Les commentaires élogieux ont poussé ce livre dans ma PAL, où il trainait depuis des mois. Ne sachant pas trop à quoi m'attendre, ayant peut-être peur d'être déçue après plusieurs lectures se rapportant à cette époque de la Seconde Guerre mondiale. Bref, il me fallait un « Z » pour le challenge ABC, il était donc temps de me plonger dans l'histoire de Liesel.
Il m'a d'abord été difficile de rentrer dans l'histoire. L'histoire de Liesel, comment elle devenue voleuse de livres et ce que cela lui a apporté, nous est contée par un narrateur bien singulier : la mort. Ce sont ses interventions, ses adresses au lecteur, sa manière de présenter l'histoire qui m'ont gênée sur la première partie. Puis je me suis attachée au personnage de Liesel, à Hans son père adoptif et à Max. Dès lors je n'avais plus qu'une hâte : découvrir la suite du récit, et c'est en deux jours que j'ai avalé les 450 dernières pages.
Liesel a 11 ans quand elle arrive dans une petite ville près de Munich en 1939. Son père, communiste, a disparu depuis longtemps. Sa mère, malade, ne peut plus s'occuper de Liesel et de son petit frère, lequel décède dans le train qui les conduit chez Hans et Rosa Hubermann. C'est au travers de son destin d'enfant, d'orpheline, que la mort, témoin privilégiée, va nous décrire la guerre et ses restrictions, l'école, l'endoctrinement, les jeunesses hitlériennes, la persécution des Juifs, la faim, l'amitié, la haine et la bêtise aussi. Pourquoi la mort a-t-elle été attirée par cette enfant ? le hasard de trois rencontres, la force et l'humanité de Liesel, l'intérêt de l'adolescente pour les livres, pour les mots ? À moins que Liesel n'apport à la mort cette dose d'humanité doit on dit qu'elle lui fait défaut.
Quand elle arrive dans sa famille adoptive, alors qu'elle vient de perdre son petit frère et sa mère, Liesel ne connaît rien du monde qui l'entoure. C'est avec l'amour inconditionnel de son bienveillant père adoptif qu'elle va l'aborder, apprendre à vivre avec, à échapper à ses dangers. Hans l'humaniste va lui ouvrir les portes de ce monde et de l'imaginaire en lui apprenant à lire. Il n'y a pas d'insouciance pour une enfant dans l'Allemagne nazie, mais la quête de petites choses qui vont améliorer le quotidien. Pour Liesel, trois choses rendent cette vie supportable : la lecture avec Hans, l'amitié amoureuse avec Hans, les croquis de Max.
Markus Zusak choisi une figure de la mort bien différente de celle que véhicule généralement la littérature occidentale. Son personnage ne choisit pas ceux dont elle va recueillir le dernier souffle. Elle a plutôt hérité d'un métier bien ingrat, qui ne connaît jamais de repos. Elle est celle qui soulage l'âme des morts et qui ne peut que faire le constat du destin des hommes, des femmes, des enfants, parfois avec un regret, parfois avec une certaine satisfaction. Elle n'est pas une sanction mais une douce et compatissante accompagnatrice.
L'auteur a choisi une construction originale, tant par le choix de la narratrice que par la forme. La page de chaque partie s'ouvre sur la liste des titres des chapitres qui vont suivre. Suffisamment vague et énigmatique pour ne pas trop révéler du récit tout en suscitant la curiosité. Il sait créer des moments forts sans surcharger en émotion ni en description. La psychologie des personnages est démontrée par leurs paroles, leurs actions, pas par une description.
Certes tout est tragique dans cette histoire. Comment pourrait-il en être autrement vu le contexte. Mais la douceur de certains personnages et l'humour qui est glissé, la poésie de Max, l'humanité de Hans, l'humour noir de la narratrice, tout concours à en faire un livre cocasse et bouleversant, qui met en avant des valeurs humaines : l'importance des liens familiaux, l'amour de son prochain, l'amitié, la solidarité et la puissance des mots.