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EAN : 9782130548584
125 pages
Presses Universitaires de France (15/10/2004)
4/5   220 notes
Résumé :
Présentation de l'éditeur
D'écrivain comblé et adulé, Stefan Zweig était devenu un exilé se plaignant auprès de Romain Rolland de ne plus recevoir de courrier. Admirant profondément Montaigne mais aussi Nietzsche, Dostoïevski et Freud, Stefan Zweig souffrait d'être si peu semblable à ses modèles. Il lit et commente passionnément Montaigne pour y trouver la voie de sa liberté intérieure, la force d'assumer son ultime décision.

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Critiques, Analyses et Avis (36) Voir plus Ajouter une critique
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Ce dernier livre, peut-être inachevé, de Stefan Zweig est plus qu'une biographie.
C'est un hommage, une rencontre, presque une conversation.
Pour Zweig, l'oeuvre de Montaigne, même si elle apparaît toujours comme un véritable plaisir littéraire, ne peut emporter l''enthousiasme que d'un homme mûr marqué par les épreuves.
De plus, sa rencontre doit être favorisée par les événements.
Et comme Montaigne, fuyant la peste qui ravageait Bordeaux, Stefan Zweig a fui le nazisme."Il fait alors l'apprentissage du métier de réfugié".
Il s'installe à Pétropolis au Brésil où il vivra ses derniers mois.
Et comme Montaigne, il croit voir s'éteindre, avec la guerre, la grande espérance de voir le monde devenir humain.
Absorbé par "Les essais", le dernier écrivain qu'il lit et qu'il commente est donc Montaigne.
"Montaigne" 'est un livre beau, court et profond.
Le premier chapitre est une sorte de préface où les esprits des deux écrivains s'entremêlent.
Puis Stefan Zweig fait se lever le rideau pour que l'auteur des "Essais" puisse orgueilleusement signer son livre du nom de Michel Sieur de Montaigne et porter des armoiries qui ont coûté à l'origine la modeste somme de neuf cent francs.....
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Entre deux plats de noël, une petite critique : )
Superbe Zweig, comme d'habitude !
Cet homme ( Stefan, mais Michel aussi ) est parti trop tôt, début 1942. S'il avait attendu un an de plus, il aurait vu le basculement des forces en faveur des alliés.
Pour revenir à Montaigne, c'est un homme que Zweig admire car ils ont vécu des épreuves similaires : être capable de rester soi-même dans la tempête, Montaigne pendant les guerres de religion, Zweig face au nazisme ; et ce après une avancée de l'humanité :
la Renaissance et la perspective d'un nouveau monde pour Montaigne, la conquête du ciel pour Zweig.
Ce qui fascine l'auteur, c'est que, sans être un ermite, Michel de Montaigne se détache de plus en plus de ses fonctions administratives et même familiales pour réfléchir dans la grande tour de son château, et aller à la recherche, à la rencontre de son moi intime :
"Qui suis-je ?"
Mais pour se connaître, il faut étudier les autres, ce qu'il fait tellement bien qu'il finit par bien connaître l'Humain, et il est, à plusieurs reprises, négociateur entre le roi Henri III, catholique, et Henri de Navarre, huguenot.
.
Quelle belle écriture, et tellement simple. Je dis que la simplicité est la marque des Grands.
On n'est pas noyés dans les détails, l'auteur va à l'essentiel, c'est à dire ici, à ce qui intéresse Montaigne : l'Humain.
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Zweig travaille sur Montaigne juste avant de se donner la mort, son texte a été retrouvé dans ses papiers et publié en 1960. Il n'était sans doute pas achevé, quelques jours avant son suicide, il le présentait comme un premier brouillon. Mais étrangement, je l'ai apprécié tel quel, ramassé, allant à l'essentiel, sans effets de manche.

