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EAN : 9782262028985
372 pages
Perrin (24/10/2013)
3/5   2 notes
Résumé :
Les troubadours sont, au XIIe siècle, les auteurs, immensément admirés, des plus anciennes chansons d’amour composées dans une des langues nouvelles de l’Europe, la langue d’oc. Le tremblement du désir et celui de la crainte, la ferveur et la frustration, la jalousie et la jouissance, tout cela ils l’ont dit de façon si nouvelle et si intense que leurs chansons résonnent encore dans les mots d’amour d’aujourd’hui.


Le beau livre de Michel Zink ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Cette "histoire poétique" sur les troubadours débute au XIe siècle avec Guillaume IX, comte de Poitiers, duc d'Aquitaine et de Gascogne, le grand-père d'Aliénor. Ce grand seigneur est aussi un poète; ses chansons sont d'abord destinées à ses compagnons, il ne recule donc pas devant les facéties et les gaillardises d'un bon viveur, tout en se montrant parfois plus délicat et d'un lyrisme poignant, augurant de la poésie courtoise. Bernard de Ventadour, d'une origine plus modeste, s'exprime avec plus de retenue. Les troubadours ne parlent que d'amour mais de bien des façons. Michel Zink cite de très nombreux poèmes , en français et en occitan. Dans les chansonniers du moyen âge, ces poèmes ou chansons étaient accompagnés de vidas et de razos écrites par des auteurs anonymes. C'est grâce à ces courtes biographies et les interprétations qui sont données des poèmes que nous connaissons la plupart des troubadours. Les anecdotes y sont nombreuses et assez piquantes, reflétant le monde à la fois rieur et caustique des cours occitanes.
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Michel Zink, membre de l'Institut, est professeur honoraire au Collège de France. Il a étudié toute sa vie l'art des troubadours. Avec cet ouvrage, il nous permet de découvrir la sensualité, l'amour, la beauté des jeux de mots et le charme de la poésie en langue d'oc au XIIème siècle. C'est un réel plaisir pour les passionnés des belles lettres que de parcourir ces pages nous immergeant littéralement aux Temps Féodaux.

Dès les premières lignes, l'auteur explique que « lire les troubadours, c'est remonter à la source de la poésie, et d'une poésie exigeante ». Il précise d'emblée avec une grande pédagogie que « le mot troubadour a encore plus circulé que les troubadours eux-mêmes, pourtant grands voyageurs ». Il convient de définir précisément le troubadour. Zink expose l'idée suivante : « les troubadours sont les poètes à qui l'on doit les plus anciens poèmes lyriques intégralement conservés dans une langue européenne moderne, plus précisément dans une langue romane, c'est-à-dire dans une des langues nées des transformations du latin parlé. Cette langue est celle qu'aujourd'hui nous appelons souvent par commodité la langue d'oc, à la suite de Dante, grand connaisseur et grand admirateur des troubadours ».

Ne nous y trompons pas. Il ne s'agit pas d'un livre d'histoire au sens propre du terme, mais d'un livre d'histoires. Son étude se veut, selon les propos de Zink, comme « une invitation à lire ces poèmes anciens, écrits dans une langue vieillie et à demi étrangère, truffés d'allusions à des personnages et à des événements oubliés ». La poésie classique dépasse de loin l'exigence intellectuelle des conteurs contemporains, qu'ils soient chanteurs ou poètes, comme nous le découvrons en lisant des vers vieux de huit cents ans : « la poésie des troubadours, cette poésie si ancienne, cette première poésie composée dans les nouvelles langues de l'Europe, est éperdument élitiste et sophistiquée ». L'auteur poursuit sa brillante analyse : « non seulement elle n'a rien de populaire au sens sociologique du terme, tout au contraire, mais encore elle frappe, non par sa simplicité, mais par sa complexité et par sa difficulté délibérées ». Cependant, il précise « que la poésie des troubadours soit complexe n'implique pas nécessairement qu'elle soit savante, au moins dans le sens d'un apprentissage livresque, et ne dément donc pas en soi la lecture des romantiques, qui n'avaient pas tort d'être sensibles à la fraîcheur qui s'en dégage ».

