion de l'enterrement d'Adèle, mais également aussi comme un état bien mérité pour tous les personnages qui ont traversé ce roman.

L'histoire est narrée par deux personnages féminins : Suzan, une américaine incapable de vivre et d'aimer et rongée par un terrible secret; et Fleur, une française portant difficilement le passé de sa famille.
A aucun moment ces deux personnages ne se rencontreront, un océan les séparera toujours hormis dans cette scène d'ouverture, où Suzan épie la cérémonie de l'enterrement d'Adèle au cimetière et pourtant ne manifestera pas sa présence : "Elle ne jurerait pas qu'ils sont émus. Pas d'où elle se tient : un refuge d'ombre qui la dissimule aux regards et aux interrogations. A cette distance, on ne perçoit rien du deuil ou d'un soulagement. le petit groupe amassé autour de la tombe évoque une assemblée de longs volatiles penchés au-dessus d'une trouvaille. Collés les uns aux autres pour faire barrage au vent. Piétinant d'impatience ou de froid."
Car Adèle, Suzan l'a connue, c'est même grâce à elle que son père a retrouvé la trace de cet amour de jeunesse alors qu'il venait libérer la France de la domination allemande en 1944 et qu'Adèle était mariée et venait de perdre son premier enfant, et c'est encore grâce à elle qu'Adèle viendra leur rendre visite aux Etats-Unis.
Et autant le père de Suzan a aimé Adèle, allant jusqu'à lui proposer de l'épouser désormais qu'ils sont libres de toute attache afin de rompre leur veuvage et continuant à l'aimer malgré le refus de celle-ci; autant Suzan n'a jamais réussi à aimer Adèle, tout ou presque en elle l'énervait et l'a presque conduit à s'éloigner de son père, ou du tout moins à ne plus reconnaître l'homme qu'elle connaissait depuis toujours : "Le silence de son père, face à cet étalage de hauts faits et de fierté, avait été aussi violent pour Suzan que s'il avait déchiré sous ses yeux toutes traces de leur passé commun. C'était cela qui avait achevé de l'écoeurer."
Pourtant, c'est l'enterrement d'Adèle qui sera l'élément déclencheur pour chacune de ces femmes et les amènera à se confronter à elles-mêmes : l'une découvrira qui était réellement sa mère tandis que l'autre revivra l'histoire d'Adèle qui a traversé le vingtième siècle en survivante.

A travers des chapitres concis et percutants, Carole Zalberg retrace la grande Histoire mais également l'histoire familiale d'Adèle qui finira par s'entrecroiser avec celle du père de Suzan.
L'auteur a choisi d'alterner les souvenirs de Fleur, la française, avec ceux de Suzan, l'américaine, jusqu'à ce que ces deux femmes prennent conscience de leur passé et finissent par l'accepter pour enfin vivre pleinement leur vie.
Pour Fleur, la révélation viendra en se replongeant dans les photos et l'histoire familiale, à travers le puissant personnage d'Adèle qui traversât toutes les époques et les conflits mondiaux en portant toujours sa famille à bout de bras, sans jamais faillir et en gardant toujours espoir.
Pour Suzan, il lui faudra lire la correspondance envoyée par sa tante qu'elle ne connaît pas afin de découvrir qui était réellement sa mère, quelles étaient ses aspirations, et quelle ne sera pas sa surprise de découvrir que sa mère a beaucoup changé entre ses rêves de jeune fille, son mariage et son enfant.
La révélation du sens qu'elle donnera à sa vie ne lui viendra qu'au cours d'un voyage en Afrique du Sud pour rencontrer cette tante inconnue : "Et elle le sait à la seconde : au bout du compte, elle n'ira nulle part ailleurs que là où elle a grandi et où le monde vient d'exploser.", et à cet instant-là, sa vie pourra enfin commencer.

Il serait réducteur de penser que ce livre tourne autour de Fleur et de Suzan, car à ces deux femmes vient sans cesse se greffer une troisième : Adèle, la battante, la survivante, cette superbe héroïne si forte qui donne tout son sens à ce récit; et plus subtilement une quatrième : Kreindla, la mère d'Adèle, la voix de la sagesse.
Le choix de la couverture du livre, judicieusement choisie et belle à contempler, n'est pas innocent puisque sur cette photo quatre femmes sont perdues au milieu de nul part, un peu comme si elles erraient entre deux mondes, et c'est un parallèle particulièrement intéressant une fois la lecture achevée, puisque cette histoire est peuplée des fantômes des disparus qui vont aider, de là où ils reposent désormais, les vivants égarés dans leur vie.
L'histoire narrée dans ce roman contient également beaucoup de nostalgie mais ne sombre jamais dans l'apitoiement, bien au contraire, le personnage d'Adèle est à lui seul une véritable force de la nature et une machine humaine de vie et d'amour.

"A défaut d'Amérique" est une formidable et émouvante histoire intergénérationnelle prenant place sur trois continents écrite par une femme, reposant sur des femmes qu'il me sera bien difficile d'oublier et qui résonnent encore dans mon esprit bien longtemps après avoir refermé ce livre.
D'humanité, ce livre n'en manque pas, et passer à côté d'un tel bijou littéraire pourrait incontestablement être considéré comme un défaut.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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