C'est apparemment quelque peu par hasard que Montaigne a été la dernière oeuvre de Zweig : il ne l'a pas vraiment aimé lors d'une première lecture pendant ses jeunes années. Mais il découvrit une version des Essais dans sa maison, et la relecture l'a transportée. A ce moment de sa vie, Montaigne faisait écho en lui. Il l'explique au début de son texte : Montaigne est un auteur dont la signification ne se révèle qu'à un moment précis, celui d'un monde qui s'écroule, un monde de violence, de choix difficiles, où il faut définir ce que l'on entend par être un homme, une personne véritable. Il pose la question de la liberté de l'âme, la liberté individuelle, de la fidélité à soi-même, de l'essentiel dans les apparences trompeuses. Il devient une sorte de modèle, à qui s'identifier et dans lequel puiser courage et inspiration. Zweig va donc dérouler la vie de Michel en mettant en évidence ces aspects essentiels pour lui.

Une vie relativement simple. Après avoir présenté la vie des générations qui ont précédé, Zweig dépeint l'éducation, en avance sur son temps. Les trois premières années passés dans la cabane d'un charbonnier, pour affermir le corps, puis une éducation humaniste au château familiale, avec l'apprentissage du latin, comme langue maternelle, tout en lui laissant une grande liberté et en le choyant. Il subit ensuite l'école, et fait des études de droit. Il tentera de suivre les pas de son père et de s'engager dans la gestion de Bordeaux, mais sans grand succès. Il va alors se retrancher dans le château familial, et s'y réserver une tour, avec sa bibliothèque. Il va y écrire les premiers tomes de ses Essais, essayer de se connaître lui-même. Il s'y cherche, mais au-delà, y cherche « l'homme originel ». Zweig insiste sur le fait que cette recherche n'est jamais prescriptive, qu'elle n'aboutit pas à vouloir imposer aux autres un modèle.

Mais il finit par quitter sa tour. Zweig pense que le retranchement dans la tour, à la recherche d'une liberté intérieure aboutit au final à une contrainte, non moins lourde que celle des charges politiques, des affaires. Car il y a le quotidien à gérer, les biens, les proches. Et ce n'est pas moins contraignant que les affaires du monde. Montaigne finit donc par s'échapper, à voyage. En Italie il est rattrapé par l'histoire : sans s'être présenté, il est élu maire de Bordeaux et le roi lui commande d'accepter cette charge. Il interviendra ensuite comme intermédiaire entre Henri III et le futur Henri IV pour aider à trouver un accord, qui permette d'éloigner le spectre des guerres civiles. Il ne souhaitera pas devenir conseiller de Henri IV après son accession au pouvoir, il préférera se préparer en douceur à la mort.

Zweig brosse un joli portrait de Montaigne, certes sans doute avec un parti pris, mais convaincant et touchant, très vivant et humain.
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Voila un livre bien difficile à classer: c'est à la fois une biographie et aussi un essai. En effet, Stefan Zweig nous livre sa vision totalement personnelle et engagée de la vie de Montaigne. Il trouve dans l'auteur des Essais un frère dans l'esprit, un modèle de philosophe qui vit selon ses convictions dans une période troublée de la fin De La Renaissance. En fait, ce livre nous en apprend autant sur Montaigne que sur Zweig: c'est le dernier livre terminé de l'écrivain autrichien avant son suicide à Persepolis au Brésil, même s'il est probable qu'il ne s'agisse que d'une première mouture qui restait à peaufiner. Cependant, Zweig montre clairement ce qui le rapproche de Montaigne à tel point qu'on a bien des difficultés à voir ce qui sépare le maître du disciple et que l'on oublie que l'humaniste du XVème siècle était un bon vivant alors que l'auteur du Monde d'hier était facilement dépressif. Malgré ce travers, cette courte biographie nous fait pénétrer de façon passionnante et étonnamment pertinente dans la pensée de Montaigne dont la lecture m'a toujours parue particulièrement ingrate. Un livre donc très intéressant qui nous en apprend autant sur Zweig que sur Montaigne et qui donne envie de se replonger dans les Essais, surtout qu'il existe maintenant une version en français moderne (édition Quarto)
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Stefan Zweig (1881-1942) fut un auteur très inspiré et excella dans tous les domaines de la littérature, romans, nouvelles, poésie, théâtre, biographies.