Toutefois, écrire un très beau poème ne représente pas une fin en soi pour le troubadour. Encore faut-il veiller à sa diffusion pour rivaliser avec ses pairs ou toucher le coeur d'une gente dame… Ainsi, Zink nous apprend que le poète « avait trois moyens de diffuser la chanson qu'il venait de composer. Il pouvait la chanter lui-même, d'où l'importance accordée, non seulement à ses talents de compositeur, mais aussi à la qualité de sa voix. Il pouvait la faire chanter par un jongleur employé à son service. Il pouvait enfin la copier sur un petit rouleau de parchemin, un rollet ». N'oublions pas que les verbes du vieux français jongléer et jangler signifient bavarder et parler d'abondance.

Ainsi, un poème écrit et diffusé n'est en réalité jamais perdu dans la nature. En effet, Zink rappelle que « les troubadours ne cessent de se répondre les uns aux autres et de se citer les uns les autres. On a presque l'impression que chacun connaît la production de tous les autres ». de fait et même sans les moyens de communication modernes et ultra sophistiqués dont nous disposons actuellement, les informations circulent plutôt bien d'un bout à l'autre de l'Europe médiévale.

Comme chacun sait « les premiers troubadours sont limousins et aquitains. Très vite cette poésie se répand sur l'ensemble du domaine d'oc, de l'Auvergne aux Pyrénées, de l'Atlantique aux Alpes. Mais bientôt elle déborde même les frontières linguistiques. Les régions voisines l'adoptent dans sa langue d'origine. Les Catalans, les Lombards, les Vénitiens composent leurs chansons en langue d'oc ». Par ailleurs, Zink dit que « le premier traité de poésie écrit en langue d'oc et traitant de l'art des troubadours a pour auteur un catalan, Raimon Vidal de Besalù ». La poésie se révèle donc comme un excellent vecteur de diffusion des idées et permet le rapprochement des peuples. Effectivement, nous lisons avec intérêt que « dans la Divine Comédie, Dante ne rencontre pas seulement les troubadours périgourdins Arnaut Daniel et Bertrand de Bord, mais aussi Sordel de Mantoue, lui aussi grand poète en langue d'oc ».

Les traits des troubadours pour la plupart sont connus et reconnus. Zink l'analyse de cette manière : « il prend la pose de l'amoureux transi, mais non point tout à fait transi. Il attend les faveurs de celle qu'il aime sans en désespérer totalement, sans non plus oser les espérer. Il se plaint d'être tourmenté par le désir, d'en souffrir à en mourir, mais il trouve dans l'amour même une récompense et une joie. Il s'estime heureux d'aimer, même s'il n'obtient rien. Il est à la fois exalté et déprimé. D'autre part, il tend à personnifier Amour, qui est à cette époque, même au singulier, de genre féminin ».

Dans les dernières pages, l'auteur conclue « qu'il est si difficile de parler de poésie sans être ennuyeux, si difficile de donner envie d'en lire ». Nous écrivons, sans aucune flatterie, qu'il réussit parfaitement son objectif. Nous avons pris un très grand plaisir à lire son ouvrage qui nous donne envie d'aller à la rencontre de ces poèmes et poètes oubliés. Son étude se montre intéressante, plaisante et apporte un réel vent de fraîcheur. Etudier et lire de la poésie revient à vivre un enchantement permanent. Les troubadours nous y convient pour notre plus grand plaisir.

