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Critique de Fleitour


Sous l'égide de Zola, des écrivains décidaient en 1879 de publier conjointement six nouvelles, ce volume devait évoquer la fameuse guerre de 1870. Cette version tumultueuse donnée de la guerre fut loin des récits patriotiques à la mode.

Les amis réunis au cours des soirées dites de Médan mettaient le cap sur les coulisses, les actions peu glorieuses, les faux exploits, donnant un éclairage bien pathétique de ces événements, ainsi page 141,
"On eût dit d'une Cour des miracles roulante; les estropiés sautaient à pieds joints, ceux dont les intestins brûlaient les arrosaient des lampées de Cognac, les borgnes ouvraient les yeux, les fiévreux cabriolaient, c'était inouï!" (Huysmans).


Les trois nouvelles principales sont l'oeuvre de Zola, Maupassant et Huysmans, du moins celles publiées par Hachette en 2013 puis par Flammarion en 2014.
Ces nouvelles pourraient figurer parmi les Contes Cruels" de Villiers de L'Isle-Adam, et notamment celle célèbre De Maupassant, " Boule de Suif".

Pour ma part j'ai adoré les deux premières, un peu moins la troisième nouvelle dont le style m'a semblé parfois un peu trop lissé s'agissant de soldats prêts à tout pour se payer à bon compte une virée.

L'intérêt historique de ces publications tient au dessein affiché par ces six trublions, qui furent perçus par la presse, comme les précurseurs d'une école nouvelle les médanistes, copieusement vilipendés par Paul Déroulède qui publia les chants patriotiques en 1882 après les chants du soldat.


Ces nouvelles sont très éloignées des scènes d'héroïsme, Zola et ses amis voulaient restituer les faits, certains dans toutes leurs ignominies, ils partageaient une même vision philosophique, les mêmes choix esthétiques, l'oeuvre se posait comme le manifeste du naturalisme, auquel Flaubert fut rattachée malgré ses réticences.

L'essor du journalisme, a permis une large diffusion de nombreux récits de nos meilleurs écrivains, contes, fables, nouvelles, dont la forme tenant à l'oralité de l'anecdote racontée, inspirée par des faits divers, rappelait étrangement le ton journalistique.

Villiers de L'Isle-Adam devait publier en 1883 les "Contes Cruels" dont plusieurs déjà diffusés dans la presse avaient gagné l'estime du public. On dit que Mallarmé et Flaubert ont apprécié l'éloquence et la qualité de l'écriture, Mallarmé estimant que plusieurs nouvelles sont d'une poésie inouïe.
Mais l'hommage le plus retentissant viendra de Huysmans, l'un des piliers des soirées de Médan.


Alors au-delà des éloges ou des critiques acerbes de certains organes de presse, quel est l'étrange mixture qui a fait le succès de ces nouvelles ?

Le réalisme alimente le piment du récit de Zola, ne reculant devant aucune précision fut elle, effrayante ou répugnante, l'attaque du moulin permet l'irruption de la violence et le pathétique de la situation de Françoise qui passe par toutes les bassesses possibles, "C'était l'âme du moulin qui venait de s'exhaler. Françoise, imbécile, entre les cadavres de son mari et de son père au milieu des ruines fumantes du moulin, le capitaine français entra, la salua galamment de son épée, en criant victoire ! "p 50.

Le sommet de ces nouvelles est la mise a nu du comportement cruel et indécent des notables prêt à tout pour sauver leur peau, leur bien, et leur peu d'honneur . La lâcheté portée à ce point devient hautement risible et leur petitesse est encore plus insolente. "Boule de suif se sentait noyée dans le mépris de ces gredins honnêtes qui l'avaient sacrifiée d'abord, rejetée ensuite, comme une chose malpropre et inutile. Page 117".


La roublardise des deux soldats de la 3ème nouvelle scelle le ton final de l'armée française en 70, une levée des troupes aléatoire, objet de trafics , la désorganisation de l'intendance, ou l'incompétence des généraux...

Pour la petite histoire un bataillon de zouaves pontificaux participait aux combat aux côtés de l'armée impériale. Un de mes amis en a fait un objet de recherche, documents, équipements, armes... Cette drôle de guerre nous a réservé bien d'étonnantes surprises.

Trois auteurs à consommer sans modération. A lire aussi « les Contes Cruels ».
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