Je poursuis encore et toujours ma découverte (dans l'ordre) des Rougon-Macquart.
Et lorsque il y a quelques semaines j'ai terminé Son Excellence Eugène Rougon, je ne vous cache pas que je ressentais une hâte et un enthousiasme fébrile à l'idée d'enfin découvrir le célébrissime 7ème tome : L'Assommoir. Car depuis que j'ai commencé la saga au printemps dernier, je suis tout entière immergée dans l'histoire de cette double famille à laquelle je me suis beaucoup attachée ! C'est donc pleinement ancrée au sein de celle-ci et que j'ai débuté L'Assommoir.
Quelle claque.
« Pauvre Gervaise…ma pauvre Gervaise », voilà ce que je n'ai eu de cesse de me répéter tout au long de ma lecture.
Dès les premières pages je me suis attachée à la célèbre blanchisseuse dont l'histoire est si connue que je n'aurai guère besoin de la répéter ici. Elle m'a émue. Elle m'a touchée. Sa force, sa volonté, sa résilience, sa bonté, tout ses traits de caractères mon beaucoup rappelé Fine, sa mère, que l'on découvre dans le tome 1 La Fortune des Rougon. D'ailleurs j'ai trouvé leurs parcours de vie, malheureusement, très similaires. La même volonté de vivre honnêtement, la même capacité à se tuer au travail sans se plaindre, la même gentillesse dont elles seront abusées,…et surtout les mêmes maris qui vont les tirer vers le bas.
A ceci près que, contrairement à Antoine Macquart, Coupeau était bon au début.
Jusqu'à ce que l'alcool fasse dérailler le couple. C'est ça qui m'a le plus marquée, frustrée, révoltée… Tout aurait pu se passer autrement. Si seulement.
C'est en ayant à mon tour enfin lu ce chef d'oeuvre, que je comprend pourquoi il fut tant décrié à l'époque et pourquoi il est tant apprécié aujourd'hui.
Décrié car sur l'instant ses contemporains (et on voit aisément pourquoi) l'ont trouvé trop sale, trop vulgaire, trop bas. de la misère pour de la misère sans but apparent. Pas d'héroïsme, pas de belle fin, une plongée dans les moindres détails du peuple, jusque dans leur agot présent dans la narration. Et surtout une atroce photographie des ravages de l'alcool.
Oui il y avait de quoi être rebuté.
Apprécié car le talent de
Zola est aujourd'hui pleinement reconnu, que l'on profite entièrement de ce qu'il nous a offert ici c'est à dire une immersion totale dans une réalité (pas La, seulement une); celle de ce coin qui n'est pas encore tout à fait le 18ème arrondissement mais juste un quartier aux abords de
Paris, dont la vie grouille, la vie ouvrière sous le second empire avec toutes ses difficultés, les rues sombres d'avant Haussmann, la pauvreté, la misère, mais la vie malgré tout. La vie foisonnante à travers l'abondance de commerçants, d'habitants, qui vivent tous les uns sur les autres, les uns à côté des autres, donc dans une socialisation permanente. Entre-aide et médisance coexistants.
Soit que l'on apprécie le tableau social d'une époque soit tout simplement que l'on y trouve un attachement affectif aux personnages, ou les deux, ce roman est riche. Si riche.
Bref, une grande, très grande oeuvre sur laquelle on pourrait écrire des pages, et qui moi m'a bouleversée.
Triste, beau, sale, poignant.