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Critique de Cricri08


Dans cet essai, l'auteure essaie de saisir les perceptions sociales des risques liés au fait d'habiter près de ou de travailler dans l'industrie nucléaire. Ethnologue, elle a enquêté longuement en écoutant, en rencontrant les personnels de l'usine de retraitement des combustibles irradiés de la Hague et des riverains.
Elle a ensuite analysé leurs témoignages grâce à une approche sémantique et une analyse symbolique.
Elle a observé un contraste frappant entre le calme des villages de cette pointe de la presqu'île du Cotentin et la ville-usine entourée de barbelés électrifiés, la campagne et la ville, le calme et le tumulte, la pureté et la contamination …
Sur ce promontoire rocheux, on trouve la plus forte concentration nationale d'industries à vocation nucléaire : outre le centre de retraitement des déchets, il y a aussi la centrale nucléaire de Flamanville et l'Arsenal de Cherbourg où sont fabriqués les sous-marins à propulsion nucléaire.
Son analyse a fortement déplu, car elle mettait en avant une « pensée sauvage », « une dialectique sexualisée de la puissance et de la souillure ».
Elle observe aussi un travail sur l'image : en 2001 Cogema (compagnie générale des matières nucléaires) change de nom pour Areva qui n'est pas un sigle (un nom qui fait rêver !) : avec le but évident de faire oublier la dangerosité du nucléaire !
Elle explique le préjugé des personnes interrogées avant toute discussion : si vous abordez la question de la sécurité des sites nucléaires, vous êtes forcément de parti pris et donc antinucléaire et observe l'euphémisation des risques car toutes les précautions sont prises. Les techniciens ont un langage scientifique-écran même si une anxiété latente affleure cependant dans les discours.
La ville de la Hague est trop souvent associée à l'usine, le nom disparait alors des étiquettes des produits laitiers ou est tu par les pêcheurs pour donner la provenance de leurs poissons, les habitants ont un sentiment de vol de leur identité par cette « poubelle »
Ils ont globalement peur de la crise et du chômage et se réfugient à l'usine, étant la seule entreprise qui fournit du travail.
Les gens ne font pas confiance à l'usine, essentiellement à cause de nombreux couacs de communication, notamment lors d'incidents desquels la population n'a pas été prévenue et donc aucun dispositif de protection de la population n'a été mis en place. « Ils contrôlent tous mais on n'a pas les résultats ».
L'auteure souligne également la réaction machiste à son travail : elle a une « personnalité féminine donc naturellement perturbée » !
Un essai très intéressant, avec juste ce qu'il faut de remise en contexte scientifique, mais surtout une analyse très fine du langage adopté pour nier, minimiser voire même oublier les risques du nucléaire.
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