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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce captivant roman s'ouvre sur une scène absolument saisissante. 1862 dans l'Ouest californien. La mort d'un père. La quête de ses deux filles, Sam et Lucy, onze et douze, pour trouver un lieu pour l'enterrer dignement ( thématique proche du Tandis que j'agonise de Faulkner ). le corps dans une pauvre caisse en bois, charrié dans une remorque attachée à un cheval volé. Un corps encombrant qui se décompose et tombe littéralement en morceau. Un périple hanté par la voix du père mort qui se raconte.

Bisons, poussière cuite au soleil, grandes chevauchées ... C Pam Zhang convoque toutes les figures classiques du Western époque ruée vers l'or pour mieux les revisiter ou plutôt les exploser allègrement afin de créer un récit totalement original empli de perspectives inattendues, enrichissant le Western de nuances sur l'appartenance raciale, l'identité sexuelle, la pauvreté, le racisme et même l'adolescence, prenant des chemins détournés, des risques aussi.

Elle démonte carrément le mythe du grand Ouest en le complétant de visages nouveaux longtemps invisibilisés, à l'importance minorée dans la construction des Etats-Unis, : les visages de l'immigration chinoise, d'ouvriers ferroviaires pour le Transcontinental à mineurs de charbon ou encore chercheurs d'or. Ma ( la mère ) a migré de Chine, Pa ( le père ), leurs filles Lucy et Sam sont nés en Californie. Subtil sapage de l'idée que tous ceux qui étaient d'origine chinoise à cette époque devaient être des immigrés, poussant ainsi une réflexion riche sur l'appartenance et l'enracinement à une nation dans un territoire exploité compulsivement par des colons désespérés et des opportunistes avides.

En conteuse intuitive, elle construit un roman initiatique surprenant, croisant les époques dans un flux narratif très délié, composé de quatre parties dont tous les chapitres portent les mêmes titres, bruts et élémentaires : « eau », « or », « boue », « prune », « sel », « sang », « vent », « viande ». C Pam Zhang insuffle vie à ce récit de survie grâce à une prose remarquable, aiguisée pour décrire la violence, lyrique quand il s'agit d'évoquer les grands paysages, oniriques avec ces tigres compagnons fantasmés des bisons disparus. La syntaxe varie, les métaphoes surgissent.

« Sur le dos de Nellie, les collines défilent à une vitesse qui les rend liquides. L'océan dont parlait Ma, reconstitué avec de l'herbe jaune. Les montagnes au loin, rapprochées, jusqu'à ce qu'un jour Lucy voie : tiens, elles ne sont pas bleues. Broussailles vertes et roche grise, ombres violettes enfoncées parmi les crêtes.
La Terre, également, retrouve des couleurs. le cours d'eau s'élargit. Massettes, pourpiers d'hiver, touffes d'ail sauvage et carottes. Les collines se font plus escarpées, les vallées plus encaissées. de temps en temps, l'herbe éclate de verdure à l'ombre d'un bosquet.
Est-ce donc cela, les grands espaces que cherchait Ba ? Cette impression qu'elles pourraient disparaître dans le paysage – une revendication de leurs corps comme l'invisibilité ou le pardon ? le vide à l'extérieur de Lucy rétrécit à mesure qu'elle rétrécit, insignifiante face aux montagnes, et la lumière dorée, filtrée par les chênes droits, devient verte. Même Sam se calme sous un vent qui a un goût de vie autant que de poussière. »

Certains passages sont éblouissants.
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C Pam Zhang nous entraîne au coeur d'un western complexe et multiculturel. Sam et Lucy sont les dignes héritières d'un passé houleux et tu. Façonnées par la vie sauvage et dure des contrées de l'ouest, à roulotte, sur une mule ou un cheval, dans des cabanes insalubres, elles se sont construites sur des légendes où le courage et la valeur de l'homme prédominent. Ba et Ma, mutiques sur leur origine, sur leurs passés respectifs, construisent la vie de leurs filles sur ces non-dits. Lucy est intelligente, belle. Sam est devenu par la force de la vie, un garçon manqué. Leurs vies prennent deux chemins différents. L'une veut de l'or, l'autre la reconnaissance.


Terres désolées, assoiffées, noires, sèches, rudes aux couleurs de l'or, celui tant cherché, convoité, source de toutes les violences commises par l'homme. Ces terres voient défiler ces deux soeurs décharnées à la recherche de la terre promise, du signe, qui leur permettra de mettre en terre leur père. Des pas, des milliers de pas, le ciel, le soleil sans pitié, le vent murmurant, témoins d'une agonie, d'une souffrance silencieuse. Une quête qui les portera au-delà de cette misérable errance. L'une découvrira la richesse du paraître l'autre celle laborieuse et dérobée.


Et tel un cercle vicieux va leurs vies emprisonnées par leurs choix et leurs passés. Un lourd héritage silencieux trimballant l'oubli, le désoeuvrement, l'égoïsme.


Ce roman m'a totalement déstabilisée notamment par sa construction et sa forme. L'écriture rude, franche, saccadée confère un style atypique. Mais au travers de cette rigueur, il y a cet amour camouflé, bienveillant qui s'est malheureusement perdu en route. J'ai adoré ces longues envolées où la nature est au coeur de la description. Cette longue lettre d'amour murmuré par le vent. Cette eau torrentielle aboutissant tout espoir. Cette terre brûlante discriminatoire aux reflets d'or. Et ce feu grondant dans les veines de ces jeunes filles.


