Voilà un petit livre d'une centaine de page seulement, qui m'a enchantée. Ces escapades littéraires à Saint Petersbourg sont une plongée dans l'ancienne ville sous la plume de différents écrivains ; et nous comprenons mieux la fascination qu'elle a exercée au cours des siècles.
Pendant cette escapade de 1757 à 1875 nous cheminons dans la ville en pleine transformation. Voltaire note en 1757 : Petersbourg n'était autrefois qu'un amas irrégulier de maison de bois ; c'est à présent une ville plus belle que Berlin, peuplée de plus de trois cent mille hommes". Mais en 1762 Claude Carloman de Rulhière, secrétaire d'ambassade, doute de la pérennité de Petersbourg, quid de la "solidité des bâtiments construits la hâte et de la fréquence des incendies".
Tous admirent "son aspect, en venant de la mer par la Neva, Petersbourg est d'une magnificence ėblouissante" et pourtant ces mêmes auteurs constatent que :"sa splendeur s'évanouit en approchant , comme l 'effet d"une décoration théâtrale. Toute cette architecture est de chaux de bois et de brique ; tous ces ornements sont mal exécutés ". (1762) certains parlent même de mauvais goût.
En 1765 Casanova souligne avec admiration : " il fallait un génie de fer comme celui de Pierre pour donner un démenti à la nature, en forçant un terrain de boue, une terre sans consistance à supporter des édifices énormes en marbre et granit, et fonder sa capitale au milieu de cet amas de palais que l'on ne peut élever qu'avec des frais ėnormes".
La société de Petersbourg est décrite avec beaucoup d'humour par Xavier Marmier, la bureaucratie, les petits employés... et surtout la police " les ressorts de la police sont cachés comme ceux d'une montre sous un cadran d'émail ; on sait qu'ils existent, qu'ils tournent régulièrement dans le cercle qui les renferme..." Madame de Stael (1812) nous livre des reflexions sur le caractère des russes : "Ce peuple , qu'il faut toujours peindre par des contrastes, est d'une persévérance inouïe contre la nature ou contre les armées ennemies. La nécessité trouva toujours les Russes patients et invincibles..."
Voilà, je pourrais continuer, mais je vous laisse découvrir. Finalement on trouve le livre un peu court, dommage.
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Très bonne idée que cet ouvrage marqué du sceau des plus grands, qui nous entraînent à la découverte de cette ville magnifique.
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La Neva traverse de part en part la ville de Saint Petersbourg et forme plusieurs îles en son delta. Ses quais sont de granit, ses ponts sont de granit, ainsi que les bases des palais qui bordent le fleuve ; tout est granitique à Saint Petersbourg, on sent partout la force du fondateur. Lui, ce Romulus du Nord, se montre encore à cheval au milieu de la vaste place qui porte son nom. Il est posé là dans l'attitude qu'il prenait quand il bénissait son peuple en traversant la ville impériale. La peau d'ours qui sert de housse est le symbole de la barbarie où était plongé le peuple russe au commencement de son règne ; et le rocher que gravit le cheval du tsar est celui des obstacles vaincus.
Paul de Julvėcourt 1834
Les Russes habitants de Saint Petersbourg ont l'air d'un peuple du Midi condamnés à vivre au Nord, et faisant tout ses efforts pour lutter contre un climat qui n'est pas en accord avec sa nature.
Les yeux fixés sur la demeure impériale, ils répètent leur proverbe traditionnel :" Près du tsar le pouvoir, près du tsar la mort."
la vanité fait prodiguer au grand seigneur ses revenus, et souvent multipler ses dettes, pour l'environner de cet éclat exterieur. Cet aliment de la vanité est devenu à Saint Petersbourg un objet de luxe.
Les petits employés ont seulement l'esprit étroit et l'humeur à la fois humble et arrogante. Il y a en eux du serf et de l'affranchi.
Xavier Marmier 1842
VOLTAIRE / CANDIDE / LA P'TITE LIBRAIRIE