Sade et le cinéma

Précédé par une courte biographie de Donatien Alphonse François, marquis de Sade, lieutenant-général aux provinces de Bresse, Bugey, Valmorey et Gex, .ce livre édité en 2010 entreprend de nous présenter les multiples facettes de la vie et des oeuvres de ce personnage redécouvert au XXè siècle.

Les cinéastes ont retenu chacun un aspect de l'homme, de sa vie tumultueuse ou de ses écrits sulfureux, confondant souvent l'auteur avec sa littérature.

Le marquis de Sade est un personnage historique, nul n'en doute, né à Paris en 1740 et mort à Charenton en 1814. Ecrivain du siècle des Lumières, il ne connaitra pas la gloire littéraire de Voltaire ou de Diderot, mais plutôt l'enfermement et l'obscurité des cachots et de l'asile de fous.
Poursuivi, arrêté, embastillé, évadé, repris, relâché, condamné à mort, interné, il ne cesse d'écrire, noircissant des kilomètres de manuscrits, et de réclamer sa libération.
On s'interroge sur les causes de cet acharnement: affaires de moeurs, pratiques criminelles, actes d'impiété ou incitation à renverser le régime, les motifs d'une si longue captivité (27 ans, comme Mandela!) restent assez flous.
Même les changements de régimes politiques n'y changeront rien: Sade sera enfermé sous Louis XV, Louis XVI, la Terreur, puis par Bonaparte. Transféré d'une prison à l'autre, beaucoup de ses manuscrits disparaissent, en particulier lors de la prise de la Bastille. "J'avais quinze volumes à faire imprimer, à peine m'en reste-t-il un quart."
Alors qu'aucun portrait de Sade n'a été conservé, comme si son souvenir devait s'effacer, aucun cinéaste ne peut prétendre restituer une représentation fidèle du Marquis. On le présente comme un dandy élégant, comme un pervers monstrueux, un libertin ou un libertaire, un satyre insatiable, un philosophe athée et provocateur, un père de famille, un libre-penseur scandaleux, un fou maniaque et dangereux. Chaque film offre une vision différente, plus ou moins réussie.
D'où l'intérêt de parcourir ce livre qui présente de façon très documentée l'abondante production cinématographique qui a donné dans tous les genres, du film X au dessin animé.

"Il perdure une confusion permanente entre lui et ses personnages, entre les libertins de Sade, et Sade libertin.Il est traité comme un personnage de ses romans: pervers, sadique, raffiné, libertaire, athée... En définitive, le cinéma en a fait soit un gentil éveilleur de conscience, soit un monstre luciférien." (Robert Benayoun dans la revue Positif)

Remarquablement documenté et illustré, l'essai de Zimmer frise parfois, notamment lorsqu'il évoque les films consacrés à la vie de l'écrivain, l'écueil d'un exercice extrêmement pointilleux de comparaisons (en gros, relever les détails véridiques ou inventés parsemant les films). Mais ce qui aurait pu devenir un catalogue un peu fastidieux est sans arrêt contrebalancé par la manière dont le critique parvient à dégager de manière limpide les enjeux esthétiques et thématiques des oeuvres analysées.