Ce roman est vraiment grandiose.
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Poignant, solaire, « De l'or dans les collines » de rudesse et de persévérance, d'espaces grandioses et d'apprentissage est une épopée . L'hommage pour deux fillettes Lucy et Sam grandissantes au fil des pages.
Ce roman beau et serré comme un café fort est l'idiosyncrasie d'une époque pas si lointaine celle de la ruée vers l'or dans l'Ouest américain.
Filles d'immigrés chinois, fragilisées par les écueils des turbulences, une mère décédée bien trop tôt. Une vie compliquée, survivances et rejets. Ma disparue, la fratrie est prise dans les pièges crescendo des injustices et des combats. Un père, devenu alcoolique, fuyant, l'errance en étoile, chercheur d'or, l'idéal flouté par une réalité qui, dévorante aura raison de Ba, ce père manichéen.
Sam, sa préférée, garçon manqué plus jeune que Lucy et pourtant la gardienne de leurs vies. Rejetées, petites filles abandonnées et démunies, elles vont fuir, sur un cheval de fortune, le père mort sur le dos de ce dernier.
Ne croyez pas à des pages violentes et insoutenables. Les visions floutées par l'impondérable. Il y a les forces solidaires, l'union et la lumière. Elles sont siamoises dans ces sillons rudes et hostiles.
« Debout marmotte. Il est temps de partir.
-Où ? Demande Sam, la langue pâteuse.
-En avant. Vers les repas chauds. le pain blanc. La viande. Un bon bain agréable. »
Ce texte aux nombreux prix culte et plausible est la double page, le reflet intrinsèque de l'autrice : C Pam Zhang chinoise elle aussi. Ce récit âpre et si olympien fait corps avec le lecteur. Cette saga, ode à l'immigration est le point du centre de notre plus belle part d'humanité.
« Mais ce sont plus des gamines.Neuf ans et huit ans. Négligentes avec leurs jouets, leurs genoux et leurs coudes. Elles laissent le nom qui les désigne tomber dans les interstices de leur sommeil, avec cet espoir qu'ont les enfants qu'il y aura toujours plus le lendemain : plus d'amour, plus de mots, plus de temps, plus de lieux où aller avec les silhouettes de leurs parents sur le siège du chariot... »
« De l'or dans les collines » est un périple initiatique bouleversant.
« Derrière, le regard de Sam sur Lucy est comme le soleil brûlant de l'Ouest. »
Ce livre est un film à ciel ouvert, un far west moderne, un huis-clos dans les étendues des émancipations , le macrocosme des résiliences, une réussite hors pair. Traduit avec brio de l'anglais (États-Unis) par Clément Baude, publié par les éditions le Seuil.
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« C'est quoi la vraie richesse ? »
Ce très beau roman, à l'écriture aérienne et poétique se décline en quatre parties. La première nous parle d'un présent où Lucy et Sam, filles d'immigrants chinois, fuient avec le corps de leur père décédé. Leur mère n'est plus là pour les aider, l'argent manque, le choix de partir s'impose. Dans la deuxième partie, ce sont les souvenirs avec la mère qui resurgissent. En troisième, le paternel s'exprime. Il raconte comment il a connu son épouse, les liens qui se créent entre immigrés. Et dans la quatrième partie, on revient au présent, un peu plus tard, cinq ans après. On découvre ainsi l'évolution de Lucy et Sam, comment leur passé a conditionné leurs choix de vie et la relation à la fois trouble, troublante, mystérieuse, envoutante qui les unit.
Au début de ce récit, les deux fillettes avancent vers l'avenir avec un mort. C'est bizarre d'agir ainsi mais c'est parce qu'elles souhaitent offrir un bel enterrement à leur père, Ba. Il faut trouver le lieu, le moment, ce qui ira le mieux. Tout le vécu avec lui les assaillent, le travail dans la mine, la faim, le froid…. le désir d'apprendre de Lucy, avec un professeur, monsieur Leigh, qui l'observe car il écrit une monographie…. Elles sont là, dans ce pays de grands espaces et de cow-boys, de chercheurs d'or, de villes qui apparaissent au bout de routes poussiéreuses. Les rencontres qu'elles font sont source de questions et leur permettent de continuer le chemin. Elles espèrent, elles aimeraient, elles voudraient… mais elles ne sont à leur place nulle part, elles ne sont pas d'ici, pas de là-bas non plus. Elles s'appartiennent et n'ont pas de racines. Pour autant, ce n'est pas une errance, chacune a soif de vivre sa vie, de pouvoir décider.
Est-ce que ce sera possible ? Parfois, il est plus facile de se faire enterrer (« elle a laissé une part d'elle-même toujours plus grande se faire enterrer. ») C'est plus confortable que de lutter sans arrêt, sans obtenir de résultat, mais sans être vraiment libre, quitte à s'oublier soi-même …..
« Qu'est-ce qui fait un chez soi ? » Lucy et Sam sont en recherche perpétuelle, avec un besoin constant d'exister, de trouver leur place, de prouver qu'elles ont le droit « d'être » tout simplement.
Elles pensent à leurs parents, à ce qu'ils ressentaient :
« Lui, c'était un monde perdu, voué à rendre le présent et l'avenir bien ternes en comparaison. Elle, c'était un monde si étroit qu'il ne pouvait accueillir qu'une seule personne. »
Il m'a fallu trois ou quatre pages pour rentrer dans ce récit. Au début, j'ai été un peu désarçonnée par le rythme, certaines phrases très courtes, d'autres plus longues, un style parfois épuré puis des détails, des descriptions de la nature qui campent un paysage, le rendant plus réel, plus visuel. Mais très rapidement, je me suis laissée porter par l'écriture (merci au traducteur) et par l'histoire singulière, belle et douloureuse comme une longue complainte, formée de couplets sombres et tragiques mais emplie d'un désir farouche de liberté, de vivre. C'est une lecture bouleversante, qui laisse une trace une fois la dernière page refermée. Quelle belle découverte !

Lien : https://wcassiopee.blogspot...
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