Au cas présent, une biographie de Montaigne…

Une vie extra-ordinaire dès l'aube de son existence terrestre ; fils d'un père anobli de fraiche date, il est confié à une famille de pauvres bucherons. De retour dans l'enceinte familiale, il a comme langue d'apprentissage le latin, au point que les domestiques devront eux-aussi acquérir quelques rudiments.
Il ne brille pas particulièrement dans sa scolarité, ne disposant pas d'une « faculté de compréhension rapide et agile ». Après des études de droit, il devient conseiller au Parlement de Bordeaux, charge qui lui permet de rencontrer Etienne de la Boétie.

Rencontre fondatrice sur le plan humain et de la création. Pas d'Essais sans cette alchimie avec La Boétie.

A la suite d'un échec pour une promotion, il décide en 1571, à 38 ans, de revendre sa charge et de se retirer dans le château familial où il commence l'écriture des Essais avec une première édition en 1580.
Double retrait, d'abord de toute activité dans la société, mais aussi domestique en s'isolant le plus possible des sujétions de la vie domestique.
Mais en dépit du symbole apparent, son esprit ne s'est pas enfermé dans sa tour d'ivoire.
Tout le contraire, le scepticisme, l'ouverture d'esprit ponctuent ses pensées exprimées dans ces Essais « Quelle vérité est-ce ces montagnes bornent et mensonge au monde qui se tient au-delà ? » (Les Essais p. 615 aphorisme qui fera fortune sous la plume de Blaise Pascal…)
Son esprit pétille et son propos fait voler en éclat les opinions qui garrottent les esprits de ses contemporains. Il s'insurge contre le traitement infligé aux habitants du « nouveau monde », colonisé récemment ; les vrais barbares, ce sont les conquérants européens, pas les populations locales asservies. La torture utilisée par la justice comme moyen ordinaire, le révolte. Il dénonce la présupposée supériorité de l'humain sur les autres animaux.
En 1580, Montaigne entreprend un long voyage en Italie et à son retour il apprend qu'il a été nommé maire de Bordeaux, sans doute porté par le succès naissant de ses Essais. Cette désignation ne lui sied guère mais il ne peut la refuser, s'agissant en définitive d'un ordre royal. Cette fonction est exercée à distance, à partir de son domaine ce qui ne n'empêche pas sa réélection. L'exercice de cette magistrature se terminera dans des conditions peu glorieuses mais qui doivent être restituées dans ce quotidien à la Jérôme Bosch ; dans une région ravagée par la peste, Montaigne fuit avec sa famille, laissant derrière servitudes publiques et surtout cette farandole macabre infinie de villes et des paysages de désolation.
De retour dans son domaine, après quelques péripéties dans l'arrière-cour de l'histoire et des grands du royaume il n'aura de cesse de se remettre à l'ouvrage. Car Montaigne, sans doute avec un zest d'auto dérision comme Stefan Zweig se plaît à le citer « L'esprit je l'avais lent (…) l'appréhension » tardive, (…) et après tout un incroyable défaut de mémoire », écrit à son rythme, en ne fermant jamais les portes.
Mais cet apparent handicap, Montaigne le métamorphose en une richesse éclatante. Tel un ébéniste de l'écriture, passes après passes, il lisse, embellit sa pensée, prenant régulièrement à contre-pied le lecteur soit en l'engageant dans des chemins de traverse, soit en faisant des haltes qui ne se révèlent en définitive que des pauses en trompe l'oeil ; malicieusement, un peu comme Socrate auquel Montaigne fait régulièrement référence, qui dans ses dialogues feint de rejoindre son interlocuteur pour mieux le neutraliser.
Montaigne est le maestro de l'esquive, mais pages après pages, relectures après relectures, l'architecture des Essais, comme sa tour qui seule a résisté à l'incendie, est solide, puissante et défie le temps.
Et puis la rencontre de Marie de Gournay en 1588 ; la jeune femme a 23 ans, Montaigne 55 ans. A la demande de la femme de Montaigne, elle assurera la publication de la 3eme édition en 1598 avec une belle préface. le profil de cette femme est pour le moins singulier à cette époque : être une femme de lettres, célibataire, brise les codes ; tout au long de sa vie, Montaigne aura donc fait preuve d'une liberté d'esprit incroyable mais dans la discrétion. Un contraste violent avec les fracas et les clameurs hystériques de ce XVIéme siécle.
Montaigne ne connaît que trop les horreurs d'une époque de violence sanguinaire alors que les élans de la Renaissance laissaient espérer un monde nouveau. Pour les activistes de chaque parti il ne saurait y avoir de cohabitation avec l'autre, celui qui pense et prie différemment le même Dieu.

Cette période si sombre de Montaigne, où on peut légitimement douter de tout, en particulier de l'existence du Bien, de la nature de l'homme, est apparue tragiquement familière à Stefan Zweig en relisant les Essais.
Les Essais ont manifestement accompagné le grand homme de lettres dans les dernières pages du livre de sa vie qu'il a décidé de fermer prématurément.
Mais il parait improbable que Stefan Zweig ait cru pouvoir trouver une forme d'encouragement au suicide dans les pages des Essais.
Montaigne est juste un homme, remarquable entre tous, pas un guru qui propose un système ou des recettes de (sur)vie, et encore moins un culte de la désespérance. « Mon métier et mon art c'est vivre » (Les Essais p.398)

Montaigne ou un extraordinaire et effervescent laboratoire de vie positive comme cette belle biographie le rappelle.
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Citations et extraits (67) Voir plus Ajouter une citation
Cependant, pour se comprendre, il ne suffit pas de s'observer. On ne voit pas le monde quand on a le regard fixé sur son nombril. Voilà pourquoi il lit l'histoire, il étudie la philosophie, non pour en retirer des enseignements ou des certitudes, mais pour voir comment d'autres ont agi, pour confronter son moi à d'autres moi.
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Ce que Montaigne a énoncé quelques siècles plus. tôt reste vrai et valable pour ceux qui s'efforcent d'acquérir leur autonomie.

Toute notre gratitude doit aller à ceux qui, en une époque d'inhumanité comme la nôtre, affermissent en nous l'humanité et nous exhortent à ne pas aliéner notre seul bien, ce que nous ne devons surtout pas perdre, à savoir notre moi intime.

Seul celui qui reste libre envers et contre tout fait croître et perdurer la liberté sur terre.

(P.44 et 45)
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C'est une des lois mystérieuses de la vie, ses valeurs authentiques et essentielles nous apparaissent toujours trop tard: la jeunesse quand elle s'enfuit, la santé dès qu'elle nous abandonne, et la liberté, cette précieuse essence de notre âme, alors qu'elle va nous être ôtée ou qu'elle l'a déjà été.
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Montaigne loue comme principal avantage des livres leur capacité à stimuler, par leur diversité, sa faculté de jugement. La lecture incité à répondre, à exprimer sa propre opinion. Ainsi prend-il l'habitude d'annoter les ouvrages, de souligner, puis d'inscrire à la fin la date à laquelle il les a lus, parfois aussi l'impression qu'il en a retirée à ce moment-là.
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Nous devons notre reconnaissance à ceux qui renforcent en nous le sens de l'humain dans une époque inhumaine comme la nôtre, à ceux qui nous exhorte à ne pas abandonner ce qui nous est propre, ce que nous ne saurions perdre, notre moi le plus profond. Car seul celui qui reste libre de tous et de tout accroît et préserve la liberté sur terre. (p.29).
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Vidéo de Stefan Zweig
Stefan Zweig, auteur à succès, se voulait citoyen d'un monde qu'unifiait une communauté de culture et de civilisation. Il n'a pas survécu à l'effondrement de ce «monde d'hier» qu'incarnait la Vienne impériale de sa jeunesse.
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