Franck ABED
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Le sujet est interessant, mais l 'ouvrage est très "chiant" à lire...
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Une imagination nourrie par les poèmes qu’elles prétendent expliquer. Une imagination qui est donc comme la transposition sur le mode narratif d’une appréhension poétique du monde et qui procède à l’inverse de l’imagination poétique. Celle-ci métamorphose une expérience du monde qui pourrait être le noyau d’un récit, voire l’objet d’un récit, en un langage où l’empreinte du monde s’imprime immédiatement, sans détour discursif ou narratif. Vidas et razos parcourent le chemin en sens inverse. Prendre conscience de cette démarche, c’est écarter la tentation de les traiter avec condescendance,comme on l’a presque toujours fait.
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L’histoire poétique des troubadours est donc d’abord faite de leur vie, de leurs voyages et de leurs amours, de leurs rencontres, de leur carrière et de leur œuvre. L’histoire poétique des troubadours est aussi l’histoire de leur art et de son influence, en particulier l’histoire des manuscrits qui, alors que sa grande époque est déjà achevée, se sont employés à le préserver. L’histoire poétique des troubadours, c’est encore cette grande histoire morcelée, faite de centaines d’histoires qui se sont écrites autour de leurs poèmes, qui s’en inspirent, qui les fiction littéraire peut être désignée comme une histoire poétique. L’histoire poétique, ce peut être l’histoire de ce qui n’est jamais arrivé que dans les
histoires.
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La complexité recherchée par les troubadours nous paraît ainsi, de façon sans doute illusoire mais tenace, en harmonie avec l’idée que nous nous faisons de la poésie.
C’est une raison de les lire. Elle ne tient pas seulement, de façon générale, à ce mouvement de va-et-vient, d’arrachement à soi-même et de retrouvailles avec soi-même, à travers lequel nous découvrons toute œuvre du passé et qui est l’illustration même du « cercle herméneutique ». Il s’y ajoute un trait spécifique. Cette poésie si ancienne, cette première poésie romane, présente les caractères d’une poésie à ses débuts, mais en même temps ceux d’une poésie élaborée, confrontée au passé et déjà chargée d’un passé. Ceux d’une poésie qui ne cesse de revenir sur elle-même et sur l’idée qu’elle se fait d’elle-même.
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L’histoire poétique peut être, par opposition à l’histoire des faits tels qu’ils se sont produits, l’histoire transformée par la mémoire et par l’imagination : la guerre de Troie vue par Homère, le règne de Charlemagne et de son successeur ou les croisades vues par les chansons de geste, les guerres napoléoniennes vues par le vieux soldat du Médecin de campagne de Balzac.
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L’histoire poétique des troubadours, c’est celle de la partie qu’ils ont jouée et du rôle que chacun d’entre eux a tenu dans le grand jeu de société dont la poésie et l’amour leur ont fourni la règle. Ce jeu de société qu’ils ont imaginé avec sérieux et avec humour, et qu’ils ont pratiqué avec passion et avec distance,comme on le fait de tout jeu.
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Videos de Michel Zink (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Michel Zink
Leçon inaugurale de Michel Zink prononcée le 24 mars 1995. Michel Zink fut professeur du Collège de France, titulaire de la chaire Littératures de la France médiévale.
Dans les lettres médiévales se cristallisent toutes les associations entre le passé et la littérature, tous les indices qu'un lien essentiel unit la notion de littérature au sentiment du passé. La curiosité qu'a éveillée la littérature du Moyen Âge depuis sa redécouverte à l'aube du romantisme suppose de telles associations. Les formes de cette littérature elle-même recèlent de tels indices. Ils invitent à embrasser d'un même regard l'intérêt de l'époque moderne pour le passé médiéval et les signes du passé dont le Moyen Âge marque sa propre littérature. Bien plus, ils invitent à chercher dans la relation avec le passé un critère de définition de la littérature, tâche tout particulièrement nécessaire s'agissant d'une époque où le mot ne s'entend pas dans son acception moderne et où l'existence même de la notion correspondante n'est pas assurée.
Texte intégral de la leçon inaugurale : https://books.openedition.org/cdf/1114
Retrouvez ses enseignements : https://www.college-de-france.fr/fr/chaire/michel-zink-litteratures-de-la-france-medievale-statutory-